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25 avr 2025

Art Brussels : 5 artistes à découvrir sur la foire

Derrière l’imposante façade Art déco du Palais des expositions du Heysel, la foire Art Brussels, ouverte jusqu’au 27 avril 2025, fourmille de jeunes artistes talentueux. Des peintures sur serviettes d’Helena Minginowicz aux broderies pop de Michaela Younge en passant par les toiles sensuelles d’Adelisa Selimbašić : Numéro dévoile ses 5 coups de cœur.

  • Par Camille Bois-Martin.

  • Publié le 25 avril 2025. Modifié le 27 avril 2025.

    Les peintures sur serviettes en papier d’Helena Minginowicz à la galerie Prima

    Ouverte à l’automne dernier, la galerie Prima répond déjà présente dans de grandes foires d’art contemporain. Après une participation remarquée à Art Paris au début du mois d’avril, l’enseigne parisienne possède en effet ce week-end son stand à Art Brussels, où elle dévoile notamment le travail stupéfiant de la Polonaise Helena Minginowicz (née en 1984).

    Sur les cimaises, des serviettes en papier se recouvrent de motifs délicats (une colombe, des cygnes), peints à l’acrylique et à l’aérographe. Une technique et un médium surprenants, qui font écho au thème du stand : le “disposable”. Aux côtés de ses œuvres sont également exposées les sculptures de Luca Resta, ready-made contemporains façonnés à partir de déchets (couverts jetables, emballages plastiques, barquettes alimentaires), transformés ainsi en objets immuables par son geste artistique.

    Jetable et éphémère – mais surtout représentatif de nos sociétés de consommation –, le matériau fragile d’Helena Minginowicz rappelle également les masques cosmétiques ou les sacs plastiques peints par l’artiste sur ses toiles présentées tout près. Troublantes de réalisme et de délicatesse, ces œuvres tranchent avec les grandes installations qui peuplent la foire. Dès le 17 mai prochain, le public parisien pourra à son tour apprécier le travail de l’artiste avec sa première exposition personnelle chez Prima.

    Galerie Prima, stand 6C-30.

    “Helena Minginowicz, Wounds and Wonders”, exposition du 17 mai au 21 juin 2025 à la galerie Prima, 13 Rue Notre Dame de Nazareth, Paris 3e.

    Les toiles en laine de Michaela Younge à la Smac Gallery pour Art Brussels

    Quelques couloirs plus loin, les positions sulfureuses d’un personnage semblable à Pamela Anderson attirent notre regard. Surgissant des flammes ou accroupie de dos, jambes écartées et en string, cette femme nous invite à se rapprocher de cette peinture… qui n’en est pas une. Car, malgré leur multitude de détails (des cartes de tarots, de subtils tatouages), ces œuvres sont en réalité tricotées. Signées de Michaela Younge, ces tableaux en laine de mérinos sur feutre déploient un univers à la croisée de la pop culture et des bouleversements politiques et économiques actuels. Plus particulièrement ceux qui animent la ville de Cape Town, dont est originaire l’artiste née en 1993.

    Taxidermiste de formation, cette dernière emploie aujourd’hui son talent et sa minutie à la réalisation de ces œuvres à l’humour mordant, fourmillant de couleurs et de figures humaines et animales. On y observe une critique acerbe de la bureaucratie au travers d’hommes en costumes, affublés de caleçons ornés de cœur, en train d’idolâtrer leur mallette de travail. Ou encore une scène de liesse populaire, où une Dita Von Teese blonde tombe de son verre à Martini, tandis qu’un couple de moines se tient la main devant une représentation de la mort… sirotant une boisson dans une Stanley cup. Un metling-pot de motifs contemporains et universels, dont l’artiste, armée de quelques fils de laine et d’une aiguille, s’amuse à renverser les codes.

    Galerie Smac, stand 6B-21.

    Le stand élégamment sensuel d’Adelisa Selimbašić pour Art Brussels à la galerie z2o Sara Zanin

    Petite, Adelisa Selimbašić s’amusait à dessiner ses poupées – plus précisément, ses Bratz. Leurs courbes lui inspiraient une certaine fascination qui, maintenant qu’elle y repense, ne l’a plus jamais quittée. C’est en tout cas ce dont témoigne son solo show à la foire ArtBrussels, organisé par la galerie italienne z2o Sara Zanin. Au sein d’un petit espace cubique, la douceur de ses toiles pastels diffusent une forme de sensualité. Sur de petits formats comme sur d’autres plus grands, des morceaux de peau veloutée éveillent les sens du spectateur, stimulés notamment par les titres des œuvres de l’artiste italo-bosniaque (née en 1996).

    Ici, une peinture représentant un bout de visage et le creux d’un cou s’intitule Scent of Lavender (parfum de lavande), pour la fragrance que cette image évoque à la plasticienne. Une autre, dévoilant une femme en body de dos, se nomme Lemonade… Un goût et une odeur profondément érotiques selon Adelisa Selimbašić, qui ne peint jamais de visages, mais toujours des corps, sans cacher leurs courbes ni leurs prétendus défauts. Entre force évocatrice et douceur, ses tableaux sont ainsi physiques, attirant notre regard autant qu’ils éveillent nos pulsions corporelles. À l’image d’une série de petits portraits de personnes dontles culottes sont ornées d’un aliment – un concombre, un bonbon, un brocolis – choisi par chaque modèle pour la portée érotique qu’il revêt à leurs yeux.

    Galerie z2o Sara Zanin, stand 5E-04.

    Les étranges créatures de Katalin Kortmann-Járay et Karina Mendreczky à la galerie Ani Molnár

    Depuis 2019, Katalin Kortmann-Járay (née en 1986) et Karina Mendreczky (née en 1988) fusionnent leurs univers artistiques. Toutes deux inspirées par la représentation féminine à travers l’histoire et préoccupées par l’écologie, elles façonnent ensemble des installations immersives où les créatures étranges de la première rencontrent la nature féérique de la seconde. Sur les cimaises du stand de la galerie hongroise Ani Molnár à ArtBrussels, on aperçoit à côté des photographies de Radenko Milak un curieux dragon serpent de Katalin Kortmann-Járay. En plastique polymère, émail et pigments minéraux, la sculpture possède un aspect tactile fascinant, qui le rendrait presque réaliste. Et fait écho à un petit cadre en béton de Karina Mendreczky accroché tout près, dans lequel se niche une rangée de feuilles à l’aspect surnaturel…

    Aperçus de leurs univers complémentaires, ces œuvres minutieuses, que les artistes hongroises définissent comme animistes, réinventent notre réalité pour mieux la questionner. À quoi notre nature est-elle vouée à ressembler ? Les humains sont-ils des créatures parmi d’autres ? Et s’ils se métamorphosaient en figures hybrides ? Un récit fascinant, constamment nourri par leurs sculptures et installations.

    Galerie Ani Molnár, stand 6A-14.

    Le Brésil figé dans la résine par Paulo Nazareth à la galerie Mendes Wood

    Actuellement exposé au WIELS, le Brésilien Paulo Nazareth (né en 1977) se distingue par sa pratique pluridisciplinaire engagée dont le stand de la galerie Mendes Wood à ArtBrussels offre également une petite idée. Sur des cagettes en bois récupérées dans des marchés au Brésil, qu’il a sillonnés de long en large, des paquets de farine, d’huile ou des boîtes de conserves sont emprisonnés dans des blocs de résine. Figés pour l’éternité, ces produits matérialisent la culture de son pays natal, trop souvent résumée à son image festive et chaleureuse malgré les crises sociales qui le fracturent depuis des décennies.

    Dans une salle dérobée, les galeristes exposent également une toile et une photographie de l’artiste. La première dépeint sur un fond rose une bagarre de rue, tandis que la seconde montre un homme au visage recouvert par le drapeau mexicain. Toutes deux témoignent de la pratique nomade de Paulo Nazareth. Témoin des tensions qui animent les populations qu’il rencontre lors de ses voyages sur les continents américain et africain, ce dernier immortalise les scènes croisées sur son chemin, telle une mémoire vivante et hautement politique du monde.

    Galerie Mendes Wood, stands 5C-22 & 5C-28.

    “Paulo Nazareth, Patois/Patuá”, exposition jusqu’au 27 avril 2025 au Wiels, avenue Van Volxem 354, Forest, Belgique.

    Art Brussels, foire jusqu’au 27 avril 2025 au Palais des expositions du Heysel, Place de Belgique 1, Bruxelles.