PAD London : visite guidée du salon incontournable du design
Jusqu’au dimanche 13 octobre 2024, le Berkeley Square accueille comme chaque année la grande tente du PAD London, salon incontournable du design. Au programme de cette 16e édition, 62 galeries issues de 16 pays (dont 12 primo-exposants) et un parcours riche en découvertes contemporaines et en trésors historiques. Visite guidée.
Par Camille Bois-Martin.
De Giacometti à Schlesinger, les lauréats du PAD London 2024
62 galeries présentes issues de 25 pays différents, dont 12 nouvelles arrivantes… Pour sa 16e édition, le PAD London réunit une fois de plus des pointures du design moderne comme contemporain, entre mobilier, céramiques, luminaires, bijoux et autres décorations fascinantes. Un parcours qui s’enrichit comme chaque année de trois prix décernés par un jury d’experts : Prix du design contemporain, Prix historique et Prix du stand.
Cette année, le premier lauréat accueille le visiteur dès l’entrée du salon : un plâtre de 1938 signé Alberto Giacometti (1901-1966), accroché sur les cimaises de la galerie Jacques Lacoste. Récompensé du Prix historique, la sculpture immaculée tranche au sein de la décoration boisée du stand et brille par sa rareté. Extraite pour la première fois de l’appartement parisien pour lequel la pièce avait été réalisée à l’origine, celle-ci trône au dessus d’un meuble de Jean-Michel Frank (1895-1941), ami designer de l’artiste suisse renommé qui lui en avait fait la commande.
Quelques pas plus loin, un autre objet se distingue, signalé par l’autocollant Prix du design contemporain : un vase en grès émaillé de l’Américain Peter Schlesinger (né en 1948). Après s’être essayé à la peinture puis à la photographie, l’artiste – également muse et compagnon du célèbre peintre David Hockney – s’installe à New York dans les années 80 et s’initie à la céramique, qu’il pratique encore aujourd’hui, à plus de 70 ans. Puisant dans les motifs de la culture aztèque pour imaginer des formes fantaisistes (des yeux, des nuages), ses larges vases se déploient sur le stand de la galerie Tristan Hoare comme autant de trésors d’archéologie contemporaine.
Perriand, Jeanneret : les incontournables du stand de la galerie Downtown
Installée dans les couloirs de l’allée principale, la présentation de la Galerie Downton de François Laffanour, récompensée du Prix du stand, regorge de nombreuses trouvailles. Charlotte Perriand, Richard Texier, Erwin Olaf… “L’idée de ce stand était de montrer une communauté de pensées entre des meubles des 18 et 19e siècles, l’Art déco, et les années 50, nous confie François Laffanour. Je voulais tirer le fil d’une ligne de simplicité et de modernité, dont l’aspect luxueux ne repose par sur le matériau mais sur la création.”
Ainsi des pièces du milieu du 20e siècle signées Chareau ou Savina côtoient une chaise, une coiffeuse et un poêle créés dans les années 1750, tandis qu’une commode japonaise du 19e siècle destinée à accueillir les vêtements des samouraïs fait face à un lit de Pierre Jeanneret.
Des pièces de design ludiques, innovantes… et improbables
Si le salon londonien fait la part belle aux grandes figures du design, il offre comme chaque année l’occasion de découvrir des dizaines de créations récentes et innovantes. À commencer par celles présentées par la galerie italienne Nilufar, à quelques pas de la Galerie Downtown, dont la majeure partie de l’espace est occupé par un délicat lustre de Maximilian Marchesani.
Fabriquées à partir de branches d’arbre et de feuilles récupérées dans des parcs à Milan, les pièces de l’artiste diffusent une lumière légère, s’apparentant plus à de fragiles sculptures qu’à de réels luminaires, tout comme les sièges en cuivre de Harush Shlomo installés à côté, ou les petites tables en bronze d’Allegra Hicks, présentées par la galerie pour la première fois.
Des pièces plus esthétiques que pratiques, qui font écho notamment au stand de la galerie Maria Wettergren, grande ambassadrice du design scandinave contemporain. Sur les cimaises, une création textile de la Danoise Signe Emdal intrigue : fabriquée à partir de laine islandaise, de coton suédois et de laine Shetland, l’œuvre virevolte au gré des passages, sa touffe de poils colorés semblant inviter tout à chacun à les caresser…
Juste au dessus, un lustre du jeune artiste indien Dhruv Agarwwal suscite ce même désir tactile. Des couleurs vibrantes au vernis brillant, le luminaire façonné à partir de jouets Channapatna en bois d’ivoire convoque un imaginaire enfantin.
Le regard du visiteur se voit également happé par les stands de Peter Layton, où se déploient une multitude d’envoûtantes pièces en verre soufflé fabriquées dans les ateliers de la galerie britannique, et de la galerie Yoomoota, basée à Shanghaï. Réunissant les créations de Taras Yoom, l’espace de cette dernière plonge ses visiteurs dans un univers ludique et curieux, inspiré par la carrière de médecin de l’artiste. Tables en bois coloré emboîtées à la façon de jouets, sièges ultra-confortables inspirées par la forme de cellules blanches… Un méli-mélo un poil kitsch, qui tranche avec les scénographies sobres et épurées du PAD London.
À l’instar de celle de la Movimento Gallery. Pour la nouvelle édition du salon londonien, la galerie italienne a demandé aux designers avec qui elle collabore d’imaginer du mobilier à partir de deux matières : du bois vernis bleu marine, et du marbre de la région d’Ascoli Piceno – souvent délaissé par les industriels pour son aspect imparfait, rythmé de petits trous et de morceaux d’onyx incrustés. En résultent une série de pièces uniques assorties, qui se fondent parfaitement dans le décor rose du stand situé dans un coin retranché du PAD, semblable à une petite bulle annexe.
Courtesy of Gallery FUMI.
Courtesy of Gallery FUMI.
À quelques mètres, la galerie Fumi expose elle aussi avec brio le talent de ses designers de longue date, comme de ses nouvelles recrues. Telle Charlotte Kingsnorth, qui présente un divan en velours rose orné d’un dossier en bois et d’un étonnant pied en bronze semblable à une patte de dinosaure. Ou encore Jie Wu, qui expose une petite table en résine colorée, dans laquelle s’est glissé un morceau de bois issu des archives de son père antiquaire, collectionneur des meubles irréparables de la dynastie Ming (1368-1644).
PAD London, du 8 au 13 octobre 2024 à Berkley Square, Londres.