Hommage à Alain Delon, l’une des dernières grandes stars du cinéma français

Un regard piscine, une allure féline, beaucoup d’insolence, un talent monstre… L’acteur français Alain Delon, né en 1935 à Sceaux, s’est éteint à l’âge de 88 ans, ce dimanche 18 août. Il laisse derrière lui des films sublimes, des personnages troubles et fascinants… et pas mal de controverses.

Alain Delon, l’un des derniers monuments du cinéma français

Avec Brigitte Bardot, Catherine Deneuve, Jean-Paul Belmondo et Romy Schneider (avec laquelle il a vécu une idylle intense), Alain Delon demeure l’un des derniers monuments du cinéma français. Une vraie star, connue et adulée jusqu’à l’étranger. Une marque de cigarettes portant son nom a même existé en Asie dans les années 90.

Ses films ont attiré 136 millions de spectateurs, et parmi ces derniers, se trouvent de nombreux chefs-d’œuvre. Plein Soleil, Rocco et ses frères, Le Guépard, Mélodie en sous-sol, Le Samouraï, La Piscine, Le Clan des Siciliens, Le Cercle rouge, Borsalino, Un flic, Monsieur Klein ou Notre histoire…. Il a ainsi tourné avec les plus grands cinéastes : Jean-Pierre Melville, Luchino Visconti, Jean-Luc Godard, Michelangelo Antonioni, Bertrand Blier ou encore Jacques Deray.

Il semblait ne pas porter d’intérêt aux grandes cérémonies médiatiques. Mais l’acteur a été récompensé du César du Meilleur Acteur en 1985 pour Notre histoire et a reçu, en mai 2019, une Palme d’Or pour l’ensemble de sa carrière au Festival de Cannes.

Soleil noir

Marqué par une enfance instable (après le divorce de ses parents, il est placé en famille d’accueil et sera renvoyé six fois de l’école), Alain Delon s’est cherché dans ses rôles tout en imprégnant la pellicule d’un spleen entêtant. Il excellait dans les partitions complexes, incarnant à la perfection les personnages énigmatiques, ténébreux, tourmentés, solitaires, ambivalents et taciturnes. Tantôt voyou ou assassin, tantôt flic, il était toujours intense et juste.

L’icône du cinéma français s’est même réinventé au fil des années, passant du jeune premier séducteur à la physionomie stupéfiante à l’homme ombrageux, taiseux et inquiétant. Pour résumer, il s’est aventuré du feu à la glace. Avec son élégance, sa présence (qui suffisait à construire un long-métrage et à tenir le spectateur en haleine) et son magnétisme, l’acteur a redéfini ce qu’était l’essence même de la beauté et de la masculinité. Comme Brigitte Bardot, il dégageait une sensualité qui cramait tout sur son passage. Et ringardisait tout ce qui se trouvait autour, d’Yves Montand à Jean Gabin.

“C’est un acteur très animal, c’est un fauve même, dans le bon sens du terme. Il a une présence incroyable”, notait Bertrand Blier dans un documentaire intitulé Alain Delon : La naissance du mythe. De son côté, Alain Delon décrivait ainsi sa manière de jouer : “Je suis un acteur. Un comédien joue, il passe des années à apprendre, alors que l’acteur vit. Moi, j’ai toujours vécu mes rôles. Je n’ai jamais joué. Un acteur est un accident. Je suis un accident. Ma vie est un accident. Ma carrière est un accident.”

“Moi, j’ai toujours vécu mes rôles. Je n’ai jamais joué.” Alain Delon

Alain Delon avait aussi un côté sombre. Très controversé, le comédien gaulliste et macho était connu pour son égocentrisme (sa mégalomanie), son lien avec le milieu du grand banditisme, ses saillies homophobes et sexistes et sa sympathie pour le FN. Il a aussi eu un fils avec la chanteuse Nico, Ari Boulogne, qu’il n’a pas reconnu. Le jeune homme si moderne de Plein Soleil s’était mué en figure idolâtrée quelque peu réactionnaire.

Au moment de sa disparition, en plus de grands classiques du cinéma et de quelques scandales (la mort de son garde du corps, Stevan Markovic, a fait grand bruit en 1968), la plupart de ses fans garderont le souvenir d’une vie vécue avec passion(s) (notamment pour les femmes).

En 2019, dans une lettre destinée à ses fans, l’acteur déclarait : “Alors que mon voyage touche à sa fin, je veux le dire : j’ai connu tant de passions, tant d’amours, tant de succès et d’échecs, tant de controverses, tant d’esclandres, de ténébreuses affaires, tant de souvenirs, tant de rendez-vous manqués, de rencontres impromptues, tant de hauts et de bas ; que lorsque les honneurs ne seront plus que de vains et lointains souvenirs, il est une seule chose qui brillera par sa constance et sa longévité : vous, vous seuls.”