Mugler par Casey Cadwallader en 5 collections devenues cultes

Casey Cadwallader quitte Mugler

Ce mardi 25 mars 2025 sonne la fin d’une époque pour Mugler. Après sept ans d’une idylle sans nuage, la maison et son directeur créatif, l’Américain Casey Cadwallader, se séparent. Une annonce plutôt attendue, qui intervient à une époque de grand remaniement pour les marques de luxe. Comme en témoigne cet étrange mercato de directeurs artistiques qui agite le milieu depuis quelques mois.

Et alors que Mugler vient juste d’annoncer son remplançant – Miguel Castro Freitas –, Numéro se remémore l’ère Casey Cadwallader à travers cinq collections.

Printemps-été 2020 : l’affirmation du style Casey Cadwallader

En septembre 2019, cela fait bientôt deux ans que Casey Cadwallader est arrivé à la direction artistique de Mugler. Présenté au Palais de Tokyo, lors de la Fashion Week de Paris, son défilé printemps-été 2020 le prouve : le créateur américain a définitivement trouvé sa place, avec une collection qui fusionne habilement les grands principes de la maison française et son propre héritage. On le constate dès le premier look, très fort, arboré par sa muse Bella Hadid : un crop blazer porté sur un body et des collants, où la structure de la veste aux épaules larges contraste élégamment avec le mesh qui galbe le ventre et les jambes.

Habitué du vestiaire sportswear et des matériaux techniques, le créateur introduit  notamment les legging cyclistes rembourrés, joue avec des matériaux fluides et satinés, froncés, et les lignes tracées par les coutures et les baleines des corsets, dans une optique, là aussi très body conscious. Par son casting inclusif, qui réunit aussi bien les mannequins Raya Martigny et Dustin Muchuvitz que la performeuse Kembra Pfahler, Casey Cadwallader s’inscrit également dans la lignée du fondateur de la maison et célèbre une grande diversité de corps. Ce défilé dévoile également sa première collaboration avec la créatrice de bijoux Lorette Colé Duprat, qui signera les boucles d’oreille, bracelets, bagues et colliers des saisons suivantes.

Printemps-été 2021 : un premier film renversant avec Hunter Schafer et Dominique Jackson

Fashion Weeks digitales, campagnes et défilés virtuels… En 2020, pandémie oblige, l’industrie de la mode est contrainte s’adapter aux circonstances. Durant toute cette première année, Mugler reste plutôt discret, jusqu’au 31 mars 2021, où la maison dévoile sa collection printemps-été 2021 dans une vidéo détonante. Première nouveauté : plutôt qu’une présentation avec un an d’avance sur la saison, comme l’exige la coutume, la collection correspond à la saison en cours et est immédiatement disponible à l’achat, embrassant le concept de see now, buy now.

Deuxième nouveauté : le défilé, filmé et monté par le studio Torso, offre un dynamisme rafraichissant, rarement constaté dans les présentations en ligne de l’époque. Sur le sobre et sombre podium, les mannequins oscillent entre marche avant et marche arrière, ralenti et accéléré, tournoient sur elles-mêmes, s’envolent dans les airs voire sont éclaboussées, contrecarrant la monotonie habituelle.

Sur une bande sonore extrêmement bien choisie, Casey Cadwallader propose des pièces d’une sensualité haut de gamme. Comme des bodys couverts de cristaux colorés appliqués telles des secondes peaux et des jerseys qui épousent les corps. Le tulle de nylon ultra résistant, que le créateur qualifie de “pare-balles”, permet de jouer sur les vides et les pleins, et continue d’affirmer les combinaisons et bodys Mugler comme véritables best-sellers – on les verra sur Cardi B, Doja Cat, Yseult, Dua Lipa ou encore Miley Cyrus. Au casting de cette vidéo remarquable, on retiendra notamment les passages des deux actrices transgenres Dominique Jackson, icône de la scène ballroom et star de la série Pose, et Hunter Schafer, révélée par la série Euphoria, qui deviendra l’égérie du parfum Angel Elixir de Mugler en 2023.

Printemps-été 2022 : Megan Thee Stallion et Chloë Sevigny dans une production hollywoodienne

Fort du succès des vidéos de ses deux précédentes collections pour Mugler, Casey Cadwallader vise encore plus loin en proposant pour le printemps-été 2022 un film digne d’une production hollywoodienne. Qui de mieux pour incarner cette incursion dans le Los Angeles des stars que la rappeuse la plus en vogue du moment : Megan Thee Stallion. En ouverture, cette dernière apparaît dans un ensemble qui fusionne deux éléments signatures du créateur américain : le denim et la combinaison ajourée grâce à l’intégration du tulle transparent.

Très vite, la vidéo nous emmène sur des studios à Hollywood où l’on croise un casting cinq étoiles : l’actrice Chloë Sevigny, la fille de Madonna Lourdes Leon et la chanteuse Eartheater, et bien sûr, Bella Hadid. Porté par une chorégraphie qui deviendra virale sur TikTok, le film nous emmène d’un décor à l’autre, des trappes dans les bouches d’égoût au capot d’une limousine, où les mannequins Shalom Harlow et Amber Valletta échangent un baiser torride au clair de lune.

Côté vêtements, le créateur explore encore technique et sensualité : les vestes de costume s’affinent jusqu’à devenir des lanières lacées autour du buste, les tissus fluides en imprimés dégradés des robes s’enroulent autour de bijoux en plexiglas autour du cou – une référence à la collection haute couture printemps-été 1998 –, le rouge vif triomphe, la fameuse étoile du parfum Angel est évoquée par la forme qui se découpe autour de la poitrine sur une robe… Le film se clôt avec un hommage à Manfred Thierry Mugler, disparu quelques mois auparavant : des performances de la danseuse de ballet Maria Kochetkova et la danseuse de voguing Barbie Swaee, vêtues d’une robe d’archive du couturier. Deux générations, deux styles, qui permettent à Casey Cadwallader de rappeler toute la contemporanéité de son prédécesseur.

Automne-hiver 2022-2023 : le retour remarqué de Mugler sur les podiums parisiens

Après les tours de force de ses films, le retour de Mugler sur les podiums parisiens se devait d’être à la hauteur des exigences. C’est donc dans le hangar de la Grande Halle de La Villette que Casey Cadwallader donne rendez-vous aux invités pour présenter sa collection automne-hiver 2022-2023. Ici, le jeu entre le réel et le virtuel se déroule sous les yeux des spectateurs : au centre de la salle, on aperçoit un grand écran vertical qui débouche sur des escaliers blancs, tandis que deux rails travelling ont été installés parallèlement au public. Grâce aux caméras qui s’y déplacent, tout ce qui se passera sur le podium sera retranscrit en direct sur l’écran.

Le défilé n’a rien du défilé classique. D’abord la chanteuse Arca qui vole le sac d’une invitée et se déplace sur un plateau travelling. Puis l’animatrice Ziwe qui tend le micro à la star de téléréalité Lisa Rinna. Tandis que Dominique Jackson descend les escaliers avec une démarche robotique.Si Casey Cadwallader a déjà démontré son talent à jouer entre structure et sensualité, il l’accentue encore en proposant à la fois des pièces offrant une large carrure – doudounes XXL, parkas oversize – et des bodys et robes moulantes ornés d’empiècements en dentelle. Très présent dans cette collection, le cuir s’y invite dans de nombreux vêtements, qui recouvrent mais aussi révèlent les jambes par de savantes découpes.

Printemps-été 2024 : plongée sous-marine et ventilateurs

Casey Cadwallader partage la fascination de Manfred Thierry Mugler pour le monde aquatique et sa faune, réelle ou fantastique. Désireux de retranscrire la grâce de ces créatures flottant sous l’eau, à l’aide de leurs nageoires, tentacules et antennes, le designer américain se creuse les méninges. Une idée lui vient alors à l’esprit pour son défilé printemps-été 2024. Ainsi, va-t-il suspendre tout le long de la salle de grands ventilateurs noirs qui souffleront en continu sur les mannequins. Ils feront voler les ensembles et les pans de mousseline noués dans leurs cheveux, longs comme des traînes royales.

Entre les nombreuses robes drapées asymétriques, les imposants blazers et pantalons intégralement en franges, ou encore les centaines de longues lamelles en plastique transparentes qui jaillissent de combinaisons et robes moulantes, la nouvelle collection du créateur fait la part belle au mouvement. Avec toujours son talent pour géométriser et structurer les corps, Cadwallader présente également une série de bustiers sculptés en plexiglas. Ces derniers rappellent les fameuses femmes-robots de Mugler, ainsi que des mini-jupes rembourrés pour appuyer les hanches, partie du corps favorite du créateur. Côté casting, l’apparition de la riche héritière Paris Hilton surprend et déclenche l’hystérie du public. Après elle, Amber Valletta et Helena Christensen font un passage également très applaudi, sans oublier l’actrice Angela Bassett.