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Louise Trotter
La créatrice britannique Louise Trotter succède à Matthieu Blazy à la direction artistique de Bottega Veneta. Son style, empreint de minimalisme et d’influences sportives, reflète une vague contemporaine qui dynamise aujourd’hui l’industrie de la mode. Que peut-on attendre de son arrivée au sein du prestigieux groupe Kering ?

Les débuts de Louise Trotter
Louise Trotter naît à Sunderland, une ville portuaire du nord de l’Angleterre. Dès l’adolescence, elle s’intéresse aux vêtements et à la manière dont ils traduisent une identité. En 1991, elle est diplômée en design de mode à l’Université de Northumbria, située à Newcastle. Cette formation lui donne les bases théoriques et pratiques nécessaires pour évoluer dans une industrie compétitive.
Son premier emploi la mène chez Whistles, une enseigne britannique spécialisée dans le prêt-à-porter. Elle y apprend rapidement les rouages du commerce, du design et de l’achat. Promue directrice créative et acheteuse, elle acquiert une première expérience de gestion. Elle comprend que la mode exige autant de créativité que de stratégie.
En 2001, Louise Trotter rejoint Calvin Klein comme directrice du prêt-à-porter. Cette opportunité l’amène à New York, une ville cosmopolite qui bouleverse sa vision. L’environnement urbain, fonctionnel et minimaliste influence son esthétique. Cette période marque le début d’une signature qui conjugue rigueur et modernité.
Ascension internationale et premiers rôles clés
La carrière de Louise Trotter se construit pas à pas. Après son expérience américaine, elle est nommée vice-présidente du design chez Gap. Elle supervise ensuite le design de Tommy Hilfiger, l’une des grandes marques américaines de sportswear.
Ces postes, prestigieux et stratégiques, la hissent vers son premier rôle de directrice artistique. En 2007, elle prend la tête de Jigsaw, marque britannique reconnue pour son élégance accessible. Ce retour à Londres confirme qu’elle sait aussi bien diriger une maison internationale qu’insuffler une vision à une enseigne plus locale.
Joseph et la consécration
En 2009, Louise Trotter devient directrice artistique de Joseph, maison anglaise emblématique. La marque, détenue par Onward Luxury Group, lui confie la mission de redéfinir son identité. Pendant neuf ans, elle façonne une nouvelle vision du minimalisme.
Elle ne se contente pas de produire des essentiels classiques. Elle détourne leur usage, introduisant une allure volontairement décalée, parfois gauche, mais toujours élégante. Ses collections offrent un raffinement décontracté.
Lacoste et l’élégance sportive
En 2018, Louise Trotter est nommée directrice artistique de Lacoste. Elle devient la première femme à diriger la maison française depuis sa création. Ce symbole illustre son importance croissante dans une industrie longtemps dominée par les hommes. Son style sobre et sportif s’adapte parfaitement à l’univers Lacoste. Elle propose des coupes droites, des couleurs assourdies et des références subtiles au passé. Elle revisite des codes classiques comme le Vichy ou le vert forêt, sans tomber dans la nostalgie.
Le résultat séduit : ses collections révèlent une mode à la fois minimale et raffinée. Le public perçoit une vision androgyne, même si elle ne la revendique pas. Pour Louise Trotter, le vêtement doit avant tout avoir une fonction. Elle privilégie la simplicité et les lignes droites, loin des excès décoratifs. Son passage chez Lacoste confirme son talent à réinterpréter un héritage tout en le modernisant. Elle prouve qu’un vêtement sportif peut être chic, et qu’une marque patrimoniale peut séduire une nouvelle génération.
Carven : une parenthèse révélatrice
En 2023, Louise Trotter prend la direction artistique de Carven, maison française spécialisée dans le prêt-à-porter. Elle y présente deux défilés, en septembre 2023 puis en mars 2024, lors des Fashion Weeks parisiennes.
Chez Carven, elle abandonne son empreinte sportswear au profit d’une allure plus formelle. Ses silhouettes adoptent la devise “less is more” sans rigidité. Elle met en avant des épaules affirmées, des manches ballons et des lignes nettes.
Cette étape, brève mais marquante, démontre sa capacité d’adaptation. Elle prouve qu’elle peut naviguer entre univers et styles, sans se laisser enfermer dans une seule identité. Dans une industrie où l’on catégorise vite les créateurs, cette versatilité est une force.
Bottega Veneta : un futur prometteur

Depuis janvier 2025, elle succède à Matthieu Blazy à la direction artistique de Bottega Veneta. Le choix de Trotter témoigne de la volonté de Bottega Veneta de consolider une esthétique raffinée. La maison, célèbre pour ses tressages de cuir et son luxe discret, partage avec elle une vision minimaliste et fonctionnelle.
Un style reconnaissable et évolutif

Au fil de sa carrière, Louise Trotter a développé une écriture cohérente. Son esthétique s’appuie sur le minimalisme, le sport et une sobriété élégante. La créatrice sait évoluer, passer du casual chic de Joseph à l’élégance sportive de Lacoste.
Son talent réside dans cette capacité à ajuster son vocabulaire sans renoncer à sa signature. Ses créations rappellent que la mode peut être à la fois simple et réfléchie, fonctionnelle et esthétique. Louise Trotter incarne une génération de créatrices qui ont su s’imposer dans une industrie exigeante. De Sunderland à Milan, son parcours illustre la patience et la persévérance. Chaque étape a affiné sa vision et enrichi sa palette stylistique.
Aujourd’hui, sur le point de débuter son mandat à Bottega Veneta en janvier 2025, elle porte une mission ambitieuse : redéfinir le luxe contemporain. Sa carrière prouve qu’un vêtement peut être à la fois fonctionnel et poétique. Sa vision, entre minimalisme et élégance, promet d’écrire un nouveau chapitre pour la maison italienne.