1 juil 2020

Janette Beckman, reporter de la jeunesse rebelle en 5 photos de stars

Janette Beckman a immortalisé les débuts des mouvements punk et hip-hop. Témoin privilégié de la culture underground depuis plus de quatre décennies, la photographe a eu la chance de pouvoir travailler avec “The Police” et le groupe qui scandait “F**k Tha Police” (N.W.A.). Elle est aujourd’hui à l’affiche de “Through The Lens”, un documentaire sur l’histoire du label hip-hop Def Jam disponible sur YouTube. Retour sur 5 clichés d’artistes rebelles qui ont marqué sa carrière.

 

The Police, Outlandos cover, 1978 © Janette Beckman

Seule personne à avoir photographié à la fois Sid Vicious, leader des Sex Pistols et le rappeur mythique Big Daddy Kane, Janette Beckman est la première photographe à avoir effectué la connexion entre les contre-cultures punk et hip-hop.

 

Après avoir fréquenté la King Alfred School — une école bohème de l’ouest londonien qui valorise le développement personnel de ses élèves plutôt que leur réussite scolaire — Janette Beckman débute sa carrière de photographe documentaire en 1977 au sein de la revue musicale Melody Maker et réalise de nombreuses pochettes d’album, comme celle d’Outlandos d’Amour [1978], le premier enregistrement de The Police.

 


En 1982, Janette Beckman doit couvrir à Londres la première tournée internationale effectuée par les pionniers du hip-hop new-yorkais. Sont présents Afrika Bambaataa, Fab 5 Freddy, le Rock Steady Crew et une poignée d’autres artistes qui marqueront à jamais l’histoire du mouvement. Quelques mois plus tard, elle se rend à New York pour fêter Noël chez une amie. Fascinée par les concours de breakdance organisés en pleine rue, par les trains couverts de graffitis et les bandes de jeunes se baladant avec d’énormes Ghetto-blaster sur les épaules, elle ne repartira jamais.

Sex Pistols, Hyde Park, 1977 © Janette Beckman

1. Les Sex Pistols dans une benne à ordure en 1977

 


Janette Beckman rencontre les membres des Sex Pistols Johnny Rotten et Sid Vicious par l’intermédiaire de la célèbre journaliste musicale Vivien Goldman en 1977. À l’époque, la photographe a pour habitude de traîner en tee-shirt et bas de pyjama dans le quartier de Soho — situé dans le West End de Londres — pour y photographier la scène alternative qui peuplait le secteur avant qu’il ne devienne un lieu branché de la capitale. C’est ici, à quelques pas de Hyde Park, que Janette Beckman choisit de se balader avec le groupe initiateur du punk, encore peu habitué aux shootings photos. “Qu’est ce qu’on peut faire pour paraître rebelles ?” lui demandent-ils “Pousser une vieille dame à vélo ?”. C’est finalement l’option de sauter dans une grande benne à ordure qui est privilégiée.

UB40, Soho, 1981 © Janette Beckman

2. UB40 devant un sex-shop en 1981

 

Les musiques noires ont une influence majeure sur les milieux prolétaires britanniques du début des années 80. Le punk et le rock cohabitent avec la soul, le blues, le ska et bien-sûr le reggae comme celui d’UB40, une bande de jeunes venus de Birmingham qui deviendront célèbres en 1983 avec le titre Red Red Wine. Pour photographier ces enfants terribles en veste Harrington et casquette jamaïcaine, Janette Beckman se rend dans une rue de Soho habituellement fréquentée par des prostituées et les immortalise en train de se chamailler devant un sex-shop.

 

Slick Rick, Manhattan, 1989 © Janette Beckman

3. Slick Rick se tient l’entrejambe en 1989

 


En 1989, Janette Beckman photographie le rappeur Slick Rick pour le label de hip-hop Def Jam. Après de longues discussions sur leurs origines londoniennes communes et une soirée arrosée au champagne, Slick Rick entre en studio pour le shooting. “Je n’aime pas faire poser les gens que je photographie”, raconte Janette Beckman dans Through The Lens, “j’aime qu’ils fassent ce qu’ils veulent de leur corps : si ils aiment s’appuyer contre un mur, je les laisse s’appuyer contre un mur”. Alors quand Slick Rick débarque devant l’objectif bouteille de champagne à la main en se tenant l’entrejambe, la photographe garde le cliché tel quel. Lorsqu’elle voudra le réutiliser pour son livre Rap!: Portraits and Lyrics of a Generation of Black Rockers, son éditeur refusera : Slick Rick étant derrière les barreaux pour avoir tiré sur un passant.

EPMD, Long Island, 1989 © Janette Beckman

4. Le duo EPMD à Long Island en 1989

 

Les membres d’EPMD (Erick and Parrish Making Dollars) font appel à Janette Beckman en 1989 pour développer la pochette de leur deuxième album Unfinished Business. Le duo originaire de Long Island lui donne rendez-vous au bout d’une impasse faisant face à l’océan. Ne les voyant pas arriver, la photographe se décide à contacter leur manager, qui l’informe que les rappeurs font d’abord polir les jantes de leurs voitures à l’autre bout de la ville, dans le Bronx. Après de longues heures d’attente, Erick et Parrish débarquent apprêtés dans des costumes lunaires et s’assoient sur le capot de leurs voitures. En cette fin de journée, la lumière est parfaite et Janette Beckman réalise l’un de ses clichés les plus réussis. 

 

Shepard Fairey, New York, 2018 © Janette Beckman

5. Shepard Fairey rend hommage à Public Enemy en 2018

 

Connu pour ses campagnes Obey Giant et HOPE, un poster à l’effigie de Barack Obama lors des présidentielles de 2008, Shepard Fairey est l’un des street-artistes les plus influents de sa génération. Lorsqu’en 2018, il souhaite rendre hommage au rappeur Chuck D à l'occasion des 30 ans de la sortie de l’album mythique It Takes A Nation of Millions To Hold Us Back de Public Enemy, il réinterprète une photo de Janette Beckman en sérigraphie. La photographe vient signer en personne les 550 exemplaires disponibles à la vente et immortalise cette association inédite. 

 


Janette Beckman est actuellement à l’affiche du documentaire Def Jam: Through The Lens, disponible sur YouTube.