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Vassili Schneider
Né le 18 septembre 1999, Vassili Schneider avance sans bruit. Pourtant, chaque apparition fend l’écran comme une étincelle dans l’obscur. Issu d’une fratrie à l’ADN artistique, il n’en épouse pas les traces : il les contourne, les réinvente. À la fois brut et raffiné, instinctif et exigeant, il incarne une nouvelle génération du cinéma français — électrique, intuitive, résolument insaisissable.

Un nom, une lignée, une singularité
Schneider : ce patronyme claque, familier des génériques. Pourtant, chez Vassili, nul mimétisme. Dès ses débuts, il impose une densité rare. Voix en velours brut, regard trouble, corps fauve. Vassili Schneider ne joue pas : il hante. Les cinéastes pointus le repèrent vite car ils pressentent une intensité qui dépasse le texte. D’ailleurs, c’est loin des projecteurs que s’esquissent ses premières présences. Cinéma d’auteur : il choisit la tension plutôt que le confort.

Parmi ses premiers rôles marquants, on note Les Démons de Philippe Lesage (2015), où il incarne François, et Diamant noir d’Arthur Harari (2016), où il prête ses traits à Victor Ulmann jeune. Dans La Nouvelle Vie de Paul Sneijder, toujours en 2016, il joue Nicolas Sneijder, dans un rôle bouleversant. Ces choix initiaux témoignent d’une cohérence : une tension intérieure, une vérité nue.
C’est loin des projecteurs que Vassili Schneider façonne ses premiers rôles. Cinéma indépendant, huis clos à l’os, récits écorchés : il préfère la tension au confort. Peu enclin à l’exposition médiatique, il laisse son silence parler. Ce feu intérieur, qui ne flambe jamais gratuitement, le rend d’autant plus magnétique.
Sa performance dans Genèse (2018), à nouveau sous la direction de Philippe Lesage, reste l’une des plus vibrantes. Il y incarne Mikaël, adolescent troublé au bord de la rupture, filmé au plus près de la faille. Dans Notre-Dame brûle (2022), de Jean-Jacques Annaud, il apparaît sous l’uniforme du Caporal Sandro, dévoilant une autre facette, plus sobre, plus contenue.
Ses projets du moment
Dorénavant, son registre s’ouvre. Dans le flamboyant Les Amandiers (2022) de Valeria Bruni Tedeschi, il incarne Victor, jeune comédien pris dans la tourmente de l’école de théâtre de Nanterre. Son rôle dans Le Vourdalak (2023), film gothique d’Adrien Beau, affirme sa capacité à embrasser l’étrangeté. Dans Le Comte de Monte-Cristo (2024), fresque attendue de Matthieu Delaporte et Alexandre de La Patellière, il joue Albert de Morcerf avec une intensité classieuse. Mais c’est La Venue de l’avenir, le nouveau film de Cédric Klapisch qui est un tournant. Il y incarne Lucien, jeune homme projeté dans une société mouvante. Il tournera ensuite Marius dans Les Misérables (2026) sous la direction de Fred Cavayé. D’un classique à l’autre, il dessine sa propre modernité.
Le cinéma français en 2025 : miroir d’une génération mouvante
Dans ce paysage en mutation, où les archétypes s’effondrent, Vassili Schneider incarne une jeunesse vibrante. Son nom revient dans les sélections de festivals, sur les lèvres des critiques esthètes, dans les récits émergents. Un éclat sourd, difficile à cerner, impossible à ignorer. Lors d’un rare entretien, il confiait préférer « les silences qui durent aux dialogues trop pleins ». Tout est là. Sa présence échappe à la parole sursignifiante, elle se situe dans les creux, les arrêts, les ellipses. Il pense son métier comme un artisanat du doute, du trouble, de l’incertitude. Il appartient à cette génération d’acteurs qui ne veulent pas plaire, mais émouvoir autrement. Des comédiens qui absorbent leur époque plutôt que de la caricaturer. Dans chaque geste, chaque regard, se dessine une résistance douce. Il serait tentant de le rattacher à la constellation Schneider — famille d’artistes, de créateurs, de faiseurs d’images. Mais Vassili s’en émancipe. Il partage l’exigence, certes. Mais il préfère les éclipses à la lumière brute. Et si l’avenir du cinéma français s’écrivait là, dans cette fragilité maîtrisée ? Dans ces interstices où l’émotion ne crie pas mais vibre. Dans cette texture où l’image devient matière vivante. Vassili Schneider, lui, est déjà passé maître en cet art du murmure incandescent.