Quand les artistes Elmgreen & Dragset érigent une ville dans le ciel
C’est sur plafond de la Moynihan Train Hall, hub en plein cœur de Manhattan, que s’invite la nouvelle installation permanente du duo Elmgreen & Dragset. Pour ce projet baptisé “The Hive” et inauguré le 1er janvier dernier, les artistes scandinaves ont créé une ville miniature renversée inspirée de New York, dont les 91 buildings brillent de mille feux au-dessus des passants.
Par Matthieu Jacquet.
Mettre le monde sens-dessus dessous, le duo Elmgreen & Dragset en a fait sa spécialité. Que ce soit en érigeant des sculptures en forme de piscine en plein milieu de la rue, en installant une fausse boutique Prada au beau milieu d’une route texane ou en organisant une foire d’art fictive à Pékin, les artistes irrévérencieux Michael Elmgreen et Ingar Dragset prouvent combien nos repères sociaux et spatiaux sont ancrés dans notre inconscient collectif et comment un subtil décalage peut les bouleverser. Pour la rentrée 2021, le tandem scandinave en couverture du Numéro art 3 n’a pas peur de viser grand : non contents de réinterpréter des architectures individuelles, c’est désormais une ville entière que les artistes installent… au plafond.
Baptisée The Hive (“La Ruche”), cette nouvelle installation permanente a élu domicile dans l’extension de la gare new-yorkaise Pennsylvania, un hall baigné de lumière du nom de Moynihan Train Hall situé en plein cœur de Manhattan. En levant les yeux vers le ciel, les visiteurs qui y déambulent pourront découvrir un agrégat kaléidoscopique de buildings miniatures évoquant le quartier d’affaires de la métropole américaine : certains gratte-ciels sont ici directement reproduits d’après les existants, d’autres inventés par le duo, mais les 91 bâtiments qui composent la ville sont tous réalisés en métal, en verre et agrémentés de 72 000 DEL au total, grâce auxquelles ils illuminent la salle qu’ils surplombent. Si le projet semble impressionnant, Elmgreen & Dragset n’en est en réalité par à son premier coup d’essai : en 2015 déjà, le duo réalisait une installation similaire dans un centre culturel de la ville d’Aarhus, au Danemark, où des dizaines d’immeubles dorés et argentés créaient au plafond du grand hall un puits de lumière. Quatre ans plus tard fut créée City in the Sky, une sculpture traversable où une ville renversée s’intégrait cette fois-ci à la face supérieure d’un cadre parallélépipédique en acier, pour créer un ensemble nomade et immersif.
Pour cette nouvelle version réalisée en 2020, les artistes ont donc profité de la surface du plafond offerte par cet immense espace grâce à l’organisation artistique à but non lucratif Public Art Fund. Un projet ambitieux, et plus particulièrement à l’heure de la crise sanitaire. “Cette œuvre parle pour des jours plus heureux, quand nous aurons de nouveau le droit de nous rassembler, de nous croiser et de partager les mêmes espaces sans crainte, a déclaré au New York Times Andrew Cuomo, gouverneur de l’Etat de New York et annonciateur du projet. Elle promet un renouveau et une renaissance de la vie citoyenne à New York, et se tourne vers les opportunités que nous réserve l’avenir.” Inaugurée le 1er janvier dernier, The Hive peut également être découverte à travers une présentation digitale créée par la galerie Perrotin. Celle-ci met en relation l’installation avec les deux projets similaires qui l’ont précédée et nous immerge ainsi dans les villes imaginaires d’Elmgreen & Dragset dont les lumières – tout comme leurs deux auteurs – n’ont pas fini de briller.
Découvrez l’exposition d’Elmgreen & Dragset en ligne jusqu’au 18 janvier.