29 mar 2017

Qui est Manuel Facchini, directeur artistique de Byblos?

Numéro a rencontré Manuel Facchini, à la tête du label Byblos depuis 2006 et créateur du label éponyme. Il nous en dit plus sur ses deux univers, entre créations architecturales du label italien Byblos et inspiration gothique pour sa collection personnelle. 

Numéro : Quand avez-vous décidé de vous lancer dans la mode ?

Manuel Facchini : C’est venu assez naturellement, une passion qui remonte surement à l’enfance. Quand j’étais petit je m’amusais à dessiner sur les murs blancs de chez moi. J’ai toujours eu ce double intérêt pour la mode et l’art, l’idée de création me fascinait. Mais j’ai mis du temps avant de me lancer dans le grand bain, j’étais avant tout intéréssée par le travail des créateurs, par leurs oeuvres qui me frappaient émotionnellement.

 

Vous rappelez-vous du moment précis où vous avez réalisé que vous étiez destinés à faire de la mode ? 

Lorsque j’ai été accepté à la Central Saint Martins, j’ai su que je ferai ce métier de ma vie. Nous avons abordé la création de mode sous toutes ses formes, une collection pouvait partir d’un détail aperçu dans une exposition, une phrase, un poème qui faisait marcher notre imagination, la couleur d’une feuille tombée d’un arbre. Il y avait quelque chose de vraiment introspectif dans le processus de création, nous devions nous révéler à travers notre carnet de croquis, une véritable bible qui ne nous quittait jamais. L’énergie et la créativité des étudiants étaient également très inspirantes, c’était fascinant de voir toutes les visions différentes parties d’une même point. Nous avions un tuteur pour chaque projet qui nous poussait à ne jamais réfléchir en terme d’inspiration, ce qui est le facteur clef à la St Martins. Il s’agissait d’être innovant bien plus que simplement inspiré. 

 

“Quand j’étais petit je m’amusais à dessiner sur les murs blancs de chez moi. ​J’ai toujours eu ce double intérêt pour la mode et l’art.”

Quelle vision de la marque aviez-vous lorsque vous avez repris la maison ? Et comment décririez-vous l’ADN de la marque aujourd’hui ?

Lorsque je suis arrivé pour reprendre la direction artistique des défilés Byblos, je voulais rafraîchir le label en réutilisant ce qui avait fait sa force dans les années 90 : l’utilisation de la couleur, le travail de la laine,  les patchworks. Mais tout en gardant un point de vue novateur à travers notamment les influences tirées de l’art contemporain. Je voulais véhiculer ce sentiment d’énergie, de renouveau et de pétillement. Mais l’inspiration pouvait venir de partout, de ce que je voyais, ce que je lisais, de ce que je respirais ! C’est pourquoi la collection est si fraîche, colorée, jeune, énergique, tout en restant innovante : fun-chic !

 

 

 

“Je voulais rafraîchir le label en réutilisant ce qui avait fait sa force dans les années 90 : l’utilisation de la couleur, le travail de la laine, les patchworks.”

 

 

Vous fusionnez l’architecture, l’art, le rock, le sport dans vos créations. Comment ses domaines se manifestent-ils dans votre vie de tous les jours ?

Oui ces domaines représentent ma principale source d’inspiration. J’essaie toujours de comprendre ce qui se cache derrière ces oeuvres, quelle fut l’étincelle d’inspiration, le point de départ qui a engendré ces créations incroyables. En terme d’architecture, j’adore les créations 3D innovantes de Zaha Hadid, elles semblent sorties tout droit du futur ou d’une autre planète. Je suis fascinée par le travail à la fois majestueux et géométrique de l’architecte Santiago Calatrava, les formes et les volumes de ses créations sont tellement impactants, combinés à un design si léger qu’on dirait qu’elles flottent dans les airs. Dans les artistes contemporains, j’aime beaucoup Damien Hirst, Jeff Koons et Anish Kapoor : tous me laissent sans voix pour une raison précise. Ce que j’appelle l’harmonie des contrastes, le contraste entre ce qu’est vraiment l’œuvre et ce qu’elle représente, entre la substance même de la création et sa perception. En terme de sport et d’athlètes, j’adore Roger Federer, Leo Messi et Usain Bolt, ceux sont des personnages très inspirants. De vrais champions qui ont su rester simples et humbles. C’est quelque chose que j’admire !

 

 

“J'adore les créations 3D innovantes de Zaha Hadid, les formes et les volumes de l'architecte Santiago Calatrava et les oeuvres de Damien Hirst.”

 

 

Pouvez-vous nous en dire plus sur la collection printemps-été 2017 de Byblos ? Quelle en est le fil rouge ?

J’adore les jeux de contrastes donc pour cette collection je suis parti de deux concepts. Dans un premier temps,  j’ai tiré mon inspiration du travail de Peter Gentenaar, un artiste qui crée de sublimes fleurs asymétriques en papier, des créations poétiques qui ressembleraient presque à des nuages qu’il suspend au plafond. Face à ces œuvres qui apportaient ce côté de légèreté, j’ai voulu revenir à une idée de pesanteur en travaillant sur le concept d’attaches, de ficelles et de harnais. Imaginez une créature tout droit descendue de l’espace, ayant atterri sur terre avec ce parachute nuage et ces harnais colorés. J’ai complété ces silhouettes avec des broderies inspirées du design Ottoman et des ficelles à imprimé jacquard. 

Pouvez-vous nous en dire plus sur l’œuvre “the Centennial chromagraph”,  grande inspiration pour votre collection Manuel Facchini “Underwater couture” ?

Cette création est une représentation à taille réelle de l’histoire de l’Ecole d’architecture du Minnesota. Ce qui a frappé mon imagination et piqué ma curiosité c’est cette utilisation des données liées au centenaire de l’école, traduites dans l’espace à travers un design précis. Cela donne un véritable squelette high-tech conçu en 3D. J’ai immédiatement fais le lien avec l’ADN de ma marque, marqué par l’esthétique gothique mais dont j’ai fais évolué le côté graphique, en expérimentant l’aspect 3D des pièces.

 

Comment avez-vous traduit cette idée d’environnement aquatique à travers vos silhouettes ?

J’ai nourri une fascination pour les poissons combattant et en particulier pour leurs nageoires : délicates, douces, élégantes et dont la voilure est parfois striée comme des épines. J’ai commencé par créer des motifs floraux avec cette inspiration puis j’ai utilisé du crochet, de l’imprimé jacquard, de l’organza, légèrement découpé au lazer pour recréer ces formes de nageoire. Sur les robes, les différentes couches d’organza découpées au lazer sont la parfaite représentation de ces délicates nageoires. Ainsi cette saison, la femme Manuel Facchini prend des airs d'élégante créature aquatique, guidée par une attitude forte et assurée. 

 

Byblos – Collection Printemps-Été 2017 / Manuel Facchini – Collection Printemps-Été 2017

 

À LIRE AUSSI : À quoi ressemble la troisième collection d'Alexander Wang pour Adidas ?

 

SÉLECTION DE LA RÉDACTION : Maxime Simoëns : nouveau directeur artistique d’Azzaro