9 juil 2022

Thor : Love and Thunder : rencontre avec le réalisateur du nouveau Marvel, Taika Waititi

Ce mercredi 13 juillet, sortira dans les salles de cinéma le très attendu nouveau blockbuster Marvel, Thor : Love and Thunder. Porté par les interprétations musclées de Chris Hemsworth, Christian Bale et Natalie Portman, le film offre deux heures de divertissement de haute voltige, entre blagues loufoques, tubes des Guns N’ Roses, batailles épiques et mélange des genres délirants (des sujets graves côtoient des répliques potaches). Taika Waititi, le sémillant réalisateur du film qu’Hollywood s’arrache, nous en dit plus, à l’occasion d’une conférence de presse française, sur les nouvelles aventures co(s)miques du dieu du tonnerre.

Propos recueillis par Violaine Schütz.

Vous ne connaissez peut-être pas son patronyme (amusant) mais Taika Waititi est l’un des noms qui comptent à Hollywood, à tel point que le prestigieux The New York Times vient de dresser son portrait. Le Néo-zélandais de 46 ans qui a réalisé le nouveau Thor est à la fois un cinéaste déjanté (Jojo Rabbit, Thor : Ragnarok), un scénariste oscarisé et un acteur magnétique (The Suicide Squad, Free Guy, Avengers: Endgame) et il devrait faire encore beaucoup parler de lui ces prochaines années. En effet, celui qui partage sa vie avec la chanteuse Rita Ora s’est vu confier les rênes du prochain Star Wars mais aussi d’une série Apple TV+ et deux projets Netflix autour de Roald Dahl. Sans compter son adaptation d’un roman graphique d’Alejandro Jodorowsky et de Moebius et une comédie sur le foot. Entre deux concepts pharaoniques, le réalisateur très demandé nous a raconté, lors d’une conférence de presse française, les coulisses de ce qui s’annonce comme l’un des plus gros succès cinématographiques de cet été : Thor : Love and Thunder. Un nouveau film Marvel dans lequel le dieu tonnerre traque un tueur galactique et tombe amoureux, révélant sa fragilité sous la carapace de muscles.


Numéro : Vous aviez déjà réalisé Thor : Ragnarok en 2017. Vouliez-vous prendre la même direction – très humoristique et loufoque – avec ce nouveau Thor ?
Taika Waititi : Oui, je voulais garder le même ton qui a fait le succès du film en 2017, mais aussi retourner à ce qui faisait l’ADN de la bande dessinée qui est un récit d’aventures très riche. J’ai voulu mettre le plus de choses possibles dans Thor : Ragnarok car je ne savais pas si j’en dirigerais un autre. Du coup, quand j’ai su que j’allais réaliser un nouveau Thor, il me fallait de nouvelles idées. Je me suis alors replongé, avec l’équipe du film, dans le comics et j’ai découvert le personnage du « boucher des dieux », Gorr, joué par Christian Bale ainsi que l’histoire du retour de Jane Foster (Natalie Portman), brillante scientifique et ex-petite amie de Thor.

Il y a de nombreuses influences dans ce film qui puise autant dans la comédie loufoque que dans l’expressionnisme avec le personnage du méchant : Gorr… Mais c’est aussi un hommage aux vieux films avec l’utilisation du noir et blanc…
En fait, les séquences en noir et blanc sont inspirées par Truffaut. Je voulais qu’au milieu du film, après avoir vu plein de couleurs, les spectateurs soient surpris pas des scènes en noir et blanc. Certains comics comme Sin City utilisent de manière sublime le noir et blanc. C’était une façon d’apporter quelque chose de neuf et très graphique dans la saga.

 

Et d’où vient le côté « comédie romantique » du film ?

De ma volonté d’amener un aspect très humain, auquel on pouvait s’identifier, au personnage de Thor. C’est un dieu qui vit depuis de nombreuses années, qui a beaucoup d’expérience et donc, qui se situe loin du commun des mortels. On a du mal à se reconnaître en lui. C’est pour ça que j’ai intégré ce concept de crise du milieu de vie qu’il traverse dans le film. Il se sent perdu et n’a plus de but au début du film. Ce sont des états d’âme qu’on n’imagine pas, a priori, chez un super-héros aussi fort. L’idée était de tester ses muscles et son cœur. On s’est demandé : « Si l’amour arrivait, que se passerait-il pour lui ? » Concernant le registre de la comédie, je voudrais préciser qu’on sous-estime souvent ce genre, que l’on voit parfois comme une forme amoindrie de cinéma. Mais réaliser une comédie est plus difficile que de faire un drame. C’est plus dur de faire rire les gens et de tester les blagues et le ton d’une comédie que de savoir si un drame fonctionnera.

 

Comment Chris Hemsworth s’est préparé physiquement pour reprendre le rôle de Thor ?
Il a passé plus de six mois à devenir le plus costaud possible pour ce film. C’est d’ailleurs le long-métrage dans lequel il a joué où il est le plus costaud. Il n’y a rien qui a été ajouté « digitalement » à son corps. Et ça valait le coup, comme le montre une certaine scène du film (Chris Hemsworth apparaît nu dans le long-métrage, ndr).

Comment avez-vous conçu le personnage de Gorr, « le boucher des dieux », interprété par Christian Bale ?
On s’est inspiré des comics Thor, mais aussi des clips de Chris Cunningham, notamment de la vidéo réalisée pour le single Come to Daddy d’Aphex Twin (1997), afin d’élaborer le personnage du boucher des Dieux. On voulait le rendre très effrayant. Mais en tournant le film, on s’est parfois dit qu’il était peut-être trop effrayant pour les enfants. C’est un vrai monstre mais Christian Bale, par son talent, arrive à lui donner de l’humanité. On n’est pas d’accord avec ce qu’il fait mais on arrive à comprendre pourquoi il le fait (Gorr perd sa fille au début du film, avant de se retourner contre les dieux).

 

Comment avez-vous eu l’idée de faire jouer le rôle de Zeus par Russell Crowe ?
Russell est l’un de mes amis depuis longtemps. Et lui donner le rôle de Zeus semblait suffisamment ridicule et fou pour faire sens. Son apparition dans le film a des similarités avec son apparition dans Gladiator, ce qui rend le moment encore plus drôle. Le voir dans ce rôle était un événement spécial pour moi car je trouve que c’est un acteur immense.

Natalie Portman avait disparu de l’univers Marvel depuis plusieurs années. Comment l’avez-vous convaincu de revenir ?
Ce n’était pas si difficile car on a fait en sorte que son personnage, celui de Jane Foster, soit bien plus que la petite amie de Thor. Jane n’est pas juste l’objet de l’amour de quelqu’un. Elle traverse des choses très difficiles (elle est atteinte d’un cancer dans le film) avec beaucoup de force. C’est une super-héroïne qui s’empare du marteau du héros et devient The Mighty Thor. Elle peut être un modèle pour beaucoup de jeunes filles qui verront le film et seront heureuses de découvrir plus de femmes en super-héroïnes (le film montre aussi la très badass Tessa Thompson dans le rôle de la battante Valkyrie) aussi puissantes, voire plus, que les hommes. Et puis je crois que Natalie Portman avait aussi envie de s’amuser, de combattre elle-aussi plutôt que de regarder des hommes le faire.

 

Un groupe d’enfants apparaît dans le film et joue un rôle important. Est-ce une manière de réinstaller l’univers Marvel comme quelque chose d’enfantin ?
Je trouvais important de rappeler que les films de super-héros étaient aussi, voire avant tout, pour les enfants. Les films en général, y compris ceux de super-héros, deviennent de plus en plus sérieux. On pense d’abord au public adulte en oubliant parfois qu’ils devraient d’abord être faits pour les enfants. Ça doit rester des films pour toute la famille. Que ce soit les Marvel ou les Star Wars, j’ai l’impression que le public enfant est parfois mis de côté à tel point que mes enfants me demandent s’ils sont autorisés à les voir.  C’est dingue qu’ils me demandent si c’est possible de regarder un Marvel. Je voulais donc inclure les enfants dans ce film, à l’écran et aussi en tant que spectateurs. On voit d’ailleurs des monstres dans Thor qui ont été dessinés par des gamins. Quand j’étais gosse, je regardais des films comme E.T., l’extra-terrestre (1982), qui étaient faits pour les petits et les grands, mais surtout pour les petits. Et je trouvais ça super.


L’un des enfants est fan d’Axl Rose dans le film et on entend plusieurs fois le groupe Guns N’ Roses. D’où vient cette obsession ?
Je suis un grand fan de metal. Je voulais que ce film soit un hommage au rock des années 80, et plus particulièrement à l’imagerie hard rock. J’ai grandi en écoutant Metallica, du rock, du metal. J’ai même enregistré un album en tant que musicien. J’ai toujours ça cool comme culture, donc c’était une manière de faire plaisir, je l’avoue.

 

Thor : Love and Thunder (2022) de Taika Waititi, en salle le 13 juillet.