25 jan 2021

Pluie d’or et surréalisme dans la collection Schiaparelli haute couture printemps-été 2021

Silhouettes sculpturales, bijoux dorés insolites, matières somptueuses en profusion… La troisième collection haute couture du créateur américain Daniel Roseberry pour Schiaparelli affine encore sa vision pour la maison française, vers un vestiaire théâtral et extravagant subtilement ancré dans notre époque.

Théâtre,  opulence, surréalisme. Malgré l’absence de défilé et la sobriété du décor, la troisième collection haute couture de Daniel Roseberry pour Schiaparelli ne délaisse en rien la puissance dramatique qui caractérise habituellement ses créations. D’ailleurs, elle est sans doute celle qui, depuis son arrivée il y a deux ans à la direction artistique de la maison française, catalyse aussi explicitement son idéal : réussir à ancrer ses pièces dans la réalité de notre époque tout en rendant hommage à l’esprit d’Elsa Schiaparelli et à l’effusion artistique dans laquelle elle fut prise de son vivant. La démarche se matérialise particulièrement dans les accessoires et bijoux, toujours étonnants, dans lequel le créateur américain décline des motifs insolites et surréalistes presque tous revêtus d’un manteau d’or. Déjà présents dans la dernière collection de prêt-à-porter de la maison, le cadenas signature de Schiaparelli s’invite sur plusieurs sacs et se décuple même sur un ample pantalon blanc, des pierres en forme de poires sont suspendues aux oreilles par des suite de molaires, tandis que de nombreuses pièces fragmentent les parties du corps et font la part belle à la tautologie : ainsi, des bagues recouvrent les mains de cinq nouveaux doigts couleur or, des doigts de pieds émergent du cuir noir des escarpins et bottes, des nez s’invitent au milieu des sacs, deux yeux verts apparaissent au milieu d’une paire de lunettes en perles noires tandis que des boucles d’oreilles en laiton doublent la forme, justement, d’oreilles percées.
 

Si ces bijoux sont des éléments constitutifs essentiels à la nouvelle identité Schiaparelli, la patte de Daniel Roseberry s’illustre également dans la construction du vêtement. La recherche de volume en est un exemple majeur : autour du corps, le satin de soie et le taffetas composent des silhouettes sculpturales où le tissu crée l’illusion d’une rigidité dans la souplesse du drapé, des pantalons en cuir ou crêpe sont froncés à la taille et adoptent une allure presque bouffante et le velours de soie d’une robe s’étend tout autour du corps comme une immense traîne. Mais les pièces parmi les plus mémorables de cette collection resteront sans doute les bustiers moulés sur une sculpture sur mesure à la musculature pectorale et abdominale saillante. Comme pour former une seconde peau, ces volumes se retrouvent sur une robe et un sac à main assorti en cuir de vachette marron, lacé sur les deux cotés à la manière d’un corset, ou encore sur une robe courte aux épaules marquées intégralement brodée de tubes de verre dans la couleur “Shocking Pink”, rose caractéristique de la maison. “Mon défi, pour mon prochain défilé couture, c’est de faire rêver les gens sans pour autant fuir la réalité”, confiait Daniel Roseberry à Numéro il y a quelques mois. Somptueuse et subtilement décalée, cette nouvelle collection haute couture confirme qu’il s’est engagé sur la bonne voie.