Qui est Bampara Kouyate, champion du monde de boxe thaï et mannequin ?
Mannequin et boxeur, Bampara Kouyate dit Bambi vient d’être sacré champion du monde de boxe thaïlandaise. Il nous explique comment il parvient à cultiver le style sur tous les fronts.
Bampara Kouyate, un champion de muay thai également mannequin
Les Jeux olympiques de Paris se profilent, et dans le monde entier, les fans de boxe thaïlandaise, soit muay thai en version originale, ont longtemps cru qu’ils verraient les débuts olympiques de leur sport. La reconnaissance officielle de la discipline et de la
Fédération Internationale des Associations de Muay thai (IFMA) par le comité olympique, à la veille des Jeux de Tokyo, laissait la porte ouverte à des débuts officiels à Paris. Finalement, il faudra attendre encore un peu.
Dommage pour les sportifs français, qui depuis l’introduction de la discipline dans l’Hexagone, dans les années 70, s’y sont illustrés avec brio, parvenant parfois même à l’emporter en Thaïlande sur des champions nationaux.
En remportant la ceinture de champion du monde WMC des 72,5kgs, Bampara Kouyate, dit Bambi, vient d’ajouter son nom à cette illustre lignée. A 29 ans, le jeune homme d’Issy-les Moulineaux conquérait son titre avec panache, devant son public, le 25 mai dernier, vainqueur aux points.
Resté fidèle à sa ville et à son club de cœur, le Biga Muay Thai Club fondé par Tidiani Biga, le boxeur cultive un style d’une élégance fabuleuse, avec des esquives vives, des high kicks impressionnants, une aisance dans les déplacements, une excellente lecture de la tactique de son adversaire et une grande technicité dans ses coups.
Esthète, donc… Le mot résonne pour lui comme un mantra, un objectif vécu sur tous les terrains, depuis le ring jusqu’aux podiums des défilés des plus grands créateurs qu’il foule régulièrement en tant que mannequin.
Rayonnant, charimastique et toujours humble malgré ses succès, Bambi a notamment posé devant l’objectif de Jean-Baptiste Mondino, pour une série mode de Numéro Homme 40. Séduit par son talent et sa personnalité, le photographe et réalisateur qui a immortalisé, dans ses images iconiques, les plus grandes stars, a même réalisé de très beaux portraits de lui, que nous publions ici.
Rencontre avec Bampara Kouyate
Numéro : On entend beaucoup parler du MMA, un sport de combat né dans les années 90 qui connaît un engouement massif en France, et peu de la boxe thaïlandaise, un art martial ancestral, présent en France depuis la fin des années 70… Comment ressentez-vous cette différence de popularité ?
Bampara Kouyate : Depuis que le MMA a été autorisé en France il y a seulement quatre ans, il connaît un véritable raz-de-marée en effet. Nous avons un grand champion français de la discipline, Ciryl Gane, ce qui justifie l’enthousiasme. Je suis très content pour lui, et pour le MMA, mais j’aimerais aussi que le muay thai soit reconnu à sa juste valeur par les médias notamment.
Vous êtes boxeur professionnel mais aussi mannequin, vous avez défilé pour Louis Vuitton, Versace et les plus grands… Comment conciliez-vous ces deux métiers qui, à première vue, semblent ne pas pouvoir cohabiter ?
Je trouve le temps, j’organise ma vie du mieux que je peux. Quand je prépare un combat, j’évite les voyages pour optimiser mes entraînements et être là en présentiel avec mon coach. Lorsque c’est plus calme, je peux me permettre de voyager. Je n’hésite pas à signifier aux agences qui me représentent en tant que mannequin que je ne peux pas travailler pendant quelque temps pour me consacrer à mes entraînements.
« Je suis toujours à la recherche du geste parfait. Je veux représenter le muay thai de façon élégante et artistique sur le ring. » Bampara Kouyate
Le fait d’être mannequin a-t-il une incidence sur votre vision de votre sport ?
Sur ma vision, oui, mais pas sur ma boxe en elle-même. On pourrait croire a priori que j’aurais tendance à me protéger davantage, notamment pour ne pas abîmer mon visage, mais ce n’est pas le cas. Car plus on pense à la blessure, plus elle arrive. Donc j’essaie vraiment d’être détaché de tout cela lorsque je boxe. Par contre, la vision que j’ai de ce sport, au quotidien, est proprement artistique. Depuis le début, lorsque nous nous sommes rencontrés vous et moi [Bambi a fait partie de la performance No Sweat Last Night de Rocca Dell, au Palais de Tokyo, en 2019], nous avions tous les deux ce point commun de voir la boxe comme un art, et la mode elle aussi comme un art. Jean-Baptiste Mondino a parfaitement retranscrit cette vision dans les très beaux portraits qu’il a faits de moi.
Est-ce important pour vous d’avoir une belle gestuelle, d’avoir une belle boxe ?
C’est très important pour moi. Je suis toujours à la recherche du geste parfait. Je veux représenter le muay thai de façon élégante et artistique sur le ring. La lecture qui en fait un sport violent est superficielle, j’essaie de montrer à quel point c’est une discipline très belle d’un point de vue visuel, qui possède véritablement une esthétique.
Racontez-moi avec vos mots le combat qui vous a sacré champion du monde.
Mon adversaire était le Polonais Jakub Rajewski [médaille d’or aux Championnats du Monde IFMA 2022, médaillé de bronze Europe IFMA 2023, plusieurs fois Champion de Pologne professionnel et meilleur boxeur actuellement dans son pays]. C’est un adversaire dur au mal, qui avançait, qui aimait travailler avec sa boxe anglaise. La stratégie mise au point avec mon coach était de circuler, de casser ses appuis, ce que nous avons réussi à faire. Et ça s’est bien passé. Au niveau du pointage, nous étions devant. Le combat n’était pas facile mais nous avons réussi, et l’ambiance au Palais des sports Robert Charpentier d’Issy-les- Moulineaux était exceptionnelle.
A l’UFC [Ultimate Fighting Championship, principale organisation de MMA], le président Dana White encourage une culture du KO à tout prix, cherchant le maximum de spectacle. Qu’en pensez-vous ?
A priori, nous sommes en quelque sorte, pour le grand public, des gladiateurs des temps modernes. Certaines personnes veulent voir de la violence, du sang, des KO. C’est dans l’espoir d’assister à cela qu’ils achètent une place et qu’ils se déplacent pour voir un combat. Mais il ne faut pas que les boxeurs et les athlètes entrent dans cette configuration en boxant pour le public. Le but est de gagner, mais pas de gagner par KO. Ce n’est pas une bonne chose de penser autant au KO, de chercher le coup dur en oubliant parfois la technique. Cela nuit à la boxe et aux boxeurs.
Un boxeur également passionné par la mode
Etant mannequin et boxeur, n’avez-vous jamais souhaité créer une marque de vêtements autour du muay thai ?
C’est quelque chose que j’ai en tête depuis un moment parce que j’aime énormément les vêtements, c’est vraiment une passion. J’attendais juste d’avoir la bonne idée, le bon entourage pour pouvoir me lancer. Je pense que ce projet va prendre forme entre cette année et l’année prochaine. Je vais faire une belle collection qui représentera vraiment mon univers. Plutôt qu’une marque, cela prendra probablement la forme d’une série de collections capsules liant la mode et le muay thai. Je tiens à ce que cela soit très beau et très qualitatif.
Booba, qui vous suit depuis longtemps, vous a félicité sur les réseaux, pour votre victoire.
Je le connais depuis je suis très jeune. Il me suit depuis mes débuts, car nous sommes tous les deux du 92. Cela me fait vraiment plaisir qu’il soit toujours présent pour moi, depuis toutes ces années, j’apprécie beaucoup sa loyauté.
Quels sont vos prochains projets, en matière de boxe, après cette ceinture ?
J’ai signé au One Championship, qui est la plus grosse organisation de muay thai et kickboxing au monde. Je combattrai le 5 juillet dans ce cadre un boxeur américain. Je vais donc essayer de faire la meilleure performance possible, de me distinguer dans cette organisation, pour marquer à présent les esprits à l’échelle mondiale.