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Jean-Michel Basquiat
Né le 22 décembre 1960 à Brooklyn, Jean-Michel Basquiat ne peignait pas seulement : il posait sur la toile une urgence. Celle d’un jeune homme noir dans une Amérique fracturée, celle d’un poète graphique, fulgurant, fragile. Propulsé en quelques années de la rue aux galeries internationales, il demeure l’icône d’une génération sans filtre, entre fureur créative et lucidité politique.

“Dos Cabezas” (1982) de Jean-Michel Basquiat. Acrylique et pastel sur toile. 152,4 x 152,4 x 2,54 cm. Estate of Jean-Michel Basquiat. Licensed by Artestar, New York/Photo : Robert McKeever
Les débuts de Jean-Michel Basquiat
Dans les rues de Manhattan à la fin des années 70, Basquiat signe “SAMO” (Same Old Shit). Des aphorismes énigmatiques tapissent les murs de SoHo, réveillant une ville engourdie. Rapidement, son écriture plastique s’étend : dessins, collages, peintures… Il passe de l’anonymat à la reconnaissance fulgurante, sans jamais gommer sa colère ou sa vulnérabilité.
Un langage pictural dense et électrique
Ses œuvres fusionnent graffiti, art brut, références anatomiques, mythologie personnelle et critique sociale. Les crânes y côtoient les couronnes, les héros noirs les ruines de l’histoire coloniale. Il écrit, il rature, il empile : chaque toile devient un champ de bataille émotionnel. L’art de Basquiat n’explique pas : il expose, il questionne, il bouscule.
Le passage de l’underground à l’institution

Repéré par le marchand d’art Larry Gagosian, soutenu par Andy Warhol — avec qui il entretiendra une relation artistique ambivalente — Basquiat devient l’un des artistes les plus en vue des années 1980. Mais le succès n’apaise pas ses fantômes. Il reste habité par le sentiment d’être un imposteur dans un monde d’élite blanche, et se débat avec une addiction croissante à l’héroïne.
Une disparition précoce, une postérité intacte
Il meurt d’une overdose le 12 août 1988, à seulement 27 ans. Pourtant, son style ne cesse de vibrer. Ses toiles atteignent des records dans les ventes aux enchères. Ses mots hantent les murs des musées. Il est partout — dans la mode, dans la musique, dans les séries — sans jamais être récupéré.
Un héritage incandescent
En 2025 encore, des expositions internationales lui sont consacrées. Son nom réapparaît dans les collections Dior, dans les paroles de Jay-Z ou les installations urbaines. Parce que Basquiat ne fut pas un artiste du moment, mais du mouvement. Celui qui donne forme au chaos. Celui qui, par l’art, invente une mémoire sauvage du présent.
Jean-Michel Basquiat n’aura pas eu besoin de vieillir pour marquer son époque. Il aura suffi qu’il peigne, qu’il écrive, qu’il crie — et que l’on écoute.