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Les expositions à voir en galeries pendant Art Basel Paris
Pendant Art Basel Paris, la capitale inaugure une semaine de l’art à nouveau très riche en expositions et projets spéciaux. Hors de leurs stands sur la foire, les galeries parisiennes se mettent aussi au pas : découvrez les expositions à ne pas manquer, du maître Gerhard Richter chez David Zwirner à l’installation mordante d’Elmgreen & Dragset en vitrine de Massimo de Carlo Pièce Unique.
Par Matthieu Jacquet,
Publié le 23 octobre 2025. Modifié le 24 octobre 2025.

Gerhard Richter à la galerie David Zwirner
Que n’a pas peint Gerhard Richter ? La question s’invite rapidement dans les esprits à mesure que l’on découvre la colossale exposition de l’artiste à la Fondation Louis Vuitton, inaugurée il y a quelques jours. Portraits intimistes ou reproductions de clichés historiques, paysages mélancoliques, natures mortes, monochromes, compositions abstraites, mosaïques d’aplats colorés, et même photographies peintes à la laque… En six décennies de carrière, le virtuose originaire de Dresde, qui a arrêté de peindre en 2017, n’a cessé de repousser les limites d’un médium que l’on pensait voir, au milieu du 20e siècle, épuiser toutes ses ressources.
Comme un complément à ce corpus déjà très riche, la galerie David Zwirner présente en parallèle à Paris un ensemble d’œuvres qui, en seulement quelques salles, témoignent de la grande variété de ses travaux. On y croise quelques exemples de ses célèbres photo-peintures, une sélection remarquable de ses Abstraktes Bild aux couleurs obsédantes, plusieurs séries de dessins à l’encre et au crayon sur papier, des installations en miroirs et en verre, ou encore Strip, l’une de ses récentes impressions numériques striées, que l’artiste décline depuis qu’il a remisé peinture et pinceaux en 2017.
“Gerhard Richter”, exposition jusqu’au 20 décembre 2025 à la galerie David Zwirner, Paris 3e.

Yan Pei-Ming à la galerie Thaddaeus Ropac
Après Georg Baselitz l’été dernier, la galerie Thaddaeus Ropac confie son vaste espace de Pantin à l’artiste Yan Pei-Ming. Tout comme son prédécesseur, le peintre profite de l’immense hauteur sous plafond du bâtiment pour présenter certaines de ses toiles les plus monumentales, comme son triptyque de six mètres de haut dévoilé au Palais des Papes en 2020, où il se représente dans la peau de trois personnages différents, dont le pape lui-même.
Outre l’autoportrait, exercice auquel s’attelle le peintre français d’origine chinoise depuis les années 70, cette nouvelle exposition personnelle réunit plusieurs autres grands sujets et leitmotivs qui traversent son œuvre depuis des décennies : les animaux – le lion et le singe occupent notamment dans ce nouveau corpus une place importante –, les portraits de figures illustres, comme le pape Léon XIV, ou encore le gris, couleur signature de l’artiste, qui baigne ses toiles de douceur autant que de nostalgie.
“Yan Pei-Ming. Eye to Eye”, exposition jusqu’au 20 décembre 2025 à la galerie Ropac, Pantin.

Enrico David à la galerie White Cube
Dans les espaces immaculés de la galerie White Cube, des pièces épurées en albâtre, bronze, acier et plâtre jonchent le sol en béton ciré. Signées de l’artiste Enrico David, elles composent un ensemble d’œuvres inédites au sein duquel des sculptures se mêlent à du mobilier, des tapisseries et des dessins sur papier.
Au fil d’œuvres anthropomorphes et curvilignes, l’Italien déploie ses recherches sur la constante transformation du corps humain et présente sa première présentation institutionnelle chez la galerie qu’il a rejoint en début d’année. L’exposition fait également écho à la vaste rétrospective que le Castello di Rivoli, près de Turin, lui dédie à partir du 29 octobre prochain.
“Enrico David. The Soul Drains the Hand”, exposition du 21 octobre au 19 décembre 2025 à la galerie White Cube, Paris 8e.

Jean-Michel Othoniel à la galerie Perrotin
Cet été, Jean-Michel Othoniel inaugurait un projet d’une ampleur inédite en France en transformant l’entièreté de la ville d’Avignon en véritable musée à ciel ouvert. Du Palais des Papes au célèbre pont, en passant par la Collection Lambert et la Grande chapelle, l’artiste français y présente non moins de 240 œuvres dans les centres névralgiques de l’agglomération. Visible jusqu’en janvier prochain, ce projet d’envergure s’accompagnait d’une multitude d’évènements estivaux, tel un spectacle du danseur étoile Hugo Marchand parmi les murs en verre du plasticien.
Une actualité très remplie, qui se complète cet automne par une exposition personnelle dans l’antenne du Marais de la galerie Perrotin. Le plasticien y dévoile des œuvres en verre coloré qui s’inscrivent dans la lignée de celles présentées à la Collection Lambert d’Avignon, inspirées par le minimalisme et l’abstraction – deux mouvements qui ont grandement influencé sa pratique artistique.
“Jean-Michel Othoniel. New Works”, exposition jusqu’au 20 décembre 2025 à la galerie Perrotin, Paris 3e.

Precious Okoyomon à la galerie Mendes Wood DM
Tout près de vitraux peints où des fleurs menaçantes jouxtent de petits oursons s’adonnant à des pratiques lubriques, d’étranges ours en peluche d’un mètre de haut, simplement habillés de culottes et adoptant des positions lascives, ponctuent le parcours de la nouvelle exposition de la galerie Mendes Wood DM. Un univers mordant et suggestif, façonné par Precious Okoyomon pour sa première exposition personnelle à la galerie.
Les yeux brillants et remplis de flammes et de petits cœurs de ces sculptures, allongées à plat ventre, jambes écartées, ou superposées l’une sur l’autre, plongent les visiteurs dans un monde à mi-chemin entre un imaginaire enfantin et les fantasmes érotiques d’adultes… Des thématiques qui irriguent la pratique artistique de la plasticienne britannique, explorant notre rapport au monde extérieur et social au travers de notre sphère intime. Ici, les oursons, symboles de l’enfance et de réconfort, se retrouvent confrontés à la pudeur qui entoure nos expériences sexuelles.
“Precious Okoyomon. It’s important to have ur fangs out at the end of the world”, exposition du 20 octobre 2025 au 17 janvier 2026 à la galerie Mendes Wood DM, Paris 4e.

Rirkrit Tiravanija à la galerie Chantal Crousel
En 2024, LUMA Arles inaugurait une large rétrospective dédiée à la carrière de Rirkrit Tiravanija et à ses performances pionnières, à l’instar de celle présentée au White Cube à la fin des années 90, où il cuisinait… Aujourd’hui, l’artiste thaïlandais présente à la galerie Chantal Crousel une nouvelle exposition, où l’on retrouve l’aspect engagé et ready-made de son travail. Sa thématique ? Les aliens.
Comme point de départ, une photographie de 1968 de sa sœur et lui, où l’artiste arbore des prothèses en pâte à modeler sur les oreilles pour imiter celles de Spock, le personnage emblématique de la série télévisée américaine Star Trek. Un objet que le plasticien considère aujourd’hui comme sa première sculpture et qui nourrit le fil de cet étrange nouveau parcours, où deux figures humaines velues se font face au sol, installées près de petites tables en bois sur lesquelles des ronds noirs semblent dessiner un langage inconnu…
“Rirkrit Tiravanija IN ALIENS WE TRUST”, exposition du 20 octobre au 22 novembre 2025 à la galerie Chantal Crousel, Paris 3e.

Berlinde de Bruyckere à la Galleria Continua
Figure majeure de la sculpture contemporaine, dont l’œuvre expose depuis plus de trente ans l’être humain, l’animal et le végétal dans leur plus grande crudité, Berlinde de Bruyckere est aussi l’une des artistes historiques de la Galleria Continua, avec laquelle elle travaille depuis plus de 25 ans. Une collaboration au long cours qui méritait d’être célébrée par une exposition d’envergure.
Et quelle meilleure occasion que la première exposition de l’artiste flamande dans l’espace parisien de la galerie, ouvert en 2021 au cœur du Marais ? Dans “NEED”, la plasticienne embrasse avec ses œuvres toute la singularité de ce lieu singulier, autrefois occupé par des grossistes. Moulages de corps en cire présentés sous cloche ou contenus dans des cadres en bois, compositions abstraites à base de feuilles de papier ou de textile, morceaux d’écorce enfermés dans des vitrines… Chaque œuvre présentée s’intègre avec justesse dans le décor, tandis que leurs couleurs brunies et leur aspect patiné, évoquant la finitude de l’existence et le passage du temps, ne révèle que mieux les aspérités des murs et les peintures écaillées de ce bâtiment chargé d’histoire, délibérément conservées par la galerie lors de son installation.
“Berlinde de Bruyckere. Besoin”, exposition jusqu’au 30 décembre 2025 à la Galleria Continua, Paris 3e.

Agnes Scherer à la galerie Sans titre
Ordinateur géant ou lits à baldaquins colorés, scènes de mariage ou d’étreinte vampirique incarnées par des mannequins grandeur nature… Chaque projet d’Agnes Scherer avec la galerie Sans titre semble constituer la nouvelle scène d’une immense pièce de théâtre en papier mâché, que l’artiste allemande enrichit sans cesse d’éléments et personnages inédits.
Articulée autour du carnaval et de la fête, cette exposition personnelle nous attire vers le fond la galerie, où bouteille de champagne, vinyles et fragments de têtes et de corps étalés au sol ont été regroupés dans un coin, aux côtés d’un balai, pour évoquer un moment bien particulier : celui de l’après-fête, lorsque tous les invités en liesse sont partis et qu’il est l’heure de ranger avant d’affronter la désillusion du retour au quotidien. L’installation sculpturale fait face à un ensemble de faucilles accrochées au mur, outil qui a marqué l’enfance de l’artiste dans l’Allemagne rurale, tandis que l’on découvre autour plusieurs compositions oniriques sur toile ou sur papier, baignées de réjouissantes couleurs pastel.
“Agnes Scherer. Stargazing Masks”, exposition jusqu’au 6 décembre 2025 à la galerie Sans titre, Paris 3e.

“Props” à la galerie Derouillon
Intitulée “Props”, qui en anglais signifie l’accessoire, l’objet-support ou l’objet trompeur, la nouvelle exposition de la galerie Derouillon réunit six artistes qui s’emploient à faire saillir ce qui se niche dans les failles, à exalter la part d’étrange dans la réconfortante familiarité, à sacraliser la trivialité ou à rendre signifiant l’insignifiance. Il en est ainsi des sculptures de Shuang Li, où l’artiste fige dans la résine des morceaux de tissus et autres objets trouvés, jusqu’alors promis à l’oubli.
Comme des discrètes sculptures de Kirill Savchenkov, fils tendus à la verticale où l’artiste insère feuilles mortes et micro-éléments de serveurs internet. Mais aussi de la vidéo obsessionnelle d’Uri Aran, qui concentre toute son attention sur un rebut trouvé dans un coin de son atelier. Ou encore de la peluche de Liz Magor, figure aux abords rassurants, bien plus inquiétante lorsqu’elle se révèle être le cadavre au centre d’une scène de crime.
“Props”, exposition jusqu’au 29 novembre 2025 à la galerie Derouillon, Paris 3e.

Elmgreen & Dragset à la galerie Massimo de Carlo
En arpentant cette semaine les rues du Marais à la recherche d’une bouffée d’air entre deux foires d’art contemporain, il se peut que l’on se retrouve face à une galeriste en burn-out. Pas celles de chair et d’os qui peuplent les bureaux des plus grandes galeries de Paris, mais plutôt celle fabriquée de toutes pièces par le duo Elmgreen & Dragset et installée dans la vitrine de la galerie Massimo de Carlo Pièce Unique.
Derrière la grande baie vitrée du lieu (qui présente, pour chaque exposition, une seule œuvre d’art), cette jeune femme apparaît avachie sur son bureau, devant son ordinateur. Elle semble s’être évanouie de fatigue, dépassée par les sollicitations suscitées par les inaugurations d’expositions, de foires et de salons en tout genre. Un clin d’œil acerbe et comique à tous les professionnels du secteur qui s’apprêtent à braver cette nouvelle semaine de l’art parisienne…
“Elmgreen & Dragset. October 2025”, exposition jusqu’au 31 octobre 2025 à la galerie Massimo de Carlo Pièce Unique, Paris 3e.