Tailoring et transgression dans la collection Sankuanz printemps-été 2022
Très inspiré par le punk, mais également par le tailoring plus traditionnel, Shangguan Zhe dévoile pour la collection printemps-été 2022 de Sankuanz une collection plus lumineuse et colorée que les précédentes, parsemée de détails métalliques et d’effets de matière, mais aussi de réinterprétations du tailleur en tweed et du costume Mao.
Par Matthieu Jacquet.
Depuis sa création en 2013, Sankuanz s’est positionné comme un label explicitement transgressif dans le paysage de la mode chinoise. Une place qui ne cesse de se confirmer alors que, ces dernières saisons, les influences punk se font de plus en plus claires dans l’esprit de son fondateur Shangguan Zhe. Après une collection délibérément très sombre, voire offensive, à travers laquelle le créateur confiait à Numéro “son désir de tout détruire”, ce dernier revient avec un vestiaire plus lumineux et coloré, certes, mais qui porte toujours en lui cette énergie rebelle. Le titre de la collection n’en est pas moins évocateur : “Bells From Another China”, ou “les cloches d’une autre Chine”, en dehors des clous, qui cherche justement à échapper au conformisme et défier les normes établies. Défilant dans les étages d’un immense bâtiment circulaire, les mannequins avancent avec une désinvolture qui pourrait parfois rappeler celle de ceux du label Vetements. Une référence que l’on pourrait d’ailleurs supposer à la vue de plusieurs ensembles : des tee-shirts oversize et troués sont partiellement rentrés dans les jupes crayons, les pantalons sont amples et laissent leur bas s’affaisser sur les chaussures, tandis qu’une veste de costume XXL déchirée et des hoodies ultra-larges dotent les ensembles d’une fausse négligence.
Il n’en est rien, pourtant, car Shangguan Zhe démontre à nouveau dans cette nouvelle collection mixte son sens du détail. Là où les épines et les clous étaient à l’honneur à l’automne-hiver 2021-2022, ce sont désormais les œillets qui ornent certaines pièces : méticuleusement agencés sur de larges manteaux en laine, ou en vinyle avec jupe ou pantalon assortis, ceux-ci viennent relier par des boucles de diverses tailles les parties de vêtements segmentées comme on réassemblerait les pièces d’un puzzle ou permettre d’y suspendre des croix en bas des pièces, comme un arsenal de broches argentées. Outre ce détail technique, le créateur chinois prouve également son amour pour le tailoring plus traditionnel, en réinterprétant notamment le célèbre costume Mao austère en bleu oriental dans des costumes cintrés aux jambes évasées ou en reprenant le tailleur en tweed occidental noir, gris ou blanc pour en produire des vestes structurées portées avec des jupes midi fendues. Aux sombres tonalités de certaines silhouettes, Sankuanz oppose des bleus électriques et vert gazon, le rose poudré d’un cuir verni, l’effet délavé blanchâtre du denim bleu marine ou encore le sable qui macule un blanc écru. Là encore, le créateur a joué avec la peinture et la chimie pour créer des imprimés abstraits qui, à l’image de la collection, enveloppent ces pièces structurées d’une apparence chaotique.