50 years ago, the artist Valie Export ripped her trousers
Le 22 avril 1969, pubis apparent et mitraillette à la main, l'artiste autrichienne VALIE EXPORT, alors âgée de 29 ans, signait sa performance historique : Aktionhose: Genitalpanik. Retour sur l’histoire de cette œuvre qui fête son cinquantenaire.
Par La rédaction.
By Yasmine Lahrichi.
Les cheveux ébouriffés, une femme est assise, seule, sur un banc, les jambes écartées. À l'entrejambe de son jean, un trou béant laisse apparaître son sexe, froidement exhibé, seul détail insolite de la tenue ordinaire qui couvre le reste de son corps. Aux antipodes des injonctions de la féminité, de ses codes appelant à la beauté proprette ou à l’exigence absurde d’une perfection inane, cette femme ouvre les jambes pour inspirer la crainte. Sorcière répugnante, elle provoque délibérément le spectateur, et rien ne semble aussi indécent, obscène ou sale que cette posture, à l’image du sol terreux qu’elle caresse avec ses orteils ou du mur décrépit auquel elle s’adosse. Position scabreuse, mitraillette Thompson à la main, regard irrévérencieux, le modèle mime néanmoins tout ce qu’il y a de plus codifié dans notre société : l’homme fort, viril et brutal.
Subversive et révoltée, cette photographie n’est pourtant qu’un avant-goût de l’œuvre qu’elle illustre : l’Aktionhose: Genitalpanik. En effet, le 22 avril 1969, une artiste connue sous le nom de VALIE EXPORT s’introduit armée dans un cinéma indépendant à Munich. Le film projeté ? Un porno. Comble de la provocation : elle porte le fameux pantalon méticuleusement découpé au pubis, défiant le public de la salle. La légende circulant à propos de cette photo, prétend qu'un moment décisif du mouvement de l’actionnisme viennois aurait été immortalisé par ce cliché, pris le 22 avril 1969. Mythe ou réalité ? Les historiens, eux, s’accordent à dire que la photographie n’aurait pas été prise le jour de cette irruption dans un cinéma à Munich. Selon eux, l’action artistique se serait en effet déroulée en quatre temps. C'est en effet en 1968 que VALIE EXPORT a d'abord réalisé le pantalon scandaleux avant de s'adonner, un an plus tard, à deux reprises à la célèbre performance (il y aurait eu un Genitalpanik 1 et un Genitalpanik 2). Cette performance s'inscrivait d'ailleurs dans le projet Expanded Cinema (réalisé en collaboration avec l’artiste Peter Weibel) qui visait à interroger le rôle du spectateur au cinéma. Selon les historiens, c’est en réalité plus tard, la même année, et à Vienne (et non pas à Munich comme la performance Genitalpanik), que les clichés auraient été pris, imprimés et affichés.
VALIE EXPORT n’en était pas à sa première performance tapageuse. Née Walraud Lehner, le 17 mai 1940 en Autriche, l’artiste pluridisciplinaire est une figure de proue de l’actionnisme viennois – un mouvement artistique qui utilise le corps de manière violente et spectaculaire comme objet même de l'œuvre d’art (et non plus comme sujet). Très vite, elle prend ses distances avec celui-ci, refusant de se conformer à l’automutilation et apportant à son travail une dimension profondément féministe. En 1967, elle abandonne son nom de naissance, selon elle, une preuve criante de l’aliénation des femmes à la société patriarcale, et se baptise VALIE EXPORT en référence à une marque de cigarettes. Ses œuvres visent à choquer pour induire la réflexion : en 1968, elle traîne ainsi en laisse l’artiste Peter Weibel tel un chien, et, lors de la performance Tapp und Tast Kino elle invite les passants d’une rue viennoise à palper ses seins au travers d’un carton : une manière d'utiliser son corps de femme – si souvent réduit, dans la France des années 50, au statut d’objet passif et fétichisé au cinéma et à la télévision – comme une arme.
A woman with dishevelled hair sits alone on a bench, legs spread. The crotch of her jeans has been cut away and a gaping hole reveals her genitalia, exhibited coldly and the only unusual detail in an otherwise fairly ordinary outfit covering the rest of her body. As the polar opposite of feminine injunctions, of the codes that call for a clean beauty or the absurd requirements for an inane perfection, this woman opens her legs to inspire fear. Looking witchy and repulsive, she deliberately provokes the spectator and it’s as if nothing could be as indecent, as obscene or as dirty as this pose, in tune with the earthy floor she strokes with her toes or the dilapidated wall she leans against. This risqué pose, Thompson sub-machine gun in hand, an irreverent look in her eyes, nevertheless mimics one of the most codified images in our society: that of a strong, virile and brutal man.
Both subversive and rebellious, this image was just a taster of the work Aktionhose: Genitalpanik. On April 22nd 1969, the artist known by the name of VALIE EXPORT walked into a cinema in Munich. Armed. The film being shown? A porno. The height of provocation, she was wearing the famous trousers cut out at the crotch, defying the audience in the room. Rumours run riot on the subject of this photograph, claiming that a decisive moment for the Viennese Actionism movement was immortalised by this shot, taken on April 22nd 1969. Myth or reality? Art historians tend to agree that the photograph wouldn't have been taken on the day of that interruption in a Munich cinema. According to them, the artistic action unfolded in four phases. It was indeed in 1968 that VALIE EXPORT first made the scandalous trousers before devoting herself, a year later, to the two famous performances (there was a Genitalpanik 1 and a Genitalpanik 2). This performance was actually part of the Expanded Cinema project (done in collaboration with Peter Weibel) which sought to question the role of the movie goer. According to historians, it was actually later that same year, and in Vienna (not in Munich like the Genitalpanik performance), that the shots would have been taken, printed and displayed.
This was not VALIE EXPORT’s first rowdy performance. Born Walraud Lehner on May 17th 1940 in Austria, the multi-disciplinary artist was a figurehead of Viennese Actionism – an artistic movement that used the body in a very violent and spectacular way as the main object of the artwork (and no longer as a subject). Quickly she distanced herself from the group, refusing to conform to the self-mutilation and subsequently giving her work a profoundly feminist dimension. In 1967 she abandoned her birthname, which according to her was glaring proof of the alienation of women in a patriarchal society and renamed herself VALIE EXPORT after a brand of cigarettes. Her works were intended to shock and to provoke reflection: in 1968, she put the artist Peter Weibel on a leash and walked him like a dog, and, during theTapp und Tast Kino performance, she invited passers-by on a Viennese street to feel her breasts through a cardboard box: a way of using her female body – so often reduced in 1950s France, to the status of a passive and fetishized object in cinema and on television – as a weapon.