Le film L’Amour ouf peut-il triompher aux César 2025 ?

par Violaine Schütz, 

et Nathan Merchadier.

En octobre 2004, l’acteur Gilles Lellouche passait pour la première fois de l’autre côté de la caméra en dévoilant Narco, son premier film en tant que réalisateur. Vingt ans plus tard, et après la bonne réception des critiques et du public de son second long-métrage Le Grand Bain (2018) – véritable succès commercial comptabilisant 4,2 millions d’entrées – il a présenté – avec un accueil mitigé – son ambitieux film L’Amour ouf au dernier Festival de Cannes.

Sorti au cinéma en octobre 2024, le long-métrage a été vu par plus de 4,9 millions de spectateurs et cumule plusieurs nominations aux César qui auront lieu le 28 février 2025. Retour sur nos impressions sur l’un des plus gros succès du cinéma français récents qui pourrait rafler plusieurs statuettes.

L’Amour ouf de Gilles Lellouche en compétition au Festival de Cannes et aux César

Inspiré d’un roman publié par l’écrivain irlandais Neville Thompson en 2000, le nouveau long-métrage de Gilles Lellouche raconte une histoire d’amour sur fond de trafic de drogue et de petits larcins entre un bandit, interprété par le charismatique François Civil et sa fiancée délurée, campée par l’excellente Adèle Exarchopoulos. Et dans leurs versions adolescentes, par deux révélations fracassantes : Mallaury Wanecque et Malik Frikah.

Le pitch de cette fresque qui court sur plusieurs décennies ? “Les années 80, dans le nord de la France. Jackie et Clotaire grandissent entre les bancs du lycée et les docks du port. Elle étudie, il traine. Et puis leurs destins se croisent et c’est l’amour fou. La vie s’efforcera de les séparer mais rien n’y fait, ces deux-là sont comme les deux ventricules du même cœur…”

Une grande alchimie entre Adèle Exarchopoulos et François Civil

Déjà aperçus en binôme dans le film Bac Nord (2020), les deux acteurs en vogue François Civil et Adèle Exarchopoulos sont la première raison qui justifie de voir le film. Leur alchimie est bluffante, et elle emporte tout son passage.

Ils sont entourés d’un casting impeccable puisque l’on retrouve au générique de L’Amour ouf un grand nombre d’acteurs phares du cinéma français : Alain Chabat (très touchant dans le rôle du père de Jackie), Benoît Poelvoorde, Vincent Lacoste (étonnant en entrepreneur violent), Jean-Pascal Zadi, Élodie Bouchez, Karim Leklou, Raphaël Quenard ou encore Anthony Bajon. Cette liste de talents semble presque too much. Mais le trop plein est justement l’épicentre du projet de Gilles Lellouche, qui s’avère aussi démesuré que fiévreux et ultra sincère.

Entre le film de gangsters et la rom com

Mais le casting n’est pas la seule réussite de Gilles Lellouche. Loin d’un cinéma français épuré et naturaliste, l’acteur ose tout dans L’Amour ouf. Avec, parfois même, une maladresse touchante mais aussi beaucoup de bravoure, il croise les genres cinématographiques pour accoucher d’un objet hybride.

Il y a de la comédie musicale, du thriller, du film de gangsters ou et de la rom com dans ce projet aussi romantique qu’ultra violent. “C’est un teenage movie, un film d’amour,” dit son réalisateur.

Tourné en partie à Marseille et dans le Nord (Dunkerque, Lille), le long-métrage lyrique ne laisse pas de marbre avec ses parti pris forts, notamment une scène de danse stupéfiante, chorégraphiée par le collectif (La)Horde, sur du The Cure.

Un film touchant qui célèbre les amoureux de l’amour

La BO est d’ailleurs l’un des grands points forts du film, nous plongeant dans le passé grâce à des tubes de Prince, Billy Idol et Alphaville et d’autres grands noms de la pop.

Avec une durée de près de trois heures et un budget de plus de 30 millions d’euros, L’Amour ouf est sans doute l’un des films français les plus ambitieux de l’année, avec Emilia Perez. On pense même à Quentin Tarantino, à Coup de cœur (1982) de Francis Ford Coppola et à West Side Story.

L’amour et la violence selon Gilles Lellouche

Gilles Lellouche, qui fait preuve d’un enthousiasme prodigieux et d’une générosité flamboyante (même s’il s’avère parfois maladroit lorsqu’il faut trop usage de la violence), aurait eu l’idée de ce film il y a plus de 17 ans… Et c’est des années en arrière que nous renvoie le long-métrage. On ressent en le voyant les mêmes palpitations que lorsqu’on a vu True Romance (1993), Sailor et Lula (1990) et Romeo + Juliette (1997). Et les mêmes papillons dans le coeur que la toute première fois que l’on est tombé follement amoureux, au collègue.

Et que ce garçon au premier rang de la salle de classe ne nous regardait même pas… On avait alors tagué son nom sur un mur. Avec ce film, Gilles Lellouche rend hommage aux amoureux de l’amour, à qui se lancent dans une passion de manière frondeuse et aiment comme des fous, sans jamais penser aux conséquences, souvent désastreuses. Car, comme le chantaient les Rita Mitsouko, les histoires d’amour finissent mal en général…

L’Amour ouf (2024) de Gilles Lellouche, avec Adèle Exarchopoulos et François Civil, actuellement au cinéma.