3 finalistes du prix LVMH électrisent la Fashion Week
Kenneth Ize, Anrealage, Thebe Magugu… Quelques mois après l’annonce des deux vainqueurs du dernier prix LVMH, trois de ses finalistes – dont le lauréat du Grand Prix – ont présenté leur nouvelle collection automne-hiver 2020-2021 lors des premiers jours de la Fashion Week parisienne.
Par Matthieu Jacquet.
Si la Fashion Week de Paris fait la part belle aux nombreuses grandes maisons établies dans la capitale, elle est aussi très attendue pour favoriser la découverte des créateurs émergents qui feront la mode de demain. Pour la saison du prêt-à-porter femme automne-hiver 2020-2021, trois labels faisant partie des finalistes du prix LVMH 2019 ont entamé en beauté cette nouvelle semaine de la mode parisienne : Kenneth Ize, Anrealage et le dernier lauréat du Grand Prix Thebe Magugu.
Naomi Campbell clôture le premier défilé de Kenneth Ize
Ce lundi, Kenneth Ize donnait le coup d’envoi de la Fashion Week parisienne avec un premier défilé dans la capitale française très réussi. Soucieux depuis ses débuts de valoriser la tradition et l’artisanat de son pays d’origine, ce jeune Nigérian a mis à l’honneur dans sa collection l’une des techniques caractéristiques de la population des Yoruba – habitants du sud du Nigéria –, le aso oke. Caractérisé par des lignes colorées et formes géométriques contrastées, ce textile tissé à la main habille ici des vestes, robes et jupes de rayures verticales et de carreaux d’une grande variété de coloris, entre bleu ciel, rouge, jaune, violet et vert. Réalisés par des artisans nigérians, leurs tissages se prolongent dans des franges qui habillent aussi bien les pantalons, manteaux et robes que les écharpes, les sacs en bandoulière, à main et mini pochettes. Outre cette savante association des couleurs qui fait la force de Kenneth Ize, celui-ci montre également dans ses pièces une grande attention aux détails : les sweatshirts sont dotés de cordons multiples, quelques vestes sont nouées élégamment sur le côté ou encore des blousons et combinaisons sont texturés par un effet matelassé. Clou du spectacle, la supermodel Naomi Campbell vient clore avec panache le défilé de celui qu’elle considère comme son protégé. L’un des tee-shirts de la collection porte d’ailleurs l’inscription “Kenneth loves you” – une ode à l’amour qui ne sera pas passée inaperçue.
Anrealage propose une mode constructiviste
Depuis la création de son label Anrealage en 2003, Kunihiko Morinaga n’a cessé de montrer son appétence pour l’expérimentation en explorant techniquement et conceptuellement les nombreuses potentialités du vêtement Après une collection axée sur les grossissements d’échelle et les jeux de proportions, le créateur japonais présente des pièces plus ludiques articulées autour de l’idée d’assemblage. Alors que la déconstruction anime de nombreux labels tels que Y/Project ou Ottolinger, Anrealage choisit d’envisager le vêtement comme une construction en proposant des pièces modulables, assemblables et détachables à l’aide de pressions. Inspirés par un jeu de construction composé de formes géométriques, leurs patrons recréent des trapèzes, demi-cercles, cubes et pyramides où des basiques sont présents par fragments dans des ensembles hybrides : le duffle-coat, le tailleur et ses galons, le trench, le bomber, la veste en denim… Alors que le pull irlandais se voit fusionné à des doudounes, le pied de poule est maximisé sur des tissus épais ou brillants tandis que les talons des chaussures et les boucles d’oreille en bois évoquent une version miniature du jeu d’assemblage. Sur un sol aux airs d’échiquier, les mannequins adoptent une démarche décidée et rigide comme pour mieux accentuer les lignes droites et anguleuses des pièces.
Thebe Magugu rend un hommage poétique à son village natal
Pour présenter sa première collection après avoir remporté le prix LVMH, Thebe Magugu a choisi le petit théâtre au sous-sol du Palais de Tokyo avec une mise en scène mêlant vidéo, photographies et vêtements portés par des mannequins-poupées assis sur des chaises, les visages couverts par des masques colorés faisant référence aux masques traditionnels africains. Dans l’optique de cette nouvelle collection, le plus jeune et premier créateur africain lauréat du prix est revenu dans son village natal d’Ipopeng, situé en plein cœur de l’Afrique du Sud, où il a rencontré et photographié l’entourage et les lieux dans lesquels il a grandi. Inspiré par ces échanges et ces souvenirs, il en a extrait un vestiaire résolument féminin où les vêtements mêlent construction et fluidité : les robes-chemises sont boutonnées, les jupes sont légèrement plissées ou côtelées, les silhouettes sont ceinturées pour créer une taille haute, les cols et épaules sont parfois pourvus de surpiqûres contrastées… Entre vert émeraude, lilas, violet, moutarde et bleu marine, leurs couleurs douces rappellent les rues et la végétation d’Ipopeng que dépeignent la vidéo et les photographies réalisées par Kristin-Lee Moolman. Fidèle aux engagements de Thebe Magugu, cette nouvelle collection a été intégralement produite en Afrique du Sud tandis que des puces présentes aux côtés de chaque photographie permettent grâce à une application d’obtenir l’histoire et les informations de chaque pièce.