Photojournalist Mary Ellen Mark in 5 cult images
La maison d’édition Steidl consacre un très beau livre à la photojournaliste américaine Mary Ellen Mark (1940-2015), qui travailla longtemps pour la prestigieuse agence Magnum, sondant les recoins les plus secrets de la société, des chambres des prostituées à Bombay aux réunions de Ku Klux Klan, en passant par le plateau de tournage d’“Apocalypse Now”. 600 de ses meilleurs clichés sont à retrouver dans “The Book of Everything”, édité par le propre mari de la photographe. Des images crues, souvent provocantes, dont Numéro vous raconte l’histoire.
By Alexis Thibault.
D’aucuns diront que Mary Ellen Mark est la digne héritière de la photographe américaine Dorothea Lange. À cette différence près que la native de Philadelphie n’a jamais versé dans la photographie de guerre, préférant s’écarter des bombes pour documenter une réalité tout aussi sombre. Ainisi, elle suit les toxicomanes qui abreuvent les rues américaines, participe aux terribles réunions du Ku Klux Klan – mais capte paradoxalement l’infinie tendresse de certains membres, et partage le quotidien harassant des prostituées de Bombay qu’elle ira jusqu’à immortaliser parfois en plein coït…
Née en 1940 à Philadelphie, Mary Ellen Mark profite d’une bourse au sortir de ses études d’art et de photographie à l’université de Pennsylvanie, puis parcourt le monde avant de poser ses valises à New York. L’image, elle a ça dans le sang. Elle avait neuf ans lorsqu’elle a pris sa première photo. En 1977, elle intègre la célèbre agence Magnum et sera couronnée au fil de sa vie de nombreuses distinctions, dont l’Infinity Award du photojournalisme en 1997. Passionnée de cinéma, cette femme aux airs de hippie arpente souvent les lieux de tournages, invitée par Truffaut, Fellini ou Coppola : elle signe notamment un somptueux portrait de Marlon Brandon en Walter E. Kurtz, colonel sanguinaire du film Apocalypse Now [1979]. Alors que la maison d’édition Steidl réunit près de 600 clichés de Mary Ellen Mark dans l’ouvrage “The Book of Everything”, focus sur cinq images cultes de la photographe.
1. Un couple qui s’embrasse et un drapeau des États-Unis.
En octobre 1968, Mary Ellen Mark rejoint la foule qui se presse dans les rues new-yorkaises lors d’une manifestation de soutien à la guerre du Vietnam. Ce jour-là, près de 25 000 personnes s’accaparent les rues, considérant encore ce conflit comme une cause juste et nécessaire. Pourtant, l’année 1968 sera justement un moment clé dans le retournement de l’opinion publique : jusqu’alors, la plupart des médias audiovisuels américains étaient plutôt en faveur de la guerre. C’est notamment le cas du magazine Life, principal employeur de Mary Ellen Mark, qui changera son fusil d’épaule. Le baiser immortalisé par la photographe fait forcément écho à celui de Times Square, saisi par le photographe Alfred Eisenstaedt le 14 août 1945, lors de la célébration de la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
D’aucuns diront que Mary Ellen Mark est la digne héritière de la photographe américaine Dorothea Lange. À cette différence près que la native de Philadelphie n’a jamais versé dans la photographie de guerre, préférant s’écarter des bombes pour documenter une réalité tout aussi sombre. Ainisi, elle suit les toxicomanes qui abreuvent les rues américaines, participe aux terribles réunions du Ku Klux Klan – mais capte paradoxalement l’infinie tendresse de certains membres, et partage le quotidien harassant des prostituées de Bombay qu’elle ira jusqu’à immortaliser parfois en plein coït…
Née en 1940 à Philadelphie, Mary Ellen Mark profite d’une bourse au sortir de ses études d’art et de photographie à l’université de Pennsylvanie, puis parcourt le monde avant de poser ses valises à New York. L’image, elle a ça dans le sang. Elle avait neuf ans lorsqu’elle a pris sa première photo. En 1977, elle intègre la célèbre agence Magnum et sera couronnée au fil de sa vie de nombreuses distinctions, dont l’Infinity Award du photojournalisme en 1997. Passionnée de cinéma, cette femme aux airs de hippie arpente souvent les lieux de tournages, invitée par Truffaut, Fellini ou Coppola : elle signe notamment un somptueux portrait de Marlon Brandon en Walter E. Kurtz, colonel sanguinaire du film Apocalypse Now [1979]. Alors que la maison d’édition Steidl réunit près de 600 clichés de Mary Ellen Mark dans l’ouvrage “The Book of Everything”, focus sur cinq images cultes de la photographe.
1. Un couple qui s’embrasse et un drapeau des États-Unis.
En octobre 1968, Mary Ellen Mark rejoint la foule qui se presse dans les rues new-yorkaises lors d’une manifestation de soutien à la guerre du Vietnam. Ce jour-là, près de 25 000 personnes s’accaparent les rues, considérant encore ce conflit comme une cause juste et nécessaire. Pourtant, l’année 1968 sera justement un moment clé dans le retournement de l’opinion publique : jusqu’alors, la plupart des médias audiovisuels américains étaient plutôt en faveur de la guerre. C’est notamment le cas du magazine Life, principal employeur de Mary Ellen Mark, qui changera son fusil d’épaule. Le baiser immortalisé par la photographe fait forcément écho à celui de Times Square, saisi par le photographe Alfred Eisenstaedt le 14 août 1945, lors de la célébration de la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
2. Laurie dans sa baignoire.
En 1976, pour les besoins d’un reportage, Mary Ellen Mark s’installe pendant deux mois dans l’hôpital psychiatrique de Salem, dans l’Oregon. Elle rejoint le quartier sécurisé et immortalise l’angoisse des femmes pensionnaires, notamment le visage de Laurie, à la surface de son bain de mousse. Plus tard, la photographe réunira tous ses clichés dans l’ouvrage Ward 81 [1979]. Et si les cinéphiles reconnaissent les lieux, c’est parce qu’un an auparavant, l’hôpital a servi de décor au long-métrage de Miloš Forman Vol au-dessus d’un nid de coucou [1975].
2. Laurie dans sa baignoire.
En 1976, pour les besoins d’un reportage, Mary Ellen Mark s’installe pendant deux mois dans l’hôpital psychiatrique de Salem, dans l’Oregon. Elle rejoint le quartier sécurisé et immortalise l’angoisse des femmes pensionnaires, notamment le visage de Laurie, à la surface de son bain de mousse. Plus tard, la photographe réunira tous ses clichés dans l’ouvrage Ward 81 [1979]. Et si les cinéphiles reconnaissent les lieux, c’est parce qu’un an auparavant, l’hôpital a servi de décor au long-métrage de Miloš Forman Vol au-dessus d’un nid de coucou [1975].
3. Deux gosses et une arme.
Cette image est le fruit du long travail initié par Mary Ellen Mark en 1983 pour le compte du magazine Life : suivre les fugueurs et, plus largement, les enfants des rues. Parmi eux, Erin Blackwell, fillette prostituée surnommée Tiny, dont l’enfance dérobée fut offerte très tôt aux ruelles de Seattle. Pendant trente ans, la photographe suivra celle dont le regard ne reflétera jamais l’âge : “Je m’intéresse à la réalité, je m’intéresse à la survie, expliquait-elle, je m’intéresse à ceux qui n’ont pas eu de chance et je raconte leur histoire.” Quant à Rat et Mike, les deux gosses avec une arme, ils étaient simplement… là. “Ils faisaient partie du décor, confia Mary Ellen Mark au magazine Snatch, d’un coup ils apparaissent devant vous et c’est pour cette raison que vous les choisissez.”
3. Deux gosses et une arme.
Cette image est le fruit du long travail initié par Mary Ellen Mark en 1983 pour le compte du magazine Life : suivre les fugueurs et, plus largement, les enfants des rues. Parmi eux, Erin Blackwell, fillette prostituée surnommée Tiny, dont l’enfance dérobée fut offerte très tôt aux ruelles de Seattle. Pendant trente ans, la photographe suivra celle dont le regard ne reflétera jamais l’âge : “Je m’intéresse à la réalité, je m’intéresse à la survie, expliquait-elle, je m’intéresse à ceux qui n’ont pas eu de chance et je raconte leur histoire.” Quant à Rat et Mike, les deux gosses avec une arme, ils étaient simplement… là. “Ils faisaient partie du décor, confia Mary Ellen Mark au magazine Snatch, d’un coup ils apparaissent devant vous et c’est pour cette raison que vous les choisissez.”
4. Une famille ordinaire…
Ici, il convient de se focaliser sur le cadre atypique de l’image : un carré qui enferme les protagonistes du cliché, déjà incarcérés dans l’automobile qui leur sert de foyer. Cette famille qui transpire la peine et le désespoir, c’est la famille Damm, photographiée en 1987 par Mary Ellen Mark, qui, en parfaite photojournaliste, cherche toujours a capturer les choses “telles qu’elles sont”. Nouvelle commande du magazine Life, cette image présente une famille sans domicile fixe en quête de reconnaissance, qui a donc accepté que la photographe la suive partout pendant plusieurs jours. L’Américaine les prend au mot : elle débarque dans le motel où ils ont trouvé refuge en Californie à 4h du matin…
4. Une famille ordinaire…
Ici, il convient de se focaliser sur le cadre atypique de l’image : un carré qui enferme les protagonistes du cliché, déjà incarcérés dans l’automobile qui leur sert de foyer. Cette famille qui transpire la peine et le désespoir, c’est la famille Damm, photographiée en 1987 par Mary Ellen Mark, qui, en parfaite photojournaliste, cherche toujours a capturer les choses “telles qu’elles sont”. Nouvelle commande du magazine Life, cette image présente une famille sans domicile fixe en quête de reconnaissance, qui a donc accepté que la photographe la suive partout pendant plusieurs jours. L’Américaine les prend au mot : elle débarque dans le motel où ils ont trouvé refuge en Californie à 4h du matin…
5. Les petites filles, la cigarette et la piscine.
Mary Ellen Mark a toujours photographié à l’argentique, fascinée par le film, les tirages et le noir et blanc. On notera une ou deux infidélités pour rejoindre le Polaroid… Avec le temps, elle se désintéresse des magazines dont les publications sont trop uniformes, trop retouchées, trop artificielles. Mais en 1990, elle signe un nouveau portrait grand angle pour Life au sujet des enfants à problèmes : à droite, Amanda, fillette de neuf ans, cigarette à la main et fumée dans la bouche. Selon la photographe, elle est “adorable”.
Mary Ellen Mark: The Book of Everything. Steidl.
Edited by Martin Bell, 880 pages, 624 images.
5. Les petites filles, la cigarette et la piscine.
Mary Ellen Mark a toujours photographié à l’argentique, fascinée par le film, les tirages et le noir et blanc. On notera une ou deux infidélités pour rejoindre le Polaroid… Avec le temps, elle se désintéresse des magazines dont les publications sont trop uniformes, trop retouchées, trop artificielles. Mais en 1990, elle signe un nouveau portrait grand angle pour Life au sujet des enfants à problèmes : à droite, Amanda, fillette de neuf ans, cigarette à la main et fumée dans la bouche. Selon la photographe, elle est “adorable”.
Mary Ellen Mark: The Book of Everything. Steidl.
Edited by Martin Bell, 880 pages, 624 images.