Kenzo invite à la danse dans sa collection automne-hiver 2021-2022
Pour la première collection de Kenzo depuis la disparition de son fondateur Kenzo Takada, Felipe Oliveira Baptista décide de rendre hommage au créateur japonais avec un vestiaire réinterprétant les archives du label. En résulte un vestiaire tout en couleurs, imprimés et mouvements, mis en scène dans une vidéo où les mannequins se livrent à une danse effrénée.
Par Matthieu Jacquet.
Le 4 octobre dernier, la mode perdait l’un de ses grands noms : le créateur japonais Kenzo Takada. À 81 ans, celui qui avait donné son prénom à son propre label en 1980 s’éteignait des suites du Covid-19, laissant derrière lui un héritage très vivace poursuivi depuis 1999 par les différents directeurs artistiques à la tête de son empire. Felipe Oliveira Baptista est le dernier de cette liste : seulement un an après son arrivée dans la maison en juillet 2019, le créateur portugais s’est vu confié la lourde tâche d’imaginer la première collection de Kenzo après le décès de son fondateur. Une triste actualité qui provoque finalement chez lui une véritable impulsion créative. Pendant des semaines, le directeur artistique parcourt les collections de Kenzo Takada, de 1978 à 1985, et choisit de croiser ses propres archives avec celles de son aîné. Au total, soixante-dix silhouettes matérialisent cette hybridation de deux univers reliés par un même ADN : celui du label. Et comme une évidence, celle-ci passe par une explosion de couleurs et d’imprimés, mais aussi une ode au mouvement.
Pour matérialiser cela, Felipe Olivera Baptista opte pour des coupes amples et longues et des matières fluides qui glissent, tantôt lourdement tantôt légèrement, sur le corps. Des manteaux portés comme des capes en drap de laine doublée, des trenchs en cuir, des robes droites ceinturées, pantalons larges et jupes longues fendues font du corps un support graphique à part entière alors qu’y vibrent des motifs à carreaux, rayures, chaînes, petits oiseaux ou encore de multiples déclinaisons d’imprimés floraux. Le directeur artistique du label, qui avait pour le printemps-été 2021 recouvert ses modèles de chapeaux voilés et d’ensembles enveloppants évoquant l’uniforme d’apiculteur, prolonge également ce vestiaire protecteur par de nouvelles silhouettes monochromes bleu électrique, orange et vert fluo, plusieurs blousons matelassés – technique qu’affectionnait particulièrement Kenzo Takada –, des combinaisons intégrales et autres pulls en laine qui, ensemble, recouvrent la quasi intégralité du corps, de leurs capuchons à visière jusqu’aux bottes dont la forme évoque des chaussures de ski.
Afin de mettre en scène cet hommage à la fête et à la vie, le créateur portugais présente la collection automne-hiver 2021-2022 lors d’une performance animée et jubilatoire durant laquelle les mannequins s’élancent et dansent sur une scène circulaire blanche. Ainsi réunie comme entre les murs d’un club sur un morceau de l’artiste Planningtorock, cette assemblée fait jaillir par ces envolées physiques une profusion visuelle à l’image du collage d’influences opéré par ce nouveau vestiaire, avant que chaque mannequin ne tombe au sol, épuisé. Au fil de ses onze minutes, la vidéo fait autant écho au désir ardent de se réunir et de danser, partagé dans le monde entier depuis un an, qu’à l’esprit regretté de Kenzo Takada : après tout, le créateur japonais lui-même affirmait que son travail avait “toujours été axé sur la liberté et l’harmonie”.