Égotrip malaisant ou introspection émouvante : que vaut le premier film de The Weeknd ?

Par Camille Bois-Martin.

Après la série The Idol, The Weeknd dévoile son premier film

Il l’avait annoncé : en conclusion de son dernier album Hurry Up Tomorrow, sorti le 31 janvier dernier, The Weeknd dévoile un film du même titre, inspiré par sa propre vie. Quelque peu décousu, le récit nous plonge dans les méandres du quotidien de la rockstar, alors en pleine tournée, en proie à la drogue et à l’alcool, et dévasté par une récente rupture amoureuse. Lors d’un concert, il croise le regard d’une fan aux intentions déguisées (interprétée par Jenna Ortega), dont la rencontre bouleversera le cours de sa vie.

À la croisée d’un thriller et d’un documentaire, le long-métrage réalisé par l’Américain Trey Edward Shults sème le doute. On y voit The Weeknd, interprétant son propre rôle et performant les chansons de son dernier disque. Ses titres rythment d’ailleurs les scènes avec brio et façonnent une ambiance immersive et galvanisante – portant parfois plus le film que les acteurs eux-mêmes. Si son jeu n’est pas parfait, le chanteur canadien parvient néanmoins à convaincre. Aux côtés des talentueux acteurs Jenna Ortega et Barry Keoghan (un casting annonçant déjà l’ambiance sombre du projet), il reste crédible malgré une histoire dont on perd, parfois, le fil.

Un projet entre le thriller et le documentaire

Ce projet ambitieux, promettant de rencontrer un large succès auprès de ses fans qui y retrouveront toute l’esthétique de l’artiste, risque néanmoins de se heurter à la critique. Depuis la sortie de la série The Idol avec Lily-Rose Depp en 2023, The Weeknd était en effet attendu au tournant. Producteur et acteur de ces cinq épisodes sulfureux et dérangeants, il s’était alors confronté à une réception plus que mitigée. Au sein de laquelle on lui reprochait notamment l’hypersexualisation des actrices et une accumulation de clichés peu séduisants.

Mais cette production HBO n’avait alors aucun lien avec sa carrière musicale. À contrario de ce nouveau (et premier) film Hurry Up Tomorrow, annoncé comme le chapitre final de son album éponyme. Mais ce long-métrage semble également signer une nouvelle ère pour l’artiste : après sa sortie, il abandonnerait son nom de scène The Weeknd pour adopter ses vrais nom et prénom, Abel Tesfaye. C’est d’ailleurs ainsi qu’il est crédité sur l’affiche comme dans le générique. Une sorte de renouveau pour le chanteur et musicien, qui se dévoilerait donc au grand jour.

Jenna Ortega en fan absolue (et dérangée) de The Weeknd

Au sein de ce long-métrage, on découvre les failles – à la fois fictives et réelles – de l’artiste. De sa routine avant de monter sur scène aux vices des soirées démesurées post-show, on le suit en train de s’enfoncer dans les affres de sa vie de rockstar. Dont il est, du début à la fin, le centre. S’il se veut instrospectif, le film façonne en réalité maladroitement un égotrip sous-couvert de réfléxion artistique. Au fil de discussions entre le personnage malveillant et torturé joué par Jenna Ortega, on comprend les inspirations et les aspirations de The Weeknd derrière certains de ses titres les plus connus.

Fan de la première heure, elle lui déroule en effet ses interprétations des paroles de Blinding Lights (2023), et à quel point sa musique l’a aidée à surmonter des épreuves de sa vie. Elle essaie d’ailleurs de lui faire admettre sa part de toxicité dans les relations amoureuses du chanteur. Dont les références ne sont pas sans rappeler ses couples hyper-médiatisés avec la mannequin Bella Hadid ou la star Selena Gomez…

Des images envoûtantes et fidèles à l’esthétique du chanteur

Bref, caché derrière la prétendue part de fiction qu’impose un long-métrage, on ne sait jamais vraiment si The Weeknd (qui incarne donc sa propre personne) tente de comprendre sa vie et sa carrière ou s’il se met en scène en chanteur torturé et rongé par sa célébrité et la solitude qu’elle induit. Les prises de vues de la fin, en proie aux flammes et portée par le dernier morceau émouvant de son disque (et qui lui donne son titre), laissent sous-entendre une renaissance… Laissant derrière lui les cendres de sa vie passée.

On se laisse néanmoins facilement emporter dans les images sombres et illuminées de lumières artificielles. Semblable à l’atmopshère des clips de l’artiste, le film Hurry Up Tomorrow nous envoûte par son ambiance rétro-moderniste. Mais aussi, et surtout, par la bande-son uniquement composée des morceaux du dernier et excellent album de The Weeknd, qui s’avère aussi efficace dans nos oreilles que pour rythmer des productions hollywoodiennes.

Hurry Up Tomorrow (2025) de Trey Edward Shults, actuellement au cinéma.