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La cacophonie gothique du défilé Dilara Findikoglu
Entre les murs boisés du Ironmongers’ Hall, Dilara Findikoglu a présenté un défilé printemps-été 2026 saisissant, dont la mise en scène terrifiante complétait parfaitement la collection.
Par Camille Bois-Martin.


Dilara Findikoglu plonge ses invités dans l’obscurité
Dimanche, 21h, Fashion Week de Londres. Le rendez-vous était donné par Dilara Findikoglu au Ironmongers’ Hall, un hôtel particulier aux allures de manoir. Une pinte de bière avalée dans un pub situé tout près et nous voilà projetés dans l’atmosphère gothique du lieu, accentuée notamment par une musique très rock, parfois terrifiante et diffusée à un volume bien trop puissant pour une soirée dominicale.
Chacun tente tant bien que mal de rejoindre sa place, tantôt aveuglé par un spot, tantôt plongé dans l’obscurité du lieu. Après plus d’une heure d’attente, un cri se fait entendre : c’est le début de la bande-son du défilé. Échappant de peu à la crise cardiaque, les invités (parmi lesquels Julia Fox) saisissent leur téléphone et filment la première silhouette du printemps-été 2026. Elle s’avance dans l’atmosphère sombre de la salle, sur une musique énigmatique.
Ses jambes (recouvertes de taches noires) tremblent, tandis que la pointe de ses talons semble se casser contre le sol à chaque pas. Pourtant, sa robe est immaculée, façonnée autour de ses hanches comme un drapé et épousant sa poitrine dans une élégante forme asymétrique… Dans ce contraste réside justement toute la subtilité des créations de Dilara Findikoglu.


Le défilé printemps-été 2026 : un hymne à l’émancipation féminine
Intitulé “Cage of Innocence” (à traduire par la “prison de l’innocence“), le défilé est nourri de revendications féministes. La créatrice turco-britannique le dédie en effet à toutes les femmes “qui n’ont jamais été autorisées à exprimer ce qu’elles pensent ou ressentent”. Des siècles durant, la gent féminine a été déterminée par son innocence, sa pureté. Toutes celles en dehors de ces carcans ont été ostracisées, jugées, invisibilisées.
Ainsi la robe blanche qui inaugure cette collection, ainsi que toutes les autres qui la ponctuent, incarne-t-elle cette innocence. Mais Dilara Fındıkoğlu la déchire, la découpe et la réimagine. Elle détruit le symbole de cette vertu au profit de la liberté du corps et de l’esprit. Tout ce qui, à travers les époques, contraignait les femmes, devient ici un atout. Le corset sublime le buste, les robes libèrent les jambes…


Naomi Campbell défile pour Dilara Fındıkoğlu
Bref, le leitmotiv du printemps-été 2026 serait, selon la créatrice, l’émancipation, sous toutes ces formes. Même si, d’apparence, certains looks semblent restrictifs. À l’image du visage d’une mannequin déformé par un mors de cheval dans la bouche, de bijoux de têtes obstruant la vision d’une autre. Ou encore de ceintures enserrées autour des jambes d’une dernière. Sans oublier les robes et les jupes en latex, sexy certes, mais tout aussi contraignantes à porter. Mais tous ces vêtements et toutes ces matières font partie de l’univers de Dilara Findikoglu, dont l’esthétique gothique et affranchie de toute règle de bienséance a séduit le monde de la mode, comme les plus grandes célébrités.
À l’instar notamment de Kylie Jenner, qui signait au printemps une collaboration avec la marque britannique. De ce défilé, on ressort ainsi lessivé par l’attente et par l’intensité de la performance, comme fasciné par ces créations délicieusement subversives. On adore la robe-corset pourpre ou la longue robe ornée de cerise, mais aussi l’apparition quasi surréaliste de Naomi Campbell à l’approche du final.

























