22 oct 2025

La galerie Lo Brutto Stahl, déjà un incontournable de la scène parisienne

En à peine trois ans d’existence, la galerie Lo Brutto Stahl a su prouver, à Paris comme à Bâle, son exigence avec une programmation pointue et internationale, mais aussi des projets originaux, comme une exposition dans un aéroport privé. Retour sur la trajectoire de ses deux fondateurs Vincent Lo Brutto et Pablo Stahl.

  • Texte par Guillaume Oranger , 

    Portraits par Clara Belleville.

  • Lo Brutto Stahl, une galerie jeune mais déjà exigeante

    La galerie Lo Brutto Stahl a ouvert en mars 2023, mais passer la porte de l’espace longiligne et intransigeant du n° 21 de la rue des Vertus, c’est comprendre assez immédiatement que l’aventure formelle de Vincent Lo Brutto et de Pablo Stahl a commencé il y a longtemps. Nés à Mulhouse (Vincent en 1995, Pablo en 1997), où ils ont tous deux grandi, ils se rencontrent au début de leur première année aux beaux-arts, en septembre 2015, dans leur ville natale. Alors que Vincent s’engage dans une voie résolument sculpturale, Pablo travaille au croisement de la photographie et de l’écriture. De longues conversations approfondissent leurs points communs, ayant pour élément central une pensée de l’installation confinant aux enjeux structurels de l’exposition.

    Vincent Lo Brutto et de Pablo Stahl : d’étudiants en art à galeristes

    La première mention d’un projet de galerie date du printemps 2019, au contact de l’effervescence de la scène londonienne pré-Brexit – Vincent y était alors installé, recevant les fréquentes visites de Pablo, orienté en droit de l’art. Le choc des échelles opérant, le projet s’augmente d’une urgence : les deux galeristes avaient déjà organisé des expositions ensemble, mais leurs réflexions se cristallisent dès lors dans la volonté d’investir un espace permanent.

    L’apparition du Covid, ses sursauts et l’ampleur des travaux, que nécessite le lieu sur lequel ils jettent leur dévolu, deviennent autant d’occasions d’affiner leur projet. Certains des acteurs du marché, auprès desquels ils prennent conseil, leur préconisent une formule nomade et une présence strictement numérique. Leur volonté est pourtant ferme d’investir un espace au cœur du Marais, pour se positionner directement auprès des galeries majeures de la scène parisienne.

    Une programmation pointue et internationale

    En 2021, leurs voyages (New York, Londres, Berlin, Milan) ont pour unique fonction de constituer leur programme. À la fin de l’année 2022, les travaux de l’espace touchent à leur fin, la liste des artistes est établie et les constituer leur programme. À la fin de l’année 2022, les travaux de l’espace touchent à leur fin, la liste des artistes est établie et les dates de la première exposition se profilent. Intitulée “Inauguration”, elle donne l’impression que la ligne de départ est franchie au pas de course, jouant d’un effet de surprise savamment protégé.

    Vingt-huit pièces de dix-huit artistes confèrent à cette exposition inaugurale un ton à la fois accompli et matriciel : elle compte quatre des huit artistes que la galerie représente désormais, et de nombreux autres avec lesquels elle travaille encore.

    D’une discrète rue du Marais à un aéroport privé de Bâle

    S’y articulent un regard acéré, une audace scénographique et une pensée du long terme, que les expositions suivantes déclineront – déjà dix-huit, dont deux dans le surprenant format de la société aéronautique Air Service Basel. Le principe, formulé après quelques mois d’ouverture, est d’une clarté redoutable : pendant Art Basel, la galerie investit d’une exposition collective la totalité de l’aéroport privé de Bâle, se rapprochant de fait des grands collectionneurs en route vers la foire.

    Le succès de la première édition entraîne, à la fin de l’année 2024, l’ouverture d’un espace permanent dans les locaux de l’aéroport. La deuxième édition, au cours d’Art Basel 2025, connaît un succès d’autant plus retentissant que l’édition précédente était perçue comme un one-shot. La galerie suisse Hauser & Wirth ne s’y était pas trompée en choisissant Lo Brutto Stahl pour la deuxième exposition de son format collaboratif Hauser & Wirth Invite(s), qui s’est tenue du 24 avril au 24 mai 2025. Le choix collégial s’est porté sur Carlotta Amanzi, jeune peintre italienne de la galerie : il y a, chez Lo Brutto et Stahl, une touche de génie commercial qui, mêlée à l’élégance naturelle qu’ils partagent, promet un long chemin.

    Simon Callery, Philip Seibel… Des artistes éclectiques

    Sans se cloîtrer dans des catégories trop franches : leur programme n’est pas plus contraint par les dénominations formelles de l’histoire de l’art que par ses segments géographiques et temporels. Les écarts séparant la peinture géologique de Simon Callery, les climatisations sépulcrales de Philip Seibel et les tableaux fibreux de ML Poznanski. Trois des huit artistes de la galerie, témoignent à eux seuls de cet éclectisme.

    Intarissables sur les grands marchands d’art qu’ont été Paul Durand-Ruel et Ambroise Vollard, c’est dans leur ample sillage que s’effectue leur parcours, ponctué des francs sourires et du verbe, à la fois sérieux et chaleureux, qu’ils dispersent dans la lumière tranchante de leur espace parisien. Lo Brutto et Stahl font une équipe attentive aux rythmes et aux ouvertures du marché, autant qu’aux plus subtiles impressions de son public, accueilli avec une hospitalité exemplaire : c’est bien logiquement que son nombre va croissant

    Shelby Jackson”, du 19 octobre au 22 novembre, galerie Lo Brutto Stahl, Paris 3e.
    Philip Seibel. Bordun”, jusqu’au 15 novembre, galerie Lo Brutto Stahl, Bâle.