Chanteuse

Angèle

Née le 3 décembre 1995 à Uccle, Angèle dessine une pop introspective et libre. En 2025, A Little More marque un tournant feutré, entre confidence en anglais et mue artistique.

Publié le 19 juin 2025. Modifié le 18 juillet 2025.

De Brol à Nonante-Cinq 

Angèle, étoile discrète de la pop francophone

D’abord révélée sur YouTube, Angèle s’est rapidement imposée comme une étoile montante de la pop francophone. Son visage juvénile, son humour piquant et ses mélodies entêtantes ont séduit un large public, aussi bien en Belgique qu’en France. Toutefois, derrière cette légèreté apparente, se dessine une voix singulière, plus dense qu’il n’y paraît. Dès ses premières vidéos, souvent tournées dans sa chambre, la jeune artiste impose un ton. Elle joue, mais elle observe. Elle amuse, tout en pointant du doigt les absurdités du réel.

Ainsi, lorsque paraît Brol en 2018, son premier album, le phénomène se confirme. Sous une production électro-pop lumineuse, Angèle livre un journal intime maquillé en sucrerie sonore. Pourtant, il suffit d’écouter attentivement pour saisir l’acidité de ses textes. Elle y aborde la solitude urbaine, le sexisme ordinaire, la violence des réseaux sociaux ou les injonctions faites aux femmes. Le tout, sans militantisme frontal. Mais avec une ironie subtile, un recul presque désarmant.

En effet, plutôt que de crier, elle suggère. Plutôt que d’affirmer, elle esquisse. Cette posture artistique, bien qu’inhabituelle dans le paysage de la pop mainstream, fait mouche. Car elle touche une génération en quête de récits nuancés, capables de mêler la légèreté au poids du monde. Grâce à cela, elle s’inscrit, dès ses débuts, dans une chanson d’auteur 2.0, entre confidence murmurée et critique sociale masquée.

De plus, sa façon de raconter l’intime sans impudeur crée un effet de miroir. Angèle parle de ses doutes, de ses colères et de ses contradictions, mais toujours avec pudeur. Elle ne cherche pas l’effet. Elle vise juste. C’est cette précision émotionnelle, alliée à une esthétique pop accrocheuse, qui fait d’elle une artiste à part. Ni diva, ni icône militante, elle incarne un entre-deux rare : celui d’une chanteuse populaire qui pense, d’une autrice qui rit, et surtout, d’une jeune femme qui, sans jamais hausser le ton, fait entendre une voix claire dans le vacarme ambiant.

Une signature musicale en clair-obscur

Avec Nonante-Cinq, paru en 2021, Angèle affine son identité sonore. Tout en restant fidèle à son univers, elle creuse une voie plus nuancée. D’un côté, des morceaux lumineux comme Libre, véritables hymnes générationnels. De l’autre, des ballades plus sombres comme Pensées positives, où elle explore ses angoisses.

Ainsi, elle navigue entre deux registres : l’évidence pop et le murmure introspectif. Grâce à cette ambivalence, elle touche un large public sans jamais perdre sa singularité. Plus encore, elle revendique une forme de vulnérabilité assumée. Une posture rare, dans une industrie qui valorise souvent l’ultra-confiance ou l’excès.

Une présence médiatique en retrait

Contrairement à nombre d’artistes contemporains, Angèle choisit le retrait plutôt que la surexposition. Elle reste présente, mais jamais omniprésente. Lorsqu’elle s’exprime, c’est avec cette sobriété qui la caractérise. Ses interviews sont rares. Ses mots, pesés. Elle privilégie les silences aux formules toutes faites.

Cette discrétion n’est pas une stratégie. Elle incarne un mode d’être. De même, sur les réseaux sociaux, elle entretient une proximité mesurée. Elle partage, certes, mais sans jamais se livrer entièrement. Cette pudeur volontaire renforce son mystère et, paradoxalement, sa puissance.

Un nouveau titre comme un signal discret

Le 15 avril 2025, Angèle surprend son public avec un nouveau morceau, court et inattendu : A Little More. À peine 1 minute 23, un souffle, une esquisse. Pourtant, tout y est. Une mélodie diaphane. Une voix presque chuchotée. Une alternance fluide entre l’anglais et le français, qui intrigue.

Produit par Tristan Salvati, le titre abandonne les structures pop classiques. Moins accrocheur, mais plus atmosphérique, il évoque une transition. La chanson ne cherche pas à séduire d’emblée. Elle installe un climat. Elle chuchote quelque chose d’intime, sans l’expliquer. En effet, A Little More s’écoute comme un murmure du futur.

Très vite, les interprétations se multiplient. Certains y voient une simple parenthèse. D’autres, au contraire, pressentent un nouveau tournant artistique. La vérité se niche peut-être entre les deux. Ce titre, bien que modeste, annonce un désir de renouvellement, voire d’internationalisation.

Vers un nouvel horizon musical ?

Angèle a toujours brouillé les pistes. Même lorsqu’elle cartonne, elle évite les recettes toutes faites. Ainsi, après le succès de ses deux premiers albums, elle aurait pu capitaliser sur une formule gagnante. Mais elle choisit l’exploration. Elle tente, glisse, désaxe. A Little More s’inscrit dans cette dynamique : celle d’un mouvement discret mais résolu.

Par ailleurs, l’alternance entre français et anglais traduit une volonté nouvelle. Elle ne renie rien de ses racines francophones. Toutefois, elle semble vouloir s’adresser au monde sans perdre sa voix propre. C’est là que réside sa force : Angèle n’imite pas, elle infuse.

Sa musique demeure subtile, bien que plus ouverte. Elle propose une pop poreuse, influencée autant par la chanson que par l’électro ou la folk. Ce mélange, qu’elle maîtrise de mieux en mieux, constitue sa singularité. Elle ne suit pas la tendance. Elle l’observe, s’en inspire, mais reste sur sa propre ligne.

Et maintenant ?

Avec A Little More, Angèle semble ouvrir une nouvelle séquence. Rien d’officiel encore. Pas d’annonce d’album. Pas de grande campagne promo. Juste une chanson. Presque une respiration. Pourtant, elle dit beaucoup. Elle dit qu’un cycle s’achève. Qu’un autre s’esquisse.

De nombreuses questions émergent. Prépare-t-elle un disque entièrement en anglais ? Va-t-elle collaborer avec des artistes internationaux ? S’oriente-t-elle vers des formats plus courts, plus sensoriels ? Pour l’instant, elle ne dit rien. Et c’est peut-être là sa plus grande force : ne jamais surcommuniquer. Laisser la musique parler.

Car Angèle continue de créer en douceur. Elle évolue sans bruit. Elle grandit sans effacer. Et cela, dans l’industrie musicale actuelle, relève presque de l’acte politique. À l’heure du buzz permanent, elle choisit la précision. Le retrait. La finesse.