À la Galerie Marian Goodman, Daniel Boyd réécrit l’histoire en petits points
Pour sa première exposition personnelle en France, l’artiste australien Daniel Boyd dévoile à la Galerie Marian Goodman une quinzaine d’œuvres, dont des peintures et une grande installation, réalisées grâce à sa technique signature : des myriades de petits points.
Par Maïlys Celeux-Lanval.
Daniel Boyd : l’exposition d’un virtuose du point à la Galerie Marian Goodman
Il travaille en musique, accompagné du saxophone de John Coltrane ou de la poésie du rappeur Saul Williams. Imprégné de ses lectures du philosophe martiniquais Édouard Glissant comme de ses réflexions sur l’héritage de l’impérialisme et du colonialisme australiens, Daniel Boyd (né en 1982), originaire du Queensland en Australie, peint désormais dans un atelier proche de Sydney.
Nourries de ses multiples ascendances (si l’on veut être précis : kudjala, ghungalu, wangerriburra, wakka wakka, gubbi gubbi, kuku yalanji, bundjalung et yuggera), ses œuvres se parent de milliers de petits points – des “lenses”, dit-il, ou “lentilles”, qui vont de pair avec une intéressante réflexion sur le regard.
Car Daniel Boyd entend questionner les canons artistiques, occidentaux comme aborigènes, qui interfèrent, se mêlent, s’échangent. Il travaille à partir de sources variées, des photographies historiques, des œuvres célèbres, des symboles, mais aussi des paysages chers à son cœur, et des visages, connus ou anonymes.
La première exposition de l’artiste australien en France
À peine quelques mois après l’avoir mis en avant dans son antenne new-yorkaise, la Galerie Marian Goodman – qui le représente officiellement depuis – lui offre cet automne sa toute première exposition monographique en France. L’accrochage réunit quinze œuvres datées des deux dernières années, laissant apparaître différents portraits (André Breton, le joueur de basket-ball Magic Johnson) et silhouettes de figures phares de l’histoire de l’art (l’Apollon du Belvédère), mais aussi un paysage poignant, celui de la crique d’où est originaire sa grand-mère.
L’artiste investit également le rez-de-chaussée de la galerie avec une grande installation couvrant les fenêtres de vinyle noir percé de milliers de petits trous ronds. Un écho aux lenses de ses œuvres peintes, cosmos mirifique et vertigineux qui plonge la grande salle dans une obscurité changeante, poétique, vibrant au fil des heures
Ce projet monumental fait écho au “droit à l’opacité” d’Édouard Glissant, et témoigne de la volonté de Daniel Boyd de s’inscrire dans une architecture, autrement dit dans un déjà-là, un patrimoine, et d’y faire venir ses origines métissées, son parcours, sa famille, ses territoires, comme ses références, sa culture mondialisée. Essentiellement montrée en Australie, son œuvre a récemment fait l’objet d’un éclairage important à Berlin, au Gropius Bau, où l’artiste s’était emparé de l’espace avec une installation similaire à ce qu’il propose chez Marian Goodman.
“Daniel Boyd. Dream Time”, jusqu’au 21 décembre à la Galerie Marian Goodman, Paris 3e.