Lee Miller, Bettina Grossman, l’avant-garde féministe : les Rencontres d’Arles annoncent leur programmation
Du 4 juillet au 25 septembre, Les Rencontres d’Arles reviennent pour leur 53e édition. Cette année, le grand festival consacré à la photographie accueillera aux quatre coins de la ville une vingtaine d’expositions et des œuvres de plus de 160 artistes, de Lee Miller, figure majeure de la photographie du 20e siècle, à Bettina Grossman et Frida Orupabo, en passant par les nombreuses artistes de l’avant-garde féministe des années 70 telles qu’Orlan et Ana Mendieta, mises à l’honneur dans une grande exposition collective.
Par Matthieu Jacquet.
En plus de quatre décennies, Arles s’est affirmée en France comme la capitale de la photographie. Depuis la création du festival Les Rencontres d’Arles en 1970, la ville provençale vibre chaque été au rythme de nombreuses expositions consacrée à ce médium, mettant en avant aussi bien ses figures historiques plus ou moins connues du grand public, que ses mutations plus récentes, portées par de nombreux artistes contemporains. Après une édition annulée en 2020 et décalée à 2021, l’évènement revient dès le 4 juillet donner le coup d’envoi de sa 53e édition. Si la pandémie a eu l’an passé un impact sur l’assiduité des visiteurs, l’allègement des restrictions sanitaires et les dernières grandes nouveautés de la ville promettent d’attirer l’été prochain un nouveau vent de curieux : on pense notamment à l’ouverture l’été dernier de LUMA Arles, fondation d’art contemporain sous l’égide de la collectionneuse Maja Hoffmann qui investit à la fois grand Parc des ateliers au sud de la ville et l’immense tour imaginée par Frank Gehry de 56 mètres de hauteur, édifiée ces dernières années pour accueillir ces expositions. Mais aussi à l’inauguration, en avril dernier, de la fondation Lee Ufan Arles dans un hôtel du 18e siècle au cœur de la ville, pour accueillir des œuvres et expositions du célèbre artiste sud-coréen. Face à ce paysage artistique qui ne cesse de s’enrichir et de se dversifier, Les Rencontres d’Arles maintient sa ligne en réunissant cette année plus de 160 artistes au total, dont les œuvres investissent les quatre coins de la ville à travers une vingtaine d’expositions.
Plusieurs grands rends-vous émaillent cette nouvelle édition du festival. Si elle accueillait l’été dernier une grande exposition collective sur la thématique des masculinités en photographie, la Mécanique générale proposera cet été, au sein du parc des Ateliers, une nouvelle exposition d’ampleur consacrée à l’avant-garde féministe des années 70 en Occident : extraites de la collection Verbund, les œuvres de 72 artistes majeures de ce mouvement né après la révolution sexuelle de 1968 seront réunies ici, entre Cindy Sherman, Martha Wilson, Lynda Benglis, Orlan ou encore Ana Mendieta. Dans le même bâtiment, une exposition personnelle célèbrera également le travail de l’artiste norvégienne-nigériane contemporaine Frida Orupabo, dont les collages décomposent et recomposent le corps des femmes noires pour subvertir et transformer leurs représentations, longtemps réifiées par l’histoire coloniale, les systèmes de domination et le racisme. De Noémie Goudal, photographe française d’une trentaine d’années connue pour ses clichés trompe-l’œil d’environnements fantasmés, à Bettina Grossman, artiste américaine disparue l’an dernier connue pour ses œuvres visuelles, textiles et sculptures réalisées au mythique Chelsea Hotel à New York, où elle a élu résidence pendant des années, jusqu’à la photojournaliste américaine Susan Meiselas et la compositrice Marta Gentilucci, qui proposeront au sein de l’église Saint Blaise une création visuelle et sonore poétique autour du corps humain vieillissant, de nombreuses figures féminines majeures du médium seront à l’affiche d’expositions personnelles ambitieuses.
Si Les Rencontres d’Arles dressent chaque année un riche éventail des approches contemporaines de l’image, elles offrent aussi traditionnellement l’occasion de revenir sur des noms historiques qui ont marqué son histoire. C’est l’une d’entre elles, Lee Miller (1907-1977), que l’on retrouvera à l’affiche d’un exposition à l’espace Van Gogh : celle-ci se concentra sur le chapitre le plus prolifique de la carrière de cette Américaine proche des surréalistes, entre la création de son propre studio en 1932 et la fin de la guerre en 1945, qui montre l’étendue de son talent et sa versatilité – de ses clichés pour la mode et la publicité à ses reportages dans les camps lors de la Seconde Guerre Mondiale. Devenues aujourd’hui culte, la série du photographe américain Mitch Epstein consacrée à l’Inde, où le septuagénaire s’est rendu entre 1978 et 1989, dressera à l’Abbaye de Montmajour un portrait riche et vivace de ce vaste pays à cette époque.
Des projecteurs seront également braqués sur les plus jeunes talents encore rarement connus du grand public, de l’exposition anniversaire des quarante ans de l’École Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles – établissement français de référence pour tout photographe en herbe – à l’exposition de la fondation Louis Roederer, mécène du festival qui présente chaque année depuis 2018 les projets de dix photographes émergents avant d’en distinguer deux par des prix. Déroulée tout l’été jusque’à la fin septembre, la programmation de la manifestation s’étend comme de coutume au-delà des frontières de la ville dans la région et ses nombreux lieux clés. Des expositions de James Barnor à LUMA Arles et de Sam Contis au Carré d’art de Nîmes, en passant celles de Mathieu Pernot au Mucem, de Tom Wood au Centre de la Photographie de Mougins et d’Apichatpong Weerasethakul au Frac Provence-Alpes-Côte-d’Azur, la programmation dans et hors-les-murs offrira à nouveau un vaste panorama culturel dans le sud de la France, nourri par des approches multiples, historiques et et innovantes de l’image.
Les Rencontres d’Arles 2022, du 4 juillet au 25 septembre à Arles et sa région.
Découvrez la programmation complète sur le site du festival.