13 déc 2023

Tout savoir sur l’artiste Loris Gréaud, chef d’orchestre de l’invisible exposé au Petit Palais

Chaque semaine, Numéro décrypte le travail d’un artiste contemporain exposé actuellement. Ici, focus sur le Français Loris Gréaud, artiste pluridisciplinaire aux œuvres audiovisuelles, performatives et multisensorielles, qui présente jusqu’au 14 janvier une exposition personnelle au Petit Palais, à Paris.

L’artiste Loris Gréaud, chef d’orchestre de l’invisible

 

Depuis une vingtaine d’années, Loris Gréaud fait le pont entre le monde matériel et immatériel à travers des installations pensées comme des expériences multisensorielles. Lauréat du prix Fondation Pernod Ricard en 2005, et révélé au grand public par son exposition personnelle au Palais de Tokyo en 2008, l’artiste français nourrit sa pratique d’un intérêt pour de nombreux domaines : la musique – il apprit la flûte traversière au Conservatoire de Paris –, les machines et leur fonctionnement, l’architecture urbaine, le cinéma – il se passionne notamment pour David Lynch et Stanley Kubrick –, la physique ou encore la philosophie. En résultent des productions audiovisuelles et performatives d’une grande ambition technique, très poreuses avec leur environnement, jouant avec la lumière, le son et le passage du temps.  En 2013, il présentait par exemple une double exposition d’ampleur au musée du Louvre et au Centre Pompidou : sous la pyramide du premier, l’artiste avait alors installé une grande statue semblait sur le point de tomber, tandis que dans le hall du second, un cascadeur se jetait toutes les deux minutes du haut d’une tour en métal pour atterrir sur un coussin noir, plaçant le spectateur dans une tension permanente.

 

 

Loris Gréaud au Petit Palais : une exposition pensée comme expérience multisensorielle

 

Inaugurée en octobre lors de la semaine de l’art, l’exposition “Les Nuits Corticales” de Loris Gréaud au Petit Palais investit la façade, plusieurs salles ainsi que la cour du bâtiment parisien, inauguré en 1900. Au fil du parcours parmi ses collections permanentes, on découvre, entre autres, des sculptures sonores, activées ponctuellement par des musiciens, une œuvre olfactive cherchant à imiter l’odeur de la Voie lactée, ou encore une scène circulaire et des caissons noirs qui, au milieu du jardin, transforment l’espace au gré de créations sonores, lumières orangées et nuées de fumée artificielle. Une intervention tout en subtilité ponctuée par plusieurs performances, dont un concert du groupe The Residents qui jouera le 13 janvier, dernier jour de l’exposition, un morceau unique et inédit créé pour l’occasion.

L’œuvre choisie par l’artiste : quand le Petit Palais irradie les rues de lumière

 

En plein cœur du Petit Palais, dans la Rotonde, une installation s’annonce comme un étrange guide de visite : sur quatre boîtes noires hautes comme des consoles, huit panneaux lumineux diffusent sur fond blanc des signes plus ou moins cryptiques – lettres grecques, mots, cartes… Mais il faudra attendre la nuit pour que cette œuvre, intitulée La Machine Molle, adopte un autre visage : tous les soirs entre 22 heures et minuit, alors que le Petit Palais est désormais fermé au public, sa rotonde s’anime à fort d’éclairages stroboscopiques dont l’intensité traverse ses fenêtres et offre aux passant un spectacle fascinant. Une installation qui puise son inspiration chez l’artiste Brion Gysin et l’écrivain William S. Burroughs et leur “dreamachine”, un cylindre en papier éclairé par une ampoule dont la rotation provoque, par effet de persistance rétinienne, une expérience presque hallucinatoire. L’œuvre originale est d’ailleurs à découvrir actuellement au musée du quai Branly, dans l’exposition “Visions chamaniques. Arts de l’ayahuasca en Amazonie péruvienne”.

 

Les mots de Loris Gréaud

 

“Le séquenceur de l’exposition Cortical, cette “banque d’accueil” installée dans la rotonde du musée, délivre le jour les informations sur les oeuvres (leur sens, leur localisation, leur titre, leur médium…) pour, la nuit, passer en “mode veille”. De dispositif fonctionnel de jour, Cortical devient ainsi La Machine Molle de nuit : un brouilleur de signal, une oeuvre d’art à part entière. La Machine Molle permet à l’exposition de se poursuivre, de continuer d’émettre et de rayonner pour potentiellement trouver sa plus belle apparition, son point culminant, dans le regard paradoxalement fermé des visiteurs qui voudront bien se prêter au jeu de monter sur les marches et s’exposer aux battements lumineux. Ce qui était voué à éclairer le sens des œuvres propose en réalité une expérience psychédélique. Pour moi il s’agit d’une pièce centrale de l’exposition, d’un centre névralgique : elle incarne véritablement le projet des Nuits Corticales.”

 

“Loris Gréaud. Les Nuits Corticales”, exposition jusqu’au 14 janvier 2024 au Petit Palais, Paris 8e.

 

 

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