Comment le défilé Prada se joue-t-il de la mode contemporaine ?

Par Camille Bois-Martin.

La collaboration la plus aboutie entre Raf Simons et Miuccia Prada

Cela fait maintenant cinq ans que Raf Simons a rejoint Miuccia Prada à la tête des collections homme et femme chez Prada. Cinq années de collaborations prolifiques, qui ont nourri des vestiaires loués pour leur pertinence et pour leur innovation.

Au fil des saisons, ils ont ensemble composé des looks questionnant des thèmes actuels comme la féminité, comme des tendances virales à l’image de l’esthétique rétro ou des coupes slim très Indie Sleaze. Bref, presque rien n’a échappé à leur vision acérée – et complémentaire.

Pour le printemps-été 2026, marquant donc une demi-décennie de collaboration, le duo de créateurs présente une collection aboutie, où leurs esprits dialoguent avec harmonie. Un équilibre difficile à trouver, mais qu’ils ont atteint cette saison. Il suffit d’observer les silhouettes sophistiquées pour s’en convaincre.

Un look composé d’une robe-tablier cintrée au jupon à volants, très représentatif de l’uniforme signature de Miuccia Prada, est complété de longs gants violets, contrastant avec le vert néon de la robe – deux détails caractéristiques de l’univers de Raf Simons (qu’il développait notamment chez Jil Sander puis chez Dior).

Ensemble, les deux créateurs jouent ainsi des vêtements comme de leurs codes respectifs, qui s’appliquent sans compromis au sein de cette sublime collection. Cet exercice de rigueur stylistique de haute volée se traduit au fil de silhouettes dont les jupes droites et les cardigans, très Miuccia, côtoient donc de longs gants en cuir, d’élégantes combinaisons et de subversives jupes à bretelles, très Raf Simons.

Le défilé printemps-été 2026, combattre le minimaliste avec des couleurs

Si cette collaboration entre Raf Simons et Miuccia Prada s’avère donc très réussie, celle-ci mise notamment sur l’association de couleurs dissonantes. Fluorescente, la palette chromatique tranche avec les tendances qui inondent récemment les Fashion Week. Que ce soit le très rock style Indie sleaze à la vague du quiet luxury, l’explosion et à la combinaison de couleurs n’étaient pas au rendez-vous. On percevait déjà plusieurs actes de rébellion la saison passée (automne-hiver 2025-2026) chez Balenciaga et Tom Ford, ou, il y a quelques jours, chez Burberry. Mais rien d’aussi audacieux et assumé que ce défilé Prada printemps-été 2026.

Le sol orange du podium, jurant avec le béton des colonnes doriques du lieu où se déroulait le show, semblait d’ailleurs annoncer la couleur… Réminiscence du fluo qui submergeait la mode du début des années 2010. Mais son parti-pris, original, la distingue de ses pairs. Du violet associé à du vert néon ; du rouge associé à du lilas ; du vert pâle combiné à du jaune poussin et du orange ; du bleu porté avec du bordeaux… Surprenants, ces looks s’avèrent surtout terriblement séduisants. Et ils offrent un nouveau souffle à une mode devenue, oserait-on le dire, quelque peu terne et répétitive…