17 mai 2024

Paris 2024 : dans les coulisses des Jeux Olympiques (épisode 4/10)

Outre leur aspect sportif, les Jeux Olympiques 2024 mettent également en avant un volet social et inclusif, et un autre écologique, qui nécessitent la coopération étroite de multiples acteurs de secteurs divers. À l’approche des JO, Numéro revient ici sur la préparation de cet événement en dix épisodes, au fil d’une chronique racontée à la première personne, articulant les interventions de personnalités majeures. Au programme de ce quatrième volet : Los Angeles et Paris en compétition…

Début juillet 2017, le CIO se réunit à Lausanne pour entériner une décision rare, portée par son président Thomas Bach : l’attribution simultanée des Jeux Olympiques de 2024 et de 2028 – sans encore préciser à qui. Officieusement, Paris et Los Angeles peuvent donc décider de se “partager” les JO. En coulisse, les négociations font rage depuis des mois, car tout le monde veut obtenir 2024. Depuis le printemps, Paris met la pression à LA, Emmanuel Macron, tout juste élu président de la République, est présent en Suisse.

 

Lausanne, juillet 2017 : faire plier Los Angeles 

 

Étienne Thobois : La course pour l’attribution s’est terminée par une concurrence duale avec Los Angeles. La ville de Rome avait été candidate mais elle avait renoncé, tout comme Budapest et Hambourg, à cause d’un référendum. Enfin, le CIO avait décidé en décembre 2016 [la décision n’a été officielle qu’à Lausanne en juillet 2017] de mettre en place une double attribution qui changeait tout. Il a fallu batailler encore un peu. On s’est positionné par rapport à la concurrence.

 

Tony Estanguet : Je me retrouve à la tête d’une délégation dont font partie le président de la République, la maire de Paris, la présidente de Région, Teddy Riner… C’est donc là, en Suisse, que les choses se jouent. L’idée de la double attribution pour 2024 et 2028 ne vient pas de nous. Nous avons réagi positivement, mais la condition était que nous obtenions 2024 plutôt que 2028.

 

Pierre Rabadan : Avec Anne Hidalgo, on a fait comprendre au maire de Los Angeles, Eric Garcetti, avec qui on s’entendait plutôt bien, que sans compromis de sa part, on allait devoir aller au vote lors de la session du CIO prévue plus tard à Lima. Et qu’il perdrait.

 

Tony Estanguet : Il y avait un petit côté bluff là-dedans. Los Angeles aurait pu nous prendre au mot en allant jusqu’au vote, avec le risque que l’on perde. Mais, encore aujourd’hui, je pense que s’il y avait eu vote, nous aurions gagné.

 

Après son coup de bluff, Paris réussit à faire plier Los Angeles. Le 11 juillet 2017, le CIO décide à l’unanimité la double attribution des jeux Olympiques 2024 et 2028 à Paris et à Los Angeles. Officiellement, le suspense demeure sur l’ordre des éditions, avant la session officielle de Lima en septembre. Mais les dés sont jetés. Los Angeles annoncera d’ailleurs le 31 juillet se positionner pour 2028. C’est la libération.

 

Tony Estanguet : Le 11 juillet, on a compris que c’était gagné. On aura les Jeux. Une émotion et un gros soulagement pour moi, car cela fait deux ans que nous sommes sous pression. Je peux comparer cela à une grande victoire sportive. Mais c’est aussi nouveau. Une médaille est personnelle et elle ne change pas grand-chose à la vie de la France. Là, on gagne un truc qui pourra avoir un impact sur l’histoire de notre pays.

 

Thierry Rey : Le président Macron est arrivé au pouvoir en mai 2017 et, dès juillet, il y a eu ce deal qui implique la maire de Paris et les Américains. Hollande a passé quatre ou cinq ans sur le dossier, mais c’est le nouveau Président qui a récolté la victoire. Cela fait aussi partie du jeu.