9 juil 2025

Comment Karol G s’est imposée comme une icône du reggaeton 

Figure majeure de la musique latine, icône du reggaeton et collaboratrice de Shakira ou de Bad Bunny, Karol G s’impose bien au-delà des charts. De ses débuts discrets à son dernier album en date Tropicoqueta (2025), la Colombienne trace un chemin singulier. Retour sur l’ascension d’une artiste déjà majeure.

  • par La rédaction.


  • Avec Dua Lipa et Cardi B, elle a fait sensation au dernier défilé Schiaparelli, à Paris. Karol G s’est imposée dans les mondes de la musique et de la mode comme l’une des artistes majeures du reggaeton. Elle a même reçu plusieurs prix dont un Grammy Award et cinq Latin Grammy Awards. Pourtant, son ascension ne s’est pas faite en un jour…

    La chanteuse Carolina Giraldo Navarro alias Karol G a pourtant commencé jeune dans la musique. Née à Medellín, “la ville du printemps éternel” située dans les Andes colombiennes et issue d’une famille modeste de mélomanes, elle entre très jeune au Conservatoire de sa ville. Elle n’a que 14 ans lorsqu’elle participe au télécrochet El Factor Xs, version junior de The X Factor, lors de la saison inaugurale de 2006. Elle échouera malheureusement aux portes des galas, diffusés en direct… Mais la route est encore longue. Aussi, Carolina Navarro peine à convaincre les maisons de disques colombiennes. Une femme n’aurait pas sa place dans le reggaeton. Elle s’entête.

    L’ascension de Karol G, du conservatoire au succès mondial

    Entre 2006 et 2017, Karol G, 34 ans, trace un parcours à contre-courant des stars éclair, s’affirmant dans l’ombre par une série de singles autoproduits et collaborations discrètes. Loin des projecteurs, elle forge sa voix et son identité, entre reggaeton traditionnel et pop urbaine douce-amère. 2014 sera l’année de la pause stratégique, à New York. Il lui faut comprendre les rouages de l’impitoyable industrie musicale et, surtout, du business monumental qui en découle.

    Sa signature chez Universal en 2016 marque un tournant, préfigurant l’explosion de Ahora Me Llama, son titre en duo avec Bad Bunny, hymne d’indépendance et de désir maîtrisé. Ce morceau, tremplin du premier album Unstoppable (2017), scelle la métamorphose d’une outsider en figure incontournable du genre.

    Le titre hybride, entre trap latino et reggaeton classique, explose sur YouTube et propulse Karol G sur la scène internationale. Le single atteint rapidement les 900 millions de vues. Une consécration. Mais c’est avec Tusa (2019), en duo avec Nicki Minaj, que la machine s’emballe.

    Le titre, une sorte de catharsis post-rupture, devient viral et s’installe comme un hymne pour des millions de fans. La combinaison espagnol-anglais, l’auto-dérision et la production millimétrée signée Ovy on the Drums font mouche. À partir de là, chaque sortie devient un événement. Karol G sait s’entourer et collabore avec J Balvin, Anuel AA, Shakira ou encore Becky G… Sans jamais s’effacer.

    Karol G – Papasito (2025).

    Une esthétique affirmée, entre puissance et vulnérabilité

    Visuellement, Karol G développe une identité forte, fluide, parfois contradictoire. Cheveux bleus électriques pendant la période KG0516 (2021), robes transparentes, tatouages apparents : elle cultive l’excès mais refuse l’étiquette de « bimbo urbaine ». Son esthétique, mi-rétro mi-futuriste, emprunte autant à la rue qu’au glamour des années 2000. Comme le souligne le New York Times, elle incarne une forme de féminité « hyper-consciente », à la fois commerciale et subversive.

    Côté musique, elle oscille entre reggaeton, trap, pop latino et même ranchera (200 Copas, 2021), un genre musical traditionnel mexicain né à la fin du XIXe siècle et caractérisé par des thèmes patriotiques, amoureux ou mélancoliques. Cette hybridation témoigne d’une volonté de ne pas se laisser enfermer. Pour le média Rolling Stone, Mañana Será Bonito (2023) sera un tournant : plus introspectif, plus personnel, l’album montrait une Karol G en quête de réinvention. La critique y voit une réponse à la surmédiatisation de ses relations amoureuses et une manière de reprendre le contrôle narratif.

    Karol G ne cherche pas seulement à « faire danser ». Elle veut émouvoir, troubler, déranger parfois. Dans une industrie souvent masculine, elle impose enfin ses choix… avec fermeté.

    Karol G et Feid – Verano Rosa (2025).

    Tropicoqueta de Karol G, un album intime et caniculaire

    Avec l’album Tropicoqueta, sorti le 2 juillet 2025, Karol G livre un album dense, sensuel, d’une maturité troublante. Le titre, néologisme tropical et féminisé, annonce la couleur : ce disque s’impose comme un manifeste intime. On y retrouve la chanteuse dans des registres variés, de la ballade reggaeton (Silencio en la Playa) à la trap rétro (Café y Ceniza), en passant par des incursions house inattendues (No Me Llames Más).

    Ce qui frappe, c’est la précision de la production. Chaque beat semble pensé comme un souffle, chaque silence comme une caresse. Sur Playa del Olvido, elle évoque une rupture avec une délicatesse rare, sur une boucle de guitare acoustique à peine habillée. L’album est moins radiophonique que ses précédents, mais plus personnel. C’est une œuvre pour les fans de la première heure, une déclaration d’amour à la Colombie.

    Le morceau La Última con Él, en featuring avec Feid, est un sommet : l’alchimie est palpable, le texte elliptique, presque littéraire. La presse spécialisée salue ce virage. Pour Billboard, Tropicoqueta est « une offrande de sincérité dans une industrie qui n’en exige plus« . Avec Tropicoqueta, Karol G ne cherche plus à prouver quoi que ce soit au milieu de la musique. Elle crée pour celles et ceux qui l’écoutent au-delà des chiffres. Pour elle-même, surtout.

    Tropicoqueta (2025) de Karol G, disponible.