23 juin 2023

Les sirènes queer du défilé Jeanne Friot printemps-été 2024

Au Palais de Tokyo, le défilé printemps-été 2024 de Jeanne Friot a fait à nouveau salle comble. Une collection sensuelle et queer inspirée par les origines du conte La Petite Sirène, que la jeune créatrice française commente en coulisses.

Jeanne Friot s’inspire d’un conte d’Andersen pour son défilé printemps-été 2024

 

Comme en janvier dernier, le défilé Jeanne Friot a fait salle comble au Palais de Tokyo. À raison : la jeune créatrice française est assurément une étoile montante de la mode. En particulier depuis le succès de sa précédente collection automne-hiver 2023-2024, qui propulsait le label en faisant de ses mini-kilts à motif écossais écarlate un must-have de la prochaine saison. “Pour cette nouvelle collection, j’ai adapté mon discours afin de toucher un public encore plus large” confie la designer à Numéro en coulisse de son défilé. Alors, exit les sorcières et les silhouettes gothiques de janvier, remplacées par des looks ultra-désirables bleu ou beige inspirés par le conte de La Petite Sirène d’Hans Christian Andersen (1837). Loin de la magie et de l’innocence du dessin animé culte et du live action Disney (actuellement au cinéma), Jeanne Friot s’intéresse au contexte qui entoure l’écriture du conte original. Au milieu du 19e siècle, Andersen écrit La Petite Sirène lorsque son mécène, dont il était fou amoureux, se marie. “Cette histoire d’amour, c’est finalement la sienne” explique la créatrice. L’histoire qu’il n’a pas pu vivre, qu’il n’a pas pu exprimer – car comme Ariel qui perd sa voix, l’écrivain n’a pas pu dire à l’élu de son cœur ce qu’il ressentait pour lui. “Tout cela parle d’identité, de sexualité et de genre aussi. Soit tous les sujets qui nous intéressent”, ajoute la fondatrice éponyme du jeune label qui se veut en effet non genré, destiné à tous les sexes et à toutes les identités. 

 

“En tant que personne queer, c’est important de raconter notre histoire, d’avoir des récits réparateurs” – Jeanne Friot

 

D’ailleurs, lorsque Jeanne Friot conçoit cette nouvelle collection printemps-été 2024 intitulée “Sirens”, la triste actualité américaine légiférant, au printemps dernier, contre les droits des personnes transgenres et contre les spectacles de drag-queens, la conforte dans son inspiration et dans ses revendications. “En tant que personne queer, c’est important de raconter notre histoire, d’avoir des récits réparateurs. La Petite Sirène ne se termine pas bien : elle perd sa voix, sa queue, et elle ne peut même pas dire à son mec qu’elle l’aime ! Donc on a décidé de reprendre le conte et de le transformer en un message positif.” En découlent des silhouettes aux allures de sirène queer, composées de longues jupes en jean fendues qui épousent parfaitement le bas du corps, de hauts et de robes minimalistes en mesh transparente effet mouillé ou de vestes brodés de sequins bleus semblables à des gouttes d’eau perlant sur le torse… Sans oublier les statement pieces, une robe, une jupe et un haut, fabriqués à partir de coquillages accrochés sur des chaînes, dont les tintements rappellent à chaque pas le bruit de l’océan. Et rappellent aussi la démarche durable du label de Jeanne Friot, qui produit chacun de ses vêtements en édition limitée à partir de dead-stocks : en l’occurence ici, des coquilles Saint-Jacques rachetées à des restaurateurs ou ramassées sur la plage. 

 

Le défilé Jeanne Friot, entre robes coquillages, mini-jupes à sequins et ensembles en jean

 

Outre ces looks atypiques, Jeanne Friot propose aussi des ensembles plus simples, “pour que des personnes comme ma mère ou mon grand-père puissent aussi porter des pièces de cette collection”, à l’image des hauts et bas en denim délavé qui promettent, comme les kilts écossais de la saison dernière, d’être un énorme succès. En veste à manche courte ceinturée, en longue jupe ouverte ou en version mini, en crop-top ou pantalon orné de franges… L’ensemble est si cohérent qu’il semble presque impossible de pouvoir faire un choix parmi les pièces présentées à ce défilé. Une chose est sûre : Jeanne Friot est une créatrice à suivre de très, très près.