4 jan 2018

5 choses à savoir sur Gary Oldman, le caméléon du cinéma à l’affiche des Heures Sombres

À 59 ans et six ans après La Taupe, sa transformation et son interprétation époustouflante de Winston Churchill dans Les Heures Sombres de Joe Wright viennent compléter une galerie de personnages protéiformes déjà bien remplie. Retour en 5 points sur les performances d'un acteur qui fait consensus.

1 – Un acteur de théâtre remarqué au cinéma.

 

Passer de la vente d’équipements sportifs aux scènes des plus grands théâtres du Royaume-Uni, tel était le pari de Gary Oldman. Le jeune homme grandit dans le sud-est de Londres dans les années 1960 et intègre une école de théâtre destinée aux jeunes de son quartier. S’il y apprend les rudiments du jeu, Gary Oldman voit plus grand. Il tente alors d’intégrer la Royal Academy of Dramatic Art, l’un des plus grands établissements d’art dramatique du Royaume-Uni, sa candidature est refusée. Persévérant, Gary Oldman obtient finalement son diplôme au Rose Brudford College puis rejoint le Royal Theatre de York à l’âge de 21 ans. Très vite, il se crée sa petite réputation en évoluant avec aisance dans tous les répertoires.

 

 

Dès qu’il fallait jouer un personnage historique, on venait me voir. J’étais le biokid.

 

 

Sacré “jeune espoir prometteur” par le magazine Time Out en 1985, il obtient la récompense de “meilleur acteur de théâtre” (et la partage avec Anthony Hopkins) pour son rôle dans Les noces du pape, pièce écrite en 1962 par le dramaturge Edward Bond. Le monde du cinéma lui ouvre alors ses portes et après deux apparitions mineures, Gary Oldman décroche son premier rôle titre à 28 ans dans Sid et Nancy (1986), drame biographique d’Alex Cox. Il y incarne Sid Vicious, bassiste toxicomane sulfureux et figure indétrônable des Sex Pistols épris de sa belliqueuse groupie Nancy. Salué par la critique, Gary Oldman enchaîne dans la foulée avec Prick Up Your Ears dans lequel il campe l’écrivain Joe Orton assassiné par son amant alors qu’il est à son apogée. Les cinéastes lui font de l’œil, Oldman change de dimension : “Dès qu’il fallait jouer un personnage historique, on venait me voir. J’étais le biokid” confie l’acteur.

 

 

 

2 – Un transformiste

 

Nouvelle coqueluche des réalisateurs, Gary Oldman frappe par ses performances dignes d’un transformiste. Tantôt Lee Harvey Oswald, assassin de John Fitzgerald Kennedy (1992), tantôt Ludwig Van Beethoven (1995) chacun retient surtout son incroyable prestation dans le Dracula de Coppola en 1993. Allant jusqu'à terroriser Wynona Ryder pendant le tournage, l’acteur s’interroge toutefois sur la façon dont il doit préparer son personnage. Alors que certains déambulent en costume ou perfectionnent leur posture à cheval, lui apostrophe son réalisateur et lui demande “Que dois-je faire ? J'ai 400 ans et je suis supposé être mort !”. La question restera sans réponse, Gary Oldman devra composer seul, inspiré par le Nosferatu de 1922 et se satisfaire d’une allergie au latex récoltée après un changement de costume. Véritable caméléon, le Britannique devient alors un homme sans visage dans le Hannibal de Ridley Scott. Ancien patient pédophile de Lecter (Anthony Hopkins), Mason Verger a été défiguré par son médecin et laissé pour mort. Entre prothèse et maquillage, peu importe à Gary Oldman que l’on puisse le reconnaître.

 

 

“Sur le tournage, il impressionne avec ses multiples improvisations : un jour il se met à hurler sa réplique surprenant tous les acteurs et s’écartant du script”

Gary Oldman en Norman Stansfield dans “Léon” de Luc Besson

3 – La pièce fétiche de Luc Besson

 

Sa rencontre avec le réalisateur français Luc Besson se solde par deux films : Léon (1994) et Le 5e élément (1997). Dans le premier, Gary Oldman campe Norman Stansfield, flic ripou incontrôlable, et confirme sa capacité à incarner des personnages peu recommandables. Sur le tournage, il impressionne avec ses multiples improvisations : un jour il interroge le père de Mathilda (Nathalie Portman) à quelques centimètres de son visage un autre il se met à hurler sa réplique “Amenez-moi tout le monde” surprenant tous les acteurs et s’écartant du script: “Si vous jouez quelques chose comme Léon… , d’abord c’est un peu du dessin animé, c’est plus grand que nature. On peut y prendre du plaisir, être content d’aller au travail pour jouer ce personnage. Il y a cette scène très connue chez les fans : je hurle alors que je parlais doucement. C’était une plaisanterie pour amuser Luc, pour une prise.”. Trois ans plus tard, Gary Oldman participe au long-métrage Le 5e élément, fortement inspiré de l’œuvre du dessinateur Mœbius, pour remercier Besson d’avoir financé Nil by Mouth, un film que l’acteur avait lui même écrit et réalisé. Son personnage culte et délirant lui vaut les louages des critiques mais également du grand public.

Gary Oldman en Sirius Black dans “Harry Potter et l’Ordre du Phenix” de David Yates

4- Un génie du second rôle

 

Gary Oldman frappe par sa capacité à illuminer les second rôles, parmi eux, on retient deux personnages issus de grandes sagas du cinéma : la trilogie Batman de Christopher Nolan et la saga Harry Potter pour laquelle il tourne trois épisodes et effectue un caméo dans le dernier. Aux côtés de Nolan, il rafle le rôle du l’illustre Commissaire Gordon à Dennis Quaid, il sera récompensé d’un People's Choice Awards pour son intéreprétation du flic téméraire de Gotham City. En ce qui concerne l’autre saga, Gary Oldan prend part à la grande aventure Harry Potter en endossant le costume de Sirius Black oncle du héros et personnage favoris des fans de la saga. 

 

 

Ce n’était pas l’angle psychologique ou intellectuel qui me freinait, mais la performance physique.”

Gary Oldman en Winston Churchill dans “Les Heures Sombres” de Joe Wright

5- Un Oscar pour Churchill ?

 

En 2012, Gary Oldman manque de peu la consécration aux Oscars. Le film d’espionnage La Taupe de Tomas Alfredson – adaptation du roman Tinker, Tailor, Soldier, Spy de John Le Carré – lui vaut d’être nommé dans la catégorie “Meilleur acteur” mais c’est finalement un français qui décroche le précieux sésame, Jean Dujardin bluffe le jury avec The Artist. Alors que John Hurt est pressenti à l’origine, Gary Oldman construit son personnage à partir d’une citation du roman : "George ressemble à un rapide (…) Il baisse sa température jusqu'à ce qu'elle soit la même que la pièce dans laquelle il est. Ensuite il ne perd pas de chaleur en s'adaptant". En ce début d’année 2018, c’est une nouvelle prouesse que l’acteur britannique réalise, un rôle à Oscars qui a nécéssité une préparation minutieuse. L’acteur interprète Winston Churchill Premier Ministre du Royaume-Uni lors de la Seconde Guerre Mondiale. Chapeaux issus de la boutique la plus ancienne du monde, costumes conçus par un tailleur londonien, cigares de la marque cubanodominicaine Cohiba et montre à gousset Breguet, le long-métrage de Joe Whright est placé sous le signe de l’authenticité. Exercices vocaux, transformation physique et appel à Kazuhiro Tsuji, un expert du maquillage, Gary Oldman justifie cette métamorphose comme une simple nécessité : “Ce n’était pas l’angle psychologique ou intellectuel qui me freinait, mais la performance physique. Je n’ai pas à vous expliquer : regardez-le et regardez-moi…” confie-t-il au micro de France Inter. Sous bien des aspects Gary Oldman mérite une récompense pour sa longue carrière, un coffre dans lequel chacun peut plonger la main et mélanger toute une galerie de personnages protéiformes.

 

Les Heures Sombres de Joe Wright, actuellement au cinéma.

Portrait par Mikael Jansson.