Transhumanisme et métamorphoses : le défilé couture anniversaire d’Iris Van Herpen
La créatrice Iris van Herpen, connue pour sa mode avant-gardiste, repousse une fois de plus les limites de la création dans un défilé couture évènement, célébrant le quinzième anniversaire de la Maison et intitulé “Meta Morphism”. Regardant vers le passé pour mieux appréhender l’avenir, la collection est une ode transhumaniste aux Métamorphoses d’Ovide.
Par Elliot Mawas.
La créatrice Iris van Herpen redéfinit depuis quinze ans les codes de la haute couture en montrant comment la technologie permet de repousser les frontières de la création. Avant-gardiste, la créatrice néerlandaise commençait à expérimenter l’impression de vêtements en 3D dès 2009. Pour son défilé anniversaire, elle s’inspire du post-humanisme, de la transformation des corps, de l’arrivée du métavers mais aussi de l’hyperréalité conjuguant une réalité numérique et physique. Ce faisant, elle interroge l’Identité : “Que suis-je par-delà mes transformations et mes différences ?” et propose une réécriture moderne (et textile) du mythe fondateur des “Métamorphoses” d’Ovide (8e siècle). Après avoir plongé dans les abysses en 2020, la collection, intitulée “Meta Morphism”, explose à la lumière et incarne les histoires d’Arachné, de Narcisse, et de la relation entre Daphné et Apollon à travers 16 silhouettes physiques.
Triste histoire que celle de la nymphe Daphné, transformée en laurier pour échapper à l’amour d’Apollon. Mais sa gloire (et sa chasteté) furent éternelles. Preuve en est sa sculpture squelettique, trônant au centre de la piste, entourée de feuilles de laurier dorées suspendues au plafond avec une colonne vertébrale en organza réalisée par Casey Curran qui envoutait les invités. Son histoire inspire la créatrice néerlandaise qui incarne les différentes étapes de sa métamorphose à travers des structures végétales et osseuses dont le look final : la robe “Glitched Growth”. Tandis que le mythe d’Arachné, transformée en araignée pour avoir défiée Athéna se traduit par de fines dentelles teintes en dégradé et emprisonnées dans des toiles brodées, ou par des centaines de fils non filés flottant et tournoyant autour des silhouettes, évoquant Arachne encore en train de tisser. Enfin, pour conter l’histoire de Narcisse, la créatrice use de couches translucides et de textures réfléchissantes. Le sublime manteau d’ouverture, “Narcisse” joue avec les transparences, faisant apparaitre des visages en écho qui se regardent les uns les autres.
Pour ce défilé, Iris van Herpen fait ses premiers pas dans le métavers. En collaboration avec Microsoft, elle organise un défilé mixte, fusionnant l’expérience numérique et physique. Trois looks numériques étaient ainsi prévus. C’était sans compter l’épidémie de COVID-19 parmi les membres de l’équipe technique qui a empêché la partie numérique d’avoir lieu. Nul doute néanmoins que la créatrice reste précurtrice dans ce domaine et devrait inspirer de nombreux créateurs. Une exposition est d’ailleurs prévue au Musée des Arts Décoratifs de Paris pour 2023.