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07 Guido Mocafico Numero livre photo

Guido Mocafico et Numéro : l'alchimie parfaite

PHOTOGRAPHIE

À l'occasion du lancement du livre “Mocafico Numéro” ce jeudi au Studio des Acacias, le maître incontesté de la nature morte Guido Mocafico revient sur ce beau livre célébrant sa collaboration magistrale avec Numéro.

Guido Mocafico et Numéro : l'alchimie parfaite

Le photographe Guido Mocafico prête son oeil et son talent à Numéro depuis la naissance même du magazine. Un beau livre publié aux éditions Steidl célèbre aujourd'hui cette collaboration mythique. 

 

Numéro : Comment résume-t-on dix-huit ans de collaboration dans un livre ? Parlez-nous de cet objet que vous avez conçu avec les éditions Steidl.

Guido Mocafico : Lorsque le projet est né, je suis parti du principe que je ne sélectionnais rien. Au total, je disposais de 150 séries, chacune de six à huit pages. Et j’ai décidé de les montrer dans leur intégralité. En additionnant le tout, on aboutissait à 1 200 photos et 1 350 pages, ce qui est beaucoup trop pour un seul livre ! D’autre part, je voulais éviter de sacraliser ces images qui ont été pensées pour un magazine, et qui n’étaient pas destinées à être exposées ou collectionnées. Le format du coffee table book me semblait donc, pour cette raison, trop prétentieux, peu adapté. L’idée m’est alors venue de reconstituer le format du magazine Numéro : le livre est devenu une boîte regroupant six numé- ros virtuels de Numéro, qui ne contiennent que mes images. Un objet d’un certain poids… entre sept et huit kilos [rires].

 

Qu’est-ce qui vous a frappé en revoyant ces images ?

Ce qui est intéressant, c’est qu’on ne sait pas quand elles ont été faites. Ces photographies sont intemporelles, impossibles à dater. Il y a là des séries de photos de montres, de parfums, de bijoux, et d’autres de voyages, consacrées à des icebergs ou à des volcans. À chaque fois, l’idée était de trouver une nouvelle approche, un nouveau concept irrévérencieux.

 

Une collaboration de dix-huit ans est un fait plutôt exceptionnel dans le paysage actuel de la presse magazine, comment expliquez-vous la longévité de cette relation ?

C’est exceptionnel, oui. Nous sommes dans un monde où la fidélité n’existe plus, où le leadership est renouvelé toutes les trois minutes. Ce qui a rendu cette collaboration possible, c’est que Babeth Djian, fondatrice et directrice de la rédaction de Numéro, et moi partageons toujours la même attitude depuis notre rencontre il y a une vingtaine d’années au Festival de la photo de mode de Monaco. À l’époque, nous voulions innover, repousser les limites de l’image de mode, tout en proposant de belles photos. Nous étions comme des chiens fous [rires]. Et cela n’a pas changé. Nous avons toujours l’attitude de personnes qui font un fanzine dans une cave à Londres, alors que Numéro est aujourd’hui un magazine très établi. Dans chaque série d’images que je propose, nous sommes sur le fil du rasoir. Les concepts doivent être irrévérencieux sans tomber dans le mauvais goût facile. Il s’agit juste de trouver le bon degré de cynisme ou de perversion. Nous sommes prescripteurs, de nombreuses campagnes ont été inspirées par ces séries pour Numéro. Cette collaboration est un laboratoire d’idées.

 

 

Guido Mocafico, Lampropeltis pyromelana et Lampropeltis triangulum sinaloae, publié dans le hors-série Numéro Homme n°4, automne-hiver 2003. Guido Mocafico, Lampropeltis pyromelana et Lampropeltis triangulum sinaloae, publié dans le hors-série Numéro Homme n°4, automne-hiver 2003.
Guido Mocafico, Lampropeltis pyromelana et Lampropeltis triangulum sinaloae, publié dans le hors-série Numéro Homme n°4, automne-hiver 2003.

Quelles sont, à vos yeux, vos séries les plus audacieuses ? 

Je me souviens notamment de bijoux shootés dans des sacs d’aspirateur éventrés. Pour cette série que vous mentionnez, le directeur de création de l’époque, Thomas Lenthal, et moi avions imaginé qu’une femme de ménage avait aspiré des bijoux qu’il fallait ensuite aller chercher dans le sac de l’aspirateur. A priori, cela paraît franchement sale ! Mais le résultat plastique est très beau. Car je ne cherche pas à provoquer le dégoût du lecteur, mais à subvertir intelligemment le monde de la mode et le mode de vie privilégié qu’il symbolise. La transgression doit rester subtile, c’est un impératif. Par exemple, j’ai shooté une série de montres à la chambre, comme à mon habitude – produisant donc des images de très haute qualité, avec un excellent piqué –, que nous avons ensuite volontairement pixellisées. On ne peut donc plus lire le nom de la marque. Cette série date d’une quinzaine d’années, et je l’ai redécouverte en préparant le livre. 

 

Quelle différence faites-vous entre votre travail personnel et vos commandes ? 

La différence ne se situe pas sur le plan de la beauté : certaines publicités que j’ai réalisées, malgré toutes les contraintes imposées, pourraient tout à fait être accrochées à un mur. Dans mon travail artistique, je ne rends de comptes à personne, pas même à ma galerie. Mais l’approche, notamment formelle, reste la même. La brutalité du cadrage, le côté direct des images, restent les mêmes. Il s’agit toujours de mon langage photographique. 

 

Livre “MOCAFICO NUMÉRO”, aux Éditions Steidl,à paraître courant janvier 2017. Lancement du livre, en février, au Studio des Acacias, 30, rue des acacias, Paris XVIIe.

 

Exposition “MOCAFICO NUMÉRO”, visite sur rendez-vous du 10 au 18 février au Studio des Acacias, 30, rue des acacias, Paris XVIIe.

<p>Guido Mocafico, Papilio antenor, publié dans Numéro n°37, octobre 2002.</p>

Guido Mocafico, Papilio antenor, publié dans Numéro n°37, octobre 2002.

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