Pourquoi faut-il aller voir l’exposition “Here we are” de Burberry
Exposition-hommage, état des lieux photographique, l’exposition “Here we are" curatée par Christopher Bailey, Alasdair McLellan et Lucy Kumara Moore, dresse le portrait de la société britannique moderne.
Par Léa Zetlaoui.
Rarement un label de mode n’aura autant incarné son pays que Burberry. Alors que son directeur général de la création, Christopher Bailey a annoncé son départ pour 2018, avec l’exposition “Here we are”, il rend une dernière fois hommage à son inspiration la plus marquante : l’Angleterre. Articulée autour de photographes issus de différentes décennies, “Here we are” s'apparente à un état des lieux de la société britannique contemporaine. Présentée, en septembre dernier, comme scénographie du défilé Burberry, “Here we are” et la collection qui l’accompagne se sont finalement imposées comme une exposition itinérante qui, après Londres et Shanghai, s’arrête quelques semaines à Paris, dans le Marais, dans les anciens locaux du quotidien Libération.
Pour organiser ce manifeste visuel du British way of life, Christopher Bailey a fait appel à deux personnalités importantes de la scène artistique britannique. Ami et collaborateur de longue date de Christopher Bailey, le photographe Alasdair McLellan s'illustre par des images teintées d’un réalisme cru et poétique, régulièrement en couverture du magazine i-D ou dans les éditions française et britannique du Vogue. Seconde personnalité associée au projet, la commissaire Lucy Kumara Moore dirige quant à elle la librairie de mode et de photographie Claire de Rouen Books, à Londres, et collabore également comme journaliste aux magazines Pop et Marfa Journal.
L’exposition présentée à Paris réunit des clichés de grands photographes anglais. On trouve parmi eux Martin Parr, Janette Beckman, Jane Bown, Brian Griffin, Dafydd Jones, Karen Knorr, Charlie Phillips, Andy Sewell et Jo Spence. Sont aussi représentés des photographes qui n'ont encore jamais été exposés en France tels Shirley Baker, Ken Russell, Colin Jones et Daniel Meadows. Si les vêtements du défilé Burberry se voient mis à l'honneur en ouverture et en clôture de l’exposition, les 90 photographies, réparties en 10 thèmes, dressent de leur côté un portrait exhaustif de la société anglaise.
La thématique “Avenue, Belfast, Ceremony” parcourt les quatre nations du Royaume Uni – Angleterre, Irlande du Nord, Écosse et Pays de Galles – inspirant toute l’œuvre d’Alasdair McLellan, des gardes à cheval en uniforme aux adolescents des banlieues du pays de Galles ou de Belfast. “Pomp” met en scène l’étiquette britannique, portraiturant le versant plus traditionnel du pays. Sa facette arty et excentrique est évoquée, elle, dans le film documentaire “A House in Baywater” qui évoque aussi les années 60 et le Swinging London.
L'exposition fait aussi la part belle aux Anglais eux-mêmes. “Free photographic omnibus” expose les images de Daniel Meadows qui, pendant deux ans (1973 et 1974), voyagea à travers le pays et captura le portrait de quelque 1000 personnes. Dans l'espace “Romance”, on assiste, cette fois, à des manifestations d’amour qui défient les préjugés raciaux des années 60/70. L'esprit fêtard et les after hours arrosés de bière sont aussi de la partie dans le thème “Reverly”, qui dépeint la fête, la danse et la folie d’un pays parfois contraint par la bienséance.
Les clichés concernant la météo capricieuse (“Lovely Day for it”) et des jardin anglais (“The Garden as a self-portrait”) terminent le tableau. Moins attendu, “September 16th” nous dépeint l’Angleterre sous l’œil du créateur russe Gosha Rubchinskiy qui signe une collaboration avec Burberry.
Dans ce remarquable patchwork d'images, Christopher Bailey nous brosse le portrait plein de charme de la société qui l’a inspiré tout au long de ses années chez Burberry. Une belle façon de croiser photographie et mode, deux disciplines artistiques, qui bien que très différentes, restent intrinsèquement liées.