9 sept 2021

“Halloween Kills”: la franchise de films d’horreur s’incruste à la Mostra de Venise

Avec Halloween Kills, la franchise de films d’horreur s’est incrustée dans un festival gavé de mélodrames, offrant un spectacle hautement divertissant, si gore et si convenu qu’il en est parfois comique.

Cette année, Venise marche sur les plates bandes de Cannes. La Mostra a eu son Titane, Mona Lisa and the Blood Moon (d’Ana Lily Amirpour), où une jeune coréenne s’évade d’un hôpital psychiatrique grâce à des superpouvoirs et s’engouffre dans la Nouvelle-Orléans pour dérober, avec une strip-teaseuse, de l’argent à tout homme qu’elle croise. Elle a aussi eu son Fast & Furious, Halloween Kills, le douzième opus de la franchise de films d’horreur présenté en avant première, hors compétition, sur le Lido. La suite d’Halloween (sorti en 2018) s’est incrustée dans un festival gavé de mélodrames, offrant un spectacle hautement divertissant, si gore et si convenu qu’il en est parfois comique.

 

Le film est le deuxième épisode d’une trilogie qui se veut au prolongement de l’Halloween originel de John Carpenter, La Nuit des masques, sorti en 1978. Il y a pourtant eu, depuis le classique à succès qui a donné naissance au genre du “slasher”, pléthore de longs-métrages réscussitant encore et encore le personnage du tueur, Michael Myers. Mais dès la franchise lancée, en 1981, son géniteur a réfuté sa parentalité. Ce n’est qu’en 2018 qu’un projet trouve grâce à ses yeux : Halloween, annoncée par Miramax comme l’unique suite d’Halloween : La Nuit des masques. Une petite sœur “légitime” donc, qui renie toutes ses aînées. Et carton au box-office oblige – le film a remporté plus de 255 millions de dollars $ dans le monde, un record –, le réalisateur David Gordon Green signe pour en écrire deux autres : Halloween Kills et Halloween Ends (dont la sortie est prévue en 2022).

Ce deuxième volet s’ouvre sur un long prologue rappelant ce que la franchise doit à son créateur. On embarque dans les années 70, pour une scène qui recrée les premières tueries de Michael Myers et pastiche le film de Carpenter. Lorsqu’on revient dans le présent, les victimes de ces massacres, qui étaient à l’époque des enfants, sont devenues adultes et se réunissent dans un bar, commémorant cette triste nuit où The Shape (l’autre nom de Michael Myers) a voulu assassiner Laurie Strode (Jamie Lee Curtis) – et la moitié de la ville avec. On retrouve cette dernière telle qu’on l’a laissée à la fin de l’Halloween de 2018 : blessée au ventre et sur le point de mourir. Elle est persuadée d’avoir enfin réussi à tuer son agresseur…Mais nous ne sommes pas dans Game of Thrones, et la suite est déjà dans les cartons.

 

Désormais grand-mère, Laurie Strode, accourt aux urgences avec sa fille et sa petite-fille, où elles ne tarderont pas à être rejointes par la ville entière. Tous sont bien décidés à en découdre : ce soir, ils auront la peau de Michael Myers. Armés de battes de baseball, les villageois de David Gordon Green pensent avoir trouvé le coupable, et sa poursuite provoque un gigantesque mouvement de foule dans l’hôpital. Mais il s’avère que ce n’est pas le bon, et le shérif ne peut s’empêcher de prononcer cette phrase lugubre : “Il nous transforme tous en monstres”. Qui aurait prédit qu’Halloween Kills ferait un tacle mémorable à l’hystérie collective – bien que le film ait été réalisé avant, on ne peut s’empêcher de penser à la folie de l’assaut du Capitole par des partisans pro-Trump en janvier 2021 –, et à la désinformation ? Misant presque exclusivement (et c’est bien dommage) sur la forme, le réalisateur redouble d’inventivité dans les séquences (très nombreuses) de massacre. Yeux arrachés à main nue, ventres poignardés au couteau de cuisine ou au néon fluorescent, troncs empalés sur des rampes d’escalier… Le spectacle est si gore que l’on rie nerveusement. Et si, dans son film de 1978, Carpenter passait au crible une Amérique pavillonnaire fixée devant sa télé, celle de David Gordon Green mange des petits fours devant Minnie et Moskowitz. Halloween deviendrait-il intello ? Rien n’est moins sûr.

 

Halloween Kills (2021) de David Gordon Green, en salle le 20 octobre 2021.