5 déc 2018

Charlotte Prodger reçoit le prix Turner pour son court-métrage tourné avec un iPhone

L’Écossaise a tourné des films très personnels, explorant les problématiques queer, exclusivement avec son iPhone.

Par Laura Catz.

Photo : Emile Holba

La campagne écossaise vue du train, un tee-shirt sur un radiateur et un chat qui donne des coups de patte dans une lampe, le tout filmé avec un iPhone… Avec ses deux courts-métrages, intitulés respectivement Bridgit et Stoneymollan Trail, Charlotte Prodger remporte le Prix Turner 2018, célèbre récompense britannique consacrée à l’art contemporain. Le premier film, long de trente-deux minutes, était projeté ces derniers jours au Tate Britain, à Londres, dans le cadre d’une exposition consacrée aux quatre artistes nommés pour prix Turner. Le jury salue un film “difficile à expliquer”, où il est question de “classes sociales, de genre, de sexualité et de déesses néolithiques”, relate le Guardian. Un tournage qui a duré un an, pendant lequel, Charlotte Prodger se met en scène chez elle ou lors de ses voyages. De son coming-out au début des années 1990 dans l’Aberdeenshire (région rurale du nord-est de l’Écosse) aux individus incapables de déterminer son sexe ou encore au présupposé que sa petite amie serait sa propre fille, le récit comprend beaucoup de fragments autobiographiques.

 

Installée à Glasgow, l’artiste a travaillé dans l’anonymat pendant vingt ans avant d’être choisie pour représenter l’Écosse à la Biennale de Venise 2019. L’artiste de 44 ans justifie le choix de ce médium, qu’elle considère comme une extension d’elle-même, pour les qualités ergonomiques qui facilitent son quotidien de globe-trotteuse, avouant être souvent seule. L’utilisation de l’iPhone dans l’art n’a jamais été aussi “profonde” pour Alex Farquharson, directeur de Tate Britain et président du jury, avant d’applaudir le “caractère étonnamment fouillé” de ces vidéos, qui évoquent les traditions de l’art du paysage avec un poids psychologique. “Les histoires que je raconte, bien qu’elles me concernent et qu’elles soient personnelles, sont des histoires que beaucoup de gens – enfin, les personnes ‘queer’, j’imagine – ont vécues”, a expliqué l’artiste de 44 ans à la BBC.

 

Décernée depuis 1984, cette prestigieuse récompense annuelle dotée d’une bourse de 25 000 livres sterling, soit environ 28 000 euros, distingue chaque année des artistes contemporains de moins de 50 ans qui résident, travaillent ou sont nés au Royaume-Uni. Ce prix a notamment contribué au lancement de la carrière de Damien Hirst, dont les œuvres transitent désormais jusqu'au Qatar. Le céramiste Grayson Perry et le réalisateur de 12 Years a Slave, Steve McQueen, ont eux aussi déjà remporté ce prix.