
18
Fendi
Fondée en 1925 par Adele et Edoardo Fendi, la maison italienne éponyme s’est imposée dans le paysage du luxe grâce à son savoir-faire en matière de fourrure et de souliers d’exception.
Fendi : L’opulence romaine en héritage
Dans le grand théâtre de la mode italienne, Fendi incarne, depuis près d’un siècle, une partition aussi somptueuse qu’audacieuse. Fondée en 1925 à Rome par Adele et Edoardo Fendi, la maison débute comme un modeste atelier de maroquinerie et de fourrure. Pourtant, très rapidement, la noblesse des matières, l’exigence du geste et l’élégance romaine imposent Fendi comme l’un des piliers du luxe transalpin. Ainsi, au fil des décennies, la marque devient synonyme d’extravagance maîtrisée, de classicisme revisité et de baroque italien.
Un atelier familial devenu empire du luxe
Tout commence dans le quartier de la Via del Plebiscito. Là, Adele et Edoardo ouvrent une boutique où la précision artisanale règne en maître. Dès les années 1930, les élégantes romaines s’y pressent, séduites par la qualité exceptionnelle des sacs et des manteaux. Toutefois, c’est véritablement grâce à la seconde génération — Paola, Anna, Franca, Carla et Alda — que la maison prend son envol.
En effet, les cinq filles des fondateurs insufflent une énergie nouvelle. Ensemble, elles transforment l’atelier familial en un véritable laboratoire de création. Elles osent, innovent, renversent les codes de la fourrure qu’elles rendent fluide, colorée, urbaine. Par conséquent, Fendi cesse d’être un simple nom sur une enseigne : il devient une signature stylistique à part entière, portée par un subtil équilibre entre tradition et réinvention.
L’entrée magistrale de Karl Lagerfeld

En 1965, les sœurs Fendi font appel à un jeune créateur allemand au talent déjà saisissant : Karl Lagerfeld. Dès lors, une collaboration historique s’ouvre, parmi les plus longues de la mode contemporaine. C’est lui qui conçoit le célèbre logo FF — pour Fun Fur — et qui modernise radicalement l’image de la maison.
Grâce à lui, la fourrure devient matière d’expérimentation : elle se plie, se colore, s’allège. Lagerfeld joue avec les volumes, détourne les textures, ose l’humour dans le luxe. Dès lors, le classicisme devient ludique, l’excellence artisanale s’ouvre à l’audace. Ainsi, Fendi devient un terrain de jeu créatif d’avant-garde, sans jamais renier son prestige.
Maroquinerie et ‘it-bags’ : l’empreinte de Silvia Venturini Fendi

Parallèlement au travail de Lagerfeld, Silvia Venturini Fendi, petite-fille des fondateurs, reprend la direction de la maroquinerie. Dès 1997, elle signe un coup de maître : le sac Baguette. Porté sous le bras, décliné en une infinité de versions — sequins, python, broderies ou denim — il devient l’un des premiers ‘it-bags’ de l’histoire.
Ensuite, viendront les modèles Peekaboo et By The Way, consolidant le rôle central de la maroquinerie dans l’identité de la maison. Grâce à Silvia, Fendi incarne la désirabilité moderne, tout en poursuivant son ancrage dans l’artisanat d’exception.
Le style Fendi : excès mesuré et précision romaine
Fendi, c’est Rome dans tout ce qu’elle a de plus somptueux : dorures, marbres, lumière dorée du soir… Pourtant, la maison ne verse jamais dans l’ostentatoire gratuit. Car elle tempère son goût du drame par une rigueur structurelle, une coupe parfaite, un souci du détail.
Ainsi, entre manteaux en shearling revisités, tailleurs architecturés ou superpositions audacieuses, chaque collection conjugue savoir-faire et sensualité. D’ailleurs, ses campagnes visuelles, souvent cinématographiques, célèbrent une femme italienne fière, assumée, à la fois enracinée et conquérante.
De Rome à Paris
Bien que profondément attachée à Rome, Fendi n’en reste pas moins une marque au rayonnement mondial. Dès les années 1980, elle s’implante à Tokyo, New York, puis Paris. Son esthétique singulière, à la fois baroque et urbaine, séduit les célébrités, les aristocrates et les icônes de la pop culture.
En 2001, la maison intègre le groupe LVMH. Cependant, ce passage à l’échelle ne dilue pas son identité. Silvia Venturini Fendi reste à la barre. Et le lien à Rome demeure sacré — en témoignent les défilés spectaculaires organisés au Colisée ou au Forum Romain.
L’après-Lagerfeld : Kim Jones et la féminité contemporaine
Après le décès de Karl Lagerfeld en 2019, la maison tourne une page. Pour lui succéder à la direction artistique du prêt-à-porter féminin, elle choisit Kim Jones. Connu pour son raffinement chez Dior Homme et Louis Vuitton, Jones injecte une sensualité fluide, une attention aux matières, une touche d’avant-garde.
Tout en respectant l’héritage, il redéfinit la féminité Fendi : plus contemporaine, plus tactile, presque architecturale. Parallèlement, Silvia poursuit le développement de la maroquinerie et du prêt-à-porter masculin, consolidant ainsi la structure bicéphale de la maison.
Fendi aujourd’hui : fidélité et audace
Dans un monde où les marques se ressemblent, Fendi résiste. Elle préserve une voix, une âme, une originalité. À la fois classique et mutante, elle explore les nouvelles technologies, intègre des matières durables, tout en mettant en avant l’artisanat local. De plus, la maison investit dans des projets responsables, alliant luxe et conscience. Elle incarne un esprit libre, pétri d’humour discret, de second degré assumé, de désir d’inattendu.
En mai 2024, Fendi signe son grand retour dans l’univers olfactif en dévoilant une collection inaugurale de sept parfums, chacun directement inspiré des racines romaines et de l’élégance artisanale qui ont façonné l’identité de la maison. Quelques mois plus tard, en octobre 2024, le groupe LVMH annonce le départ de Kim Jones, directeur artistique des lignes femme depuis 2020, marquant la fin d’un chapitre aux silhouettes rigoureusement sensuelles.
Une maison, un souffle, une légende vivante
Fendi ne cherche pas seulement à séduire : elle aspire à marquer. À inscrire ses créations dans la mémoire collective. Elle ose les contrastes, célèbre l’excès sans vulgarité, dessine des silhouettes exigeantes. Toujours fidèle à ses racines — Rome, la famille, l’art de la féminité — elle reste, aujourd’hui encore, l’une des plus puissantes expressions du luxe italien.
Près de cent ans après sa naissance, la maison romaine demeure une entité vivante, vibrante, flamboyante. Elle continue de réinventer l’opulence avec grâce — et d’ériger la beauté en manifeste.