Les 8 rendez-vous artistiques de la rentrée à ne pas manquer
Aux quatre coins de l’Hexagone, le mois de septembre 2021 s’annonce déjà riche en événements. Entre le salon Art-o-rama à Marseille et le festival Le Printemps de septembre à Toulouse, la rétrospective de Georgia O’Keeffe au Centre Pompidou et celle de Vivian Maier au musée du Luxembourg, ou encore les séances de rattrapage pour les expositions entamées cet été, Numéro revient sur les grands rendez-vous de la rentrée à découvrir dès ce week-end.
Par Matthieu Jacquet.
1. Art-o-rama (Marseille)
En 2007, Marseille accueille un nouveau salon artistique baptisé Art-o-rama. Dès sa première édition, l’événement dénote par sa sélection pointue, défrichant les talents qui agitent le monde de l’art contemporain international mais aussi de la jeune création de la région méditerranéenne. Fort de son originalité dans le paysage culturel de la ville, le salon parvient au fil des années à déplacer la cartographie de l’art vers le sud de la France chaque fin d’été. Après une année blanche en 2020, Art-o-rama revient dès ce vendredi 27 août, comme à son habitude dans les locaux de la Friche La Belle de Mai, avec au total une centaine d’artistes et 44 galeries et maisons d’édition, parmi lesquelles de nombreuses galeries originaires de Paris (Crèvecœur, Exo Exo ou encore Sans titre (2016)), de Londres (Nicoletti et Bosse & Baum) ou encore de Cologne (Berthold Pott). L’édition de cette année s’enrichit de quatre nouveaux prix d’acquisition d’œuvres par diverses collections, ainsi que de l’inauguration par l’association Artagon de son espace de résidence dans la cité phocéenne. Si le salon se tient jusqu’à ce dimanche 29 août, l’exposition de l’événement à la Friche durera quant à elle les deux premières semaines de septembre. L’occasion d’y retrouver également les expositions d’Emeka Ogboh et de Lydia Ourahmane, mais aussi sa programmation partenaire dans divers lieux de la ville et de la région.
Art-o-rama 2021, du 27 août au 12 septembre, Friche La Belle de Mai, Marseille.
2. Georgia O’Keeffe au Centre Pompidou (Paris)
Elle est l’une des plus grandes peintres du XXe siècle, mais n’avait jusqu’alors jamais eu de rétrospective en France. C’est désormais chose faite : Georgia O’Keeffe, figure artistique majeure et représentante du modernisme américain, connaît au Centre Pompidou sa consécration trente-cinq ans après sa mort. Dès 1929, elle entrait pourtant dans l’histoire à 42 ans en devenant la première femme artiste dont des œuvres rejoignaient les collections du MoMA. Inspirés par le désert du Nouveau-Mexique, où elle séjourne régulièrement avant de s’y installer, ses paysages arides et ses célèbres fleurs colorées composent sur toile un monde aux portes de l’abstraction et du spirituel. A Paris, le musée proposera un parcours chronologique nourri par plus d’une centaine d’œuvres et des prêts prestigieux, mis en contexte avec les événements de son époque comme la Grande Dépression ou la Seconde Guerre Mondiale. Les chefs-d’œuvre qui ont fait sa notoriété y seront tout aussi présents que des tableaux plus inattendus, comme ses vues urbaines ou ses peintures tournées vers l’espace et l’infini, réalisés à la fin de sa vie. L’occasion de retracer la riche production d’une artiste qui vécut presque un siècle, disparue à l’âge de 98 ans.
Georgia O’Keeffe, du 8 septembre au 6 décembre au Centre Pompidou, Paris.
3. Genesis Belanger, Nicolas Party, Jill Mulleady et Heji Shin au Consortium (Dijon)
Une fois de plus, la nouvelle garde est à l’honneur au Consortium. Depuis le mois de juillet, le centre d’art dijonnais accueille quatre expositions personnelles dédiées à autant de talents dont l’œuvre traduit une importante filiation artistique autant qu’elle interroge les frontières du réel et de la figuration. Coqueluche du marché depuis quelques années, le Suisse Nicolas Party se fait à travers ses paysages multicolores au pastel, ses immenses visages aux yeux écarquillés et ses natures mortes fantasmagoriques l’émissaire d’un nouvel art naïf, ici mis en abîme dans des fresques inédites. On découvre parallèlement les sculptures de l’artiste américaine Genesis Belanger, qui suscitent elles aussi l‘intérêt de nombreux collectionneurs : fleurs et plantes tropicales, sacs à main et mains manucurées, bougies et sofas duveteux s’y voient tous convertis en porcelaines immaculées, si lisses qu’elles sembleraient provenir d’un film d’animation réalisé en pâte à modeler. Passionnée de théâtre, la peintre d’origine suisse et uruguayenne Jill Mulleady, nasée à Los Angeles, présente quant à elle des œuvres plus sombres, où l’expressionnisme allemand, la peinture d’Edvard Munch et la poésie absurde inspirent des scènes oniriques qui coexistent comme différents éléments d’un roman énigmatique et inquiétant. Enfin, l’Allemande Heji Shin expose ses photographies jouent avec l’ambiguïté de l’image, soumettant la forme du portrait et du reportage à l’exercice taquin de la mise en scène et du trucage.
Expositions de Genesis Belanger, Jill Mulleady, Heji Shin et Nicolas Party, jusqu’au 9 janvier 2022 au Consortium, Dijon.
4. Apichatpong Weerasethakul à l’IAC (Villeurbanne)
Il y a un mois et demi, Apichatpong Weerasethakul montait les marches du Festival de Cannes pour présenter son dernier long-métrage Memoria, en compétition, un drame intime et introspectif aux airs de thriller avec l’actrice Tilda Swinton en rôle titre. Mais parallèlement à cette consécration dans le monde du cinéma, l’Institut d’Art Contemporain de Villeurbanne propose une rétrospective de l’œuvre du réalisateur thaïlandais, qui met justement en exergue la diversité de ses sujets et de ses formats sur une vingtaine d’années. Car si le cinéaste est déjà l’auteur de dix longs-métrages, dont Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures, Palme d’or en 2010, l’exposition est loin de se limiter à leurs simples extraits : photographies, installations vidéo, courts-métrages et autres esquisses filmiques permettent de saisir toute la diversité de son travail. Là où certaines œuvres sont plus contemplatives voire fantasmagoriques, parfois basées sur des expériences surnaturelles ou des légendes, d’autres sont davantage ancrées dans la topographies de leur territoire, jusqu’à souligner leurs tensions politiques, sociales et culturelles comme Sarit, concentrée sur l’ancien premier ministre de Thaïlande. Activement impliqué dans la conception de l’exposition, l’artiste plonge le visiteur dans une déambulation dans son imaginaire ténébreux, peuplée d’animaux, de fantômes et d’êtres humains esseulés.
Apichatpong Weerasethakul, “Periphery of the night”, jusqu’au 28 novembre à l’Institut d’Art Contemporain, Villeurbanne.
5. Arcimboldo et ses héritiers contemporains au Centre Pompidou-Metz
Aujourd’hui, les portraits de Giuseppe Arcimboldo font le tour des écoles maternelles : derrière ses assemblages de fruits et légumes, les jeunes enfants s’amusent à reconnaître les visages et comprennent l’illusion d’optique, les limites de l’image et de la perception. Mais si les tableaux du peintre maniériste ont aujourd’hui cette valeur didactique, joyeuse mais parfois superficielle, leur résonance chez les artistes depuis sa redécouverte au XXe siècle et son succès auprès des surréalistes est plus rarement soulignée. C’est ce qu’explore justement le Centre Pompidou-Metz à travers une exposition pensée comme un face-à-face de quelques chefs-d’œuvre d’Arcimboldo avec des dizaines de pièces, issues de la Renaissance à nos jours. Dans un parcours ouvert et non-conventionnel, les rapprochements opérés, loin d’être littéraux, explorent au contraire les facettes plus profondes et sombres de ces toiles de cour à la frontière du portrait et de la nature morte grâce à un impressionnant travail de prospection et de sélection. Certaines des œuvres choisies, comme celles de Francis Bacon, Man Ray et Wolfgang Tillmans, mettent l’accent sur l’altération du visage tandis que d’autres, comme celles de Hans Bellmer ou Tim Noble et Sue Webster, abordent la déformation du corps et l’avènement d’un être hybride voire monstrueux. Enfin, d’autres comme celles de Lynda Benglis et Pierre Huyghe, parlent davantage de paysage et de la fusion de l’humain avec son environnement naturel. A l’entrée du grand bâtiment signé Shigeru Ban, une installation inédite d’Annette Messager peuplée de mammifères et oiseaux complète cette lecture particulièrement riche et inédite d’une figure majeure du XVIe siècle.
“Face à Arcimboldo”, jusqu’au 22 novembre au Centre Pompidou-Metz, Metz. L’installation d’Annette Messager est à découvrir dans le hall jusqu’au 20 septembre.
6. Vivian Maier au musée du Luxembourg (Paris)
Des années 50 à la fin des années 90, Vivian Maier a posé son objectif sur les rues de Chicago et de New York. Fascinée par le cadre urbain, la photographe a arpenté ses artères, capturé en couleur comme en noir et blanc ses personnages et enseignes dans leur singularité, semant parmi ses clichés de nombreux autoportraits pris dans des miroirs et vitrines de boutique. Pourtant, de son vivant, l’Américaine restera gouvernante pour enfants et ne sera jamais reconnue en tant que photographe. Il faudra attendre en 2009, seulement quelques jours après son décès, pour que le propriétaire curieux de ses clichés ne découvre son identité et lui permette peu à peu d’attirer l’attention des historiens, critiques et institutions, jusqu’à la reconnaître comme une figure de la street photography aux côtés d’artistes tels que Walker Evans, Robert Frank et Helen Levitt – dont la reconnaissance fut bien moins tardive qu’elle. Après une première exposition au Chicago Cultural Center en 2011, puis une rétrospective française au Château de Tours du Jeu de paume, c’est désormais au tour du musée du Luxembourg d’organiser la première exposition dans une institution parisienne de cette figure majeure de la street photography. L’occasion de revenir sur sa carrière mais également de découvrir des films Super 8 et enregistrements audio jusqu’alors jamais présentés au public.
Vivian Maier, du 15 septembre 2021 au 16 janvier 2022 au musée du Luxembourg, Paris.
7. Absalon et ses contemporains au CAPC (Bordeaux)
Au début des années 90, un jeune artiste israélien a une idée : construire des cellules nomades, dépouillées et intégralement blanches, dans lesquelles l’être humain pourrait se déplacer et vivre de façon autonome, coupé du monde mais aussi du superflu et du matériel. Utopiste, le projet de Meir Eshel, qui adopte ensuite le nom biblique d’Absalon, ne sera malheureusement jamais réalisé, interrompu par sa mort brutale en 1993 des suites du sida. Près de trente ans plus tard, le CAPC de Bordeaux se replonge dans l’héritage de cet artiste avant-gardiste et poursuit sa mission en exposant ses Cellules aux côtés d’œuvres de huit artistes contemporains. Des nouvelles expériences de l’espace formulées par la Française Laura Lamiel et l’ex-compagne d’Absalon Marie-Ange Guilleminot à la mise en scène du quotidien, par les objets dans les sculptures de Robert Gober ou les gestes dans les performances d’Alain Buffard, en passant par la portée politique et contestataire de l’enfermement dans l’œuvre de Mona Hatoum ou le spectre prémonitoire de la disparition dans celle de Felix Gonzalez-Torres, les pratiques mises en avant traduisent toutes une recherche plastique, formelle et conceptuelle de nouveaux paliers d’accès à la liberté.
“Absalon Absalon”, jusqu’au 2 janvier 2022 au CAPC, Bordeaux.
8. Les 30 ans du Printemps de septembre (Toulouse)
En cette rentrée 2021, Toulouse se met elle aussi au pas de l’art contemporain. Pour célébrer ses trente ans d’existence, son festival bisannuel Le Printemps de Septembre invite pendant un mois les artistes entre les murs de ses musées et centre culturels autant que dans l’espace public, dans les chapelles et couvents autant que dans un hôpital, soit au total dans vingt-huit lieux répartis dans les quatre coins de la Ville rose. Si des sculptures de Franz West ou Franck Scurti s’immiscent subrepticement dans le décor urbain, les installations d’Emilie Ding et Laurent Fachard transforment quant à elle son paysage nocturne, jusqu’à ce qu’une performance de Samuel Pajand et Victor Roy l’active par ses participants. L’événement permet également de (re)découvrir de grands artistes de notre époque, de Yan-Pei Ming à Miriam Cahn en passant par Gérard Fromanger, récemment disparu, et de se plonger dans la riche programmation du musée Les Abattoirs : au programme, des expositions de Michel Aubry, Costa Gavras et Olivier Menanteau, Eva Taulois et Miryam Haddad, autant d’artistes qui tracent les horizons. En plus de cette offre pluridisciplinaire, l’événement donne carte blanche à plusieurs organismes pour une programmation fimique : ainsi, on y découvrira exemple une sélection de films musicaux par le festival FAME, organisé habituellement à la Gaîté Lyrique, ou encore le Let Us Reflect Film Festival, spécialisé dans la mise en avant des liens entre art vidéo et cinéma.
Le Printemps de Septembre, Les 30 ans du festival, du 17 septembre au 17 octobre dans une sélection de lieux à Toulouse.