Jean Prouvé, Robert Mallet-Stevens, Charlotte Perriand… Les maîtres du modernisme débarquent à Pompidou
Fondée en 1929, l'U.A.M, Union des artistes modernes, a révolutionné les arts en signant l'avènement du modernisme. Jusqu’au 27 août, le musée national d’art moderne du Centre Pompidou dresse une rétrospective de cette fabuleuse histoire, de ses prémices au début du XXe siècle jusqu’à la fin des années 50, dans l'exposition “U.A.M, une aventure moderne”.
Par Henri Delebarre.
Le Centre Pompidou vient d’inaugurer l’exposition U.A.M., une aventure moderne, qui jusqu’au 27 août revient sur les origines de l'art moderne, à travers l'histoire d'un mouvement, l’Union des artistes modernes, de sa genèse à sa dislocation en 1958. Au cœur de ce mouvement fondé le 15 mai 1929, une même vision de l'art novatrice partagée par ses membres : abolir la hiérarchisation entre les pratiques artistiques au profit d’un art total.
Cet ample mouvement, incontournable de l’histoire de l’art du XXe siècle, a fédéré les plus grands artistes de l’époque s’exprimant par des médias divers et variés : architecture, peinture, sculpture, céramique, création de mobilier, d’affiches, et même, de reliures. Le Corbusier, Robert Mallet-Stevens, Georges-Henri Pingusson, Pierre Chareau, Sonia et Robert Delaunay, Fernand Léger, Charlotte Perriand, Pierre Jeanneret, André Lurçat, Francis Jourdain, Jean Prouvé… tous ont adhéré aux principes de l’U.A.M, développés dans le sillage d’autres associations artistiques européennes telles que les Arts & Crafts, le Bauhaus ou encore le mouvement De Stijl.
Chaque année, l’Union des artistes modernes prend la parole à travers une exposition collective. Ses membres exposent, tous ensemble, leurs œuvres, collectives ou personnelles. Mais en 1934, pour défendre ses convictions, et répondre à ses détracteurs, ce sont bien les mots que choisit l’U.A.M en publiant un manifeste intitulé Pour l’art moderne, cadre de la vie contemporaine. Car, la vision de ce concentré d’avant-gardistes débordait largement des frontières traditionnelle de l'art : ils étendaient leur vision à un cadre beaucoup plus large et souhaitaient également définir l’habitat moderne, à grand renfort de matériaux industriels.
Pierre Chareau imagine ainsi sa Maison de verre, dont les murs sont bâtis avec la brique de verre “Nevada”. Pour sa table Compas ou ses chaises, Jean Prouvé, lui, fait la part belle à l’acier. Quant à Robert Mallet-Stevens, auteur des fameuses villas “paquebots” de Paul Poiret ou Charles de Noailles, il emploie le béton armé. Ces trois matériaux seront largement représentés lors de l’Exposition universelle de 1937, dans le pavillon de l’U.A.M, qui marque l'apogée du mouvement moderniste. Conçu par George-Henri Pingusson, Frantz-Philippe Jourdain ou André Louis, ce pavillon vise la pureté des formes : les lignes sont droites et les formes, géométriques. En effet, restée largement ignorée des pouvoirs publics jusqu’à l’arrivée du Front Populaire en 1936, l’U.A.M cherche alors à diffuser l’art massivement avec pour seul maître mot “la modernité” : l’art et l’industrie doivent désormais travailler de concert, sans pour autant délaisser les traditionnels savoir-faire manuels.
Des années 20 à l’après-Seconde guerre mondiale, l’U.A.M. accompagne les bouleversements politiques et sociétaux européens : l'arrivée de la crise de 1929 au début des années 30 en Europe, la montée des totalitarismes en Allemagne, en Italie ou en U.R.S.S., et l'éclatement de la Seconde guerre mondiale. À l’heure de la reconstruction, l’U.A.M pense pouvoir jouer un grand rôle, mais l’association périclite, victime d'une vision qui reste utopique et d'une audience qui demeure élitiste. Au Centre Pompidou, l’exposition témoigne cependant de la force de cette grande épopée vers la modernité.