25 oct 2023

Daniel Buren et Michelangelo Pistoletto : une exposition renversante au Palais d’Iéna

Dans le cadre de la foire Paris+ par Art Basel, le Palais d’Iéna accueille jusqu’au 29 octobre l’exposition de deux monstres sacrés de l’art contemporain : Daniel Buren et Michelangelo Pistoletto. Co-directeur de Galleria Continua, qui représente les deux artistes, Lorenzo Fiaschi raconte cette rencontre inédite.

En collaboration avec Paris+ par Art Basel.

La rencontre entre Daniel Buren et Michelangelo Pistoletto au Palais d’Iéna

 

C’est à une véritable rencontre inédite entre deux monstres sacrés de l’art contemporain que le Palais d’Iéna nous convie cette année, dans le cadre du programme public de Paris+ par Art Basel. L’artiste français Daniel Buren et l’artiste italien Michelangelo Pistoletto ont accepté de se confronter conjointement à ce joyau de l’architecture rationaliste moderne. Conçu en 1937 pour l’Exposition universelle par Auguste Perret, le monument historique abrite actuellement le Conseil économique, social et environnemental (CESE). Entièrement réalisé en béton, sans aucun revêtement, c’est en le mélangeant à du marbre rose ou du porphyre vert, en le traitant de diverses manières et en recourant à des combinaisons de formes géométriques simples (rectangle, triangle, cercle) que l’architecte créa des couleurs, des surfaces et des formes diversifiées et nouvelles, ainsi que des jeux d’ombre et de lumière originaux. L’historien de l’art Matthieu Poirier a conçu et développé ce projet extraordinaire avec le galeriste Lorenzo Fiaschi, co-directeur de Galleria Continua.

 

L’interview de Lorenzo Fiaschi, directeur de la Galleria Continua

 

Florence Derieux : Comment ce projet a-t-il été lancé ?

Lorenzo Fiaschi : Au mois de juin, Matthieu Poirier m’a invité à le rencontrer au Palais d’Iéna, que je n’avais encore jamais visité. J’ai immédiatement été frappé par la symétrie, la profondeur et la luminosité qui caractérisent ce lieu. L’axe de réflexion historique de Michelangelo Pistoletto s’est tout de suite imposé à nous, et tout particulièrement son œuvre Division et multiplication du miroir (Divisione e moltiplicazione dello specchio, 1978). Les grandes fenêtres de part et d’autre de la salle, quant à elles, nous ont tout de suite amenés à penser aux œuvres de Daniel Buren, et notamment ses “vitraux” qui interagissent avec l’espace et l’architecture des lieux, qu’elles investissent tout en les modifiant. 

À respectivement 85 et 90 ans, Daniel Buren et Michelangelo Pistoletto n’avaient encore jamais travaillé ensemble. Comment êtes-vous parvenu à les convaincre ?

Ils se connaissent depuis très longtemps et s’apprécient beaucoup, et je travaille pour ma part avec eux depuis presque 28 ans. Matthieu Poirier et moi-même avons rapidement eu une idée assez précise de ce que nous souhaitions proposer à chacun. Il ne restait qu’à les convaincre de travailler conjointement à leur propre projet, puis de faire le lien entre eux. 

 

Qu’est-ce qui vous a amené à les solliciter ensemble ?

Les recherches menées depuis tant d’années par Daniel Buren et par Michelangelo Pistoletto se prêtaient à cette invitation. Il faut entrer dans la philosophie de leur travail. Eux-mêmes veulent croire que les gens qui s’intéressent à leur œuvre viendront découvrir leur installation et qu’ils en feront véritablement l’expérience, une expérience qui sera absolument unique pour chacun d’entre eux à chaque instant. 

Le Palais d’Iéna est un bâtiment unique, entre classicisme et modernité, qui se distingue notamment par sa forme anthropomorphique aux proportions parfaites. Est-ce que cet aspect a, lui aussi, joué un rôle dans la conception de leur installation ?

Daniel Buren a travaillé sur les fenêtres et Michelangelo Pistoletto avec des miroirs. On peut dès lors penser à la lumière, aux reflets, aux couleurs, etc., mais ce qui compte, c’est l’expérience. Effectivement, le corps des visiteur∙euse∙s est au cœur de l’œuvre : il entre immédiatement en relation avec l’espace et l’architecture, et en se déplaçant, il va les transformer comme il va modifier l’installation elle-même. C’est une question de mouvement complet, de synergie totale entre les deux œuvres.

 

Comment se présente cette installation ?

Il s’agit d’une création inédite réalisée in situ dans la célèbre salle hypostyle du Palais d’Iéna et pensée en fonction de ses particularités. Elle met cette architecture en valeur tout en cassant ses codes. Elle joue de ses points de vue, de la solennité de ses espaces, de la polychromie de ses bétons, de sa luminosité particulière, de sa symétrie complexe, tout comme de sa situation urbaine et de son environnement. 

 

Daniel Buren & Michelangelo Pistoletto, jusqu’au 31 octobre octobre 2023 au Palais d’Iéna, Paris 16e. 

Projet soutenu par Galleria Continua  (San Gimignano, Beijing, Dubai, Havana, Boissy-le-Châtel, Paris, Rome, São Paulo).

 

Florence Derieux est historienne de l’art et commissaire d’exposition.

Photographies au Palais d’Iéna par Paris+ par Art Basel.