22 oct 2021

Qui est l’artiste Boris Kurdi, 22e lauréat du prix de la Fondation Pernod Ricard ?

Hier soir, en clôture de la semaine de l’art à Paris, la Fondation Pernod Ricard dévoilait dans son nouvel espace inauguré il y a quelques mois le 22e lauréat de son prix annuel récompensant un jeune artiste de la scène française. Remarqué pour ses dessins ultra précis dépeignant les travers de notre société avec légèreté, Boris Kurdi rejoint ainsi pour cette édition la liste prestigieuse des gagnants de cette récompense depuis 1999, tels que Tatiana Trouvé et Clément Cogitore.

La semaine de l’art à Paris aura été riche en surprises et en découvertes. Alors que se ressent l’excitation de la reprise des événements culturels, à la FIAC comme dans les musées de la capitale ou d’autres foires telles qu’Asia Now et Paris Internationale, plusieurs artistes connaissent cette semaine une consécration institutionnelle à travers les multiples récompenses alignées en cette fin octobre. Après le prix Marcel Duchamp, décerné ce lundi à Lili Reynaud Dewar, la Bourse Révélations Émerige, revenue mardi au jeune peintre Hugo Capron, ou encore le Grand Prix du Salon de Montrouge, dont Lívia Melzi fut annoncée nouvelle lauréate jeudi, le prix de la Fondation Pernod Ricard clôturait la semaine hier soir, récompensant comme à son habitude un jeune talent de la scène artistique française âgé de moins de quarante ans. Parmi les neuf finalistes de cette 22e édition du prix, où l’on trouvait entre autres Tarek Lakhrissi, Gina Folly et Carlotta Bailly-Borg, le choix du jury s’est finalement porté sur l’artiste Boris Kurdi. Le Français se joint ainsi à la liste prestigieuse de lauréats dressée par la fondation depuis 1999, composée d’artistes tels que Tatiana Trouvé, Mircea Cantor, Clément Cogitore ou encore Marcos Avila Forero, heureux élu de la dernière édition présentée en 2019.

 

À 31 ans, l’artiste basé à Paris se fait remarquer depuis plusieurs années pour son approche énigmatique et ultra-précise du dessin. Résident de la Drawing Factory ces derniers mois, le jeune homme y réalise des œuvres graphiques où l’univers enfantin se mêle à celui des adultes, où l’iconographie de l’imaginaire rencontre celle de la signalétique ou de la publicité, établissant un double langage graphique grinçant où des problématiques actuelles se muent en allégories presque sympathiques. Des lettres en majuscule se recouvrent de poils colorés, des pièces de deux euros s’embrasent ou bien se parent d’un sourire sardonique, tandis que des yeux menaçants percent une fenêtre de leurs rayons destructeurs… Ancien étudiant en philosophie et en civilisation germanique, l’artiste reprend de nombreux concepts théoriques dans son travail autant qu’il y insère des commentaires sur la société et la politique, comme sur la corruption dans le monde de la finance. Sous ses traits au crayon ou au graphite, ces thématiques prennent des formes à la fois douces et extrêmement précises et se mêlent aux diverses textures de leurs supports – gaufrés, hachurés ou encore nervurés – pour leur donner un relief particulier.

Vue de l’installation de Boris Kurdi dans l’exposition “Bonaventure” à la Fondation Pernod Ricard (2021). Photo : Thomas Lannes

À la Fondation Pernod Ricard, aux côtés des œuvres des huit autres finalistes réunies jusqu’au 30 octobre par la commissaire Lilou Vidal, Boris Kurdi présente une installation composée d’une sculpture au sol et d’un large dessin au mur. En forme de chiffre 1, son volume géométrique et réfléchissant fait référence au numéro originel autant qu’à celui du vainqueur, et rappelle formellement les œuvres des grands noms du minimalisme américain comme Tony Smith. Ici toutefois, cette apparence rigide et froide s’anime avec le dessin auquel elle fait face : au fil de cinq fonds colorés, une taupe creuse son terrier de droite à gauche, comme enfermée par le cadre de ce polyptyque. Grâce au prix de la Fondation Pernod Ricard, l’artiste recevra la somme de 15 000 euros pour développer un projet personnel à l’étranger et verra l’une de ses œuvres rejoindre les collections du Centre Pompidou. Un accompagnement qui rappelle l’une des missions principales de la fondation, que résumait hier son président Alexandre Ricard : “l’art n’a de sens que s’il est partagé.”

 

 

Le travail de Boris Kurdi est à voir aux côtés de celui des huit autres finalistes dans l’exposition « Bonaventure (Trafiquer les mondes)”, jusqu’au 30 octobre à la Fondation Pernod Ricard, Paris 8e.

Vue de l’installation de Boris Kurdi dans l’exposition “Bonaventure” à la Fondation Pernod Ricard (2021). Photo : Thomas Lannes