28 oct 2022

Les cartographies poétiques de Pietro Ruffo se déploient à la Galerie Italienne

Jusqu’au 5 novembre, Pietro Ruffo est invité par la Galerie Italienne à présenter une nouvelle exposition personnelle. Dans ses œuvres graphiques mêlant planisphères, parchemins et végétation luxuriante l’artiste italien, qui a collaboré à plusieurs reprises avec la maison Dior, interroge poétiquement l’histoire de l’humanité et son rapport à l’environnement. 

Pietro Ruffo, “The Clearest Way” (2021)

Dans le premier arrondissement de Paris, les murs de la Galerie Italienne se parent d’immenses planisphères, devenues des toiles sur lesquelles des dessins de plantes se mêlent aux tracés des continents. Au centre de cette œuvre, une percée dans le paysage laisse apparaître des éléments architecturaux où s’ajoutent coraux et plantes, dont la forme trace le contour de crânes humains. Jouant sur les superpositions et la rencontre entre éléments naturels et anthropiques, l’artiste italien Pietro Ruffo s’empare ici de documents anciens pour y faire saillir la vision poétique du monde présent. Interrogeant les imbrications entre nature et culture, celui qui a étudié l’architecture à l’université de Rome, dévoile jusqu’au 5 novembre à la Galerie Italienne ces œuvres issues d’une nouvelle série intitulée Antropocène (2021). Basées sur son travail de recherche, l’exposition s’inspire la paléoclimatologie, science qui analyse la relation entre le changement climatique et les manières d’habiter le monde. En atteste son installation la plus monumentale, encastrée dans un mur de la galerie : une végétation luxuriante se détache d’un fond orangé. Cette forêt graphique, composée de dizaines de rouleaux de parchemins alignés verticalement sur des étagères en métal noir, semble contenue dans une sorte de bibliothèque. Intitulée The Clearest Way, cette œuvre synthétise à elle seule la démarche de l’artiste né en 1978, qui propose une approche poétique et sensible de la connaissance du monde.

Vue de l’exposition “Anthropocène” de Pietro Ruffo à la Galerie Italienne

Si la question écologique occupe une place centrale dans cette nouvelle exposition, l’artiste italien engagé explore dans son travail un large panel de questions sociales et politiques. Récemment, il a travaillé toute une série d’œuvres autour de la question géopolitique des migrations. En 2021, dans les jardins de la Villa Borghese au cœur de la ville de Rome où il réside, un buste monumental immergé dans l’eau d’une fontaine portait à bout de bras un tas de vêtements, qui paraissaient lui appartenir. Sobrement appelée Migrante (2021) et évoquant la traversée d’un fleuve, la sculpture donnait à voir une image percutante, celle d’une réalité sociale dont le bilan humain s’alourdit chaque jour. Travailler in situ et rendre hommage aux invisibilisés : voilà une manière pour l’artiste, également invité l’an passé par le pape à exposer dans la bibliothèque Barberini au Vatican, de faire résonner ces problématiques en les intégrant directement à l’espace public. 

Pietro Ruffo, “Anthropocène 2”, 2021, Encre, peinture à l’huile et découpes sur papier marouflé sur toile,124,5 x 158,5 cm © courtesy Galerie Italienne / Pietro Ruffo

Au-delà de cet engagement visible, c’est certainement l’univers de l’artiste – sorte de cosmogonie peuplée de figures humaines, animales et végétales – qui a séduit la directrice artistique des collections femmes de Dior, Maria Grazia Chiuri. Au début du mois de juillet 2017 à Paris, l’Italienne dévoilait le défilé haute couture automne-hiver 2017-2018 de la maison dans un amphithéâtre de bois mêlant sculptures animales en bois et parterre végétal en forme d’étoile, conçu par Pietro Ruffo. Pour l’occasion, l’artiste avait également peint une fresque inspirée d’un globe céleste conçu pour l’Exposition Universelle de 1900, suspendu au centre de l’édifice pour surplomber la scène. L’artiste et la maison avaient renouvelé leur collaboration en 2019 lors du Bal Tiepolo, organisé par Dior pendant la Biennale de Venise. Pietro Ruffo et Maria Grazia Chiuri y avaient conçu les flamboyants costumes des danseurs, inspirés des douze signes du Zodiaque. En 2020, Pietro Ruffo a même été invité à concevoir une collection capsule réinterprétant les créations iconiques de la maison Dior. À cette occasion, le mythique sac Saddle ou le Dior Book Tote se paraient de cartographies célestes aux couleurs bleutées, mêlant la faune et flore avec l’approche minutieuse et poétique caractéristique de l’artiste.

 

 

Pietro Ruffo, “Anthropocène”, jusqu’au 5 novembre 2022 à la Galerie Italienne, Paris 1er.