Paco Rabanne joue avec les codes de la bourgeoisie dans sa collection automne-hiver 2021-2022
Particulièrement inspiré par l’archétype de la bourgeoise française cette saison, Julien Dossena propose pour Paco Rabanne un vestiaire féminin flamboyant mélangeant les époques et les codes pour créer des rencontres jubilatoires, aux portes du kitsch.
Par Matthieu Jacquet.
Si monsieur Paco Rabanne est irrémédiablement associé à la fin des années 60 et les années 70, Julien Dossena, qui officie à la direction artistique de sa maison depuis huit ans, s’amuse volontiers à briser les frontières entre les époques. En atteste cette nouvelle collection pour la saison automne-hiver 2021-2022, où le créateur français provoque délibérément le mélange des genres et les rencontres anachroniques : alors que les coupes des plusieurs robes et jupes, cintrées légèrement taille haute, évoquent la mode des années 40, des blazers courts et des pantalons patte d’eph replongent quant à eux dans les années 70, tandis que les matières lumineuses et flamboyantes, lamés et sequins, ainsi que les coiffures et les maquillage portent une extravagance qui n’est pas sans rappeler les années 80. La confusion est efficace, le vestiaire suscitant immédiatement par sa réutilisation et son association de ces éléments une impression de familiarité accompagnée d’un certain étonnement. Pour l’imaginer, Julien Dosséna s’est particulièrement inspiré cette saison d’un archétype féminin : celui de la bourgeoise française, voire l’aristocrate, dont les parangons de l’élégance se sont longtemps reflétés exclusivement dans les collections des plus prestigieuses maisons et des plus grands couturiers – ces derniers les influençant tout autant en retour.
Photographiée et filmée devant divers papiers-peints vintage, la nouvelle “bourgeoise” vue par le créateur français est joyeuse et pétillante, bondit devant l’objectif avec un grand sourire et transmet son désir communicatif de liberté. Un esprit que l’on retrouve particulièrement dans les détails et accessoires de ses ensembles : des collerettes, cols claudine et lavallières bordent les chemisiers, les pulls et les robes, autour desquelles des ceintures en cuir se nouent parfois comme des rubans, tandis que quelques bibis à voilettes décorent une ou deux chevelures. Par leurs différentes déclinaisons de petites fleurs en all-over, leurs pois et leurs rayures voire leur effet moiré, les imprimés des manteaux et des robe contribuent eux aussi à l’esprit badin qui se dégage de l’ensemble. Mais l’impression générale laissée par ce vestiaire ne serait pas complète sans la place centrale offerte par Julien Dossena aux bijoux : entre assemblages de broches, boucles d’oreille oversize parfois transformées en boutons, parures clinquantes et mini-sac à main en maillon argenté, le créateur français ne lésine pas sur les grosses pierres, perles et chaînes pour ajouter à ses pièces toute leur lumière et rappeler l’héritage de la maison en frôlant le kitsch avec habilité. Comportant également dans ses silhouettes quelques robes légères satinées aux airs de déshabillé, la nouvelle collection Paco Rabanne semble écrire le début d’un nouveau chapitre, assumant désormais complètement l’hybridation des codes adaptées à un monde qui ne cesse de l’encourager.