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Numéro
17 Nicolas Duvauchelle, Balle perdue, Interview, Netflix

Rencontre avec Nicolas Duvauchelle : “J'ai du mal à fermer ma gueule”

Cinéma

Vendredi, l'acteur français sera à l'affiche de “Balle Perdue”, un film d'action sur l'univers du go fast signé Guillaume Pierret et produit par Netflix.

Rencontre avec Nicolas Duvauchelle : “J'ai du mal à fermer ma gueule” Rencontre avec Nicolas Duvauchelle : “J'ai du mal à fermer ma gueule”

Tourné en bord de mer, à Sète, Balle Perdue fait se rencontrer une troupe étincelante de comédiens que tout oppose : d’un côté, Stéfi Celma – vue dans le série Dix pour cent –, Rod Paradot – César du meilleur espoir masculin en 2016 pour son rôle d’ado perturbé dans La Tête haute –, Alban Lenoir et même Ramzy Bedia. Avec eux, il y a Nicolas Duvauchelle, la forte tête du cinéma français, qui, a 40 ans, peut se targuer d'avoir tourné avec les plus grands cinéastes : de Claire Denis (sur quatre films), à André Téchiné (La Fille du RER) en passant par Alain Resnais (Les Herbes folles) et Roschdy Zem (Bodybuilder, Persona non grata). En choisissant des rôles souvent noirs (Hell, Je ne suis pas un salaud) et parfois lumineux (Comme des frères), celui qui a été nommé au César du meilleur acteur pour son rôle de flic de la brigade de protection des mineurs dans Polisse (de Maïwenn) s'est toujours illustré au cinéma comme il semble être dans la vie : franc, loyal et assidu. Numéro a renconté cet acteur au visage si familier, dont les traits frappent par leur brutalité tendre.

 

 

Numéro : Dans Balle Perdue, vous interprétez Areski, un flic ripoux prêt à tout pour devenir le chef de sa brigade. Comment vous a-t-on présenté le projet ?

Nicolas Duvauchelle : J’ai rencontré Guillaume Pierret de façon assez classique : il m’a appelé, m’a envoyé le scénario, je l’ai lu puis on s’est vus avec Guillaume et Alban Lenoir – qui était impliqué très tôt sur le projet. Avec Alban, on voulait tourner ensemble depuis longtemps et Guillaume était très enthousiaste vis à vis de son film, ce qui m’a vraiment motivé. Balle Perdue est une très belle aventure humaine et je n’ai pas eu beaucoup de rôles de méchant dans ma carrière, ce pourquoi le personnage d’Areski m’a beaucoup attiré.

 

 

Vous êtes pourtant un “méchant” dans Dalida de Lisa Azuelos…

[Il sourit] Ah bon ? Pourquoi ?

 

 

Votre personnage, Richard Chanfray, est torturé et manipulateur.

C’est vrai, mais ce n’était pas un personnage de méchant comme on l’entend au cinéma. C’était quelqu’un de nocif. Dans Balle Perdue, le personnage d’Areski est secret, on ne sait pas ce qui le pousse à se comporter violement. Par le passé, on m’a déjà proposé des rôles de vrai méchant, de mec qui viole, et ça, je ne peux pas le faire. Il faut bien que certains s’en chargent, bien sûr, mais ce n’est pas pour moi. Dans les films, les antihéros sont des rôles phares et j’aime bien le côté légendaire des méchants.

 

 

Vous êtes un fan de films d’action ?

Oui, j’aime bien les films hongkongais des années 90, les Police Story, les films de John Woo et même ceux avec Jackie Chan. Forcément, on a tous regardé les Rocky et les Rambo.

 

 

“Si mes filles voient un de mes films et qu'elles sortent de la salle avec un grand sourire, j'en ai rien à branler du reste”

 

 

Dans votre filmographie, il y a quelque chose de frappant : à seulement 19 ans, vous avez tourné dans Beau Travail (2000) sous la direction de l’immense Claire Denis. Quel souvenir gardez-vous du tournage et de votre rencontre avec Denis Lavant – l’acteur principal du film ?

Ce sont des souvenirs magnifiques. On était à Djibouti avec une troupe de danseurs et un chorégraphe de danse contemporaine fabuleux, Bernardo Montet. J’avais commencé le cinéma six mois avant, j’étais un gamin et me retrouver avec un chanteur lyrique, les acteurs Denis Lavant, Michel Subor et Grégoire Colin, mais aussi des vrais légionnaires… Ces souvenirs sont gravés dans ma mémoire. J’ai ensuite travaillé à trois reprises avec Claire Denis : sur Trouble Every Day [2001], White Material [2009] et Un beau soleil intérieur [2017]. Je l’apprécie particulièrement, elle est très tendre et jamais dans la confrontation comme peuvent l’être certains metteurs en scène. Je ne veux pas dire que les mecs gueulent davantage mais avec une femme, c’est différent, c’est plus doux… Par exemple, j’ai eu quelques rapports de force avec Erick Zonka sur le tournage du Petit Voleur [1999] et avec Claire Denis, ça n’a jamais été le cas. Pour Beau Travail, j’étais un peu figurant mais c’était magnifique de voir la scène finale en live, avec Denis Lavant qui danse comme un dieu… Ça m’a beaucoup touché. Ce mec c’est un ovni.

 

 

Beau Travail frappe par son rapport au corps, certaines scènes très chorégraphiées. Je sais que vous pratiquez des sports de combat, dans quelle mesure cela vous aide dans votre métier ?

Je pratique la boxe thaï et ça m’a beaucoup aidé pour connaître mon corps. Je pense que tout comédien doit faire du sport ou de la danse. D’ailleurs, j’aimerais bien faire un film sur la danse… On m’avait proposé Danse avec les stars mais je n’ai pas voulu ! Je ne sais pas si j’ai de grands talents de danseur mais un film à la Dirty Dancing me plairait beaucoup. Dans la danse, il y a un truc d’abandon que je trouve magnifique. Un pote à moi fait du tango et je trouve ça génial.

Rencontre avec Nicolas Duvauchelle : “J'ai du mal à fermer ma gueule” Rencontre avec Nicolas Duvauchelle : “J'ai du mal à fermer ma gueule”

Avant Balle Perdue, vous avez joué dans Une sirène à Paris (2020), un film extrêmement raté que les critiques rapprochent du nanar…

Le film manquait peut être un peu de moyen, c’est vrai. Moi, j’adore l’univers de Mathias Malzieu et je suis très content de ce film. Mes filles ont adoré, et quand elle sortent avec un grand sourire, j’en ai rien à branler du reste. Comme on dit, ça m’en touche une sans faire bouger l’autre !

 

 

Vous avez tourné avec Roschdy Zem, Claire Denis ou Emmanuel Finkiel, qui sont des cinéastes qui explorent la noirceur. Pourquoi choisir ces metteurs en scène là ?

Dans les films, je n’aime pas quand c’est trop éclairé et ces cinéastes ont des univers qui me touchent. Avec eux, j’ai l’impression de vraiment faire du cinéma et pas des produits pour les téléspectateurs destinés à faire beaucoup d’entrées. Je veux faire des films qui donnent une autre vision du monde.

 

 

“Maïwenn m’a fait des coups que je n’oublierai pas”

 

 

C’est vos démons qui vous guident ?

[Rires] Mes quoi ? Mes démons sont loin derrière moi. C’est vrai que je n’ai peut être pas une vision de la vie très positive : je suis plutôt quelqu’un de réaliste et certaines comédies ne me parlent pas. Je préfère que les films m’habitent.

 

 

Sur le tournage de Polisse (2011), vous avez rencontré Karole Rocher, une comédienne géniale avec qui vous êtes très ami, je crois…

Je l’ai rencontrée sur le tournage de la première saison de Braquo. On a vraiment acccroché et on a passé énormément de temps ensemble. Puis on a joué dans Polisse, c’était plus compliqué : on ne s’est pas forcément entendus avec tout le monde… Il y a eu deux ou trois petites histoires qui ne m’ont pas plu… Moi, j’aime bien les gens sincères. Vous savez, parfois, il vaut mieux fermer sa gueule mais j’ai du mal à faire ça…

 

 

Vous ne vous entendiez pas avec Maïwenn ?

C’était il y a longtemps et je n’ai plus d’animosité envers elle… ,mais elle m’a fait des coups que je n’oublierai pas. Quand le film est allé à Cannes, j’étais chez moi devant Canal+ et j’ai entendu Laurent Weil dire qu’on n’avait pas réussi à avoir notre avion. En fait, elle ne nous avait pas invités avec Didier [JoeyStarr] et Karole. C'est pas honnête et ça m’a foutu les boules.

 

 

Balle Perdue (2020) de Guillaume Pierret, disponible sur Netflix vendredi 19 juin.

Balle Perdue | Bande-annonce officielle VF | Netflix France