Wolf Alice, le groupe de rock flamboyant adoubé par Harry Styles

par Alexis Thibault.

Wolf Alice, un groupe de rock qui a assuré les premières parties d’Harry Styles

Le duo Wolf Alice se forme presque par hasard, au tournant des années 2010. La chanteuse et guitariste Ellie Roswell, silhouette solitaire venue des champs d’orge de Cornouailles, écrit de la musique presque en cachette. Le guitariste Joff Oddie, lui, habite du côté de Surrey, près d’un grand rond-point avec de l’herbe au milieu. Il passe le plus clair de son temps à jouer de la guitare et à crier “voiture !” lorsqu’un véhicule approche le terre-plein… Wolf Alice commence donc à deux. Puis se forme le quatuor lorsque le bassiste Theo Ellis et le batteur Joel Amey les rejoignent. Les caves sans chauffage, les premières scènes locales, la fragilité brute du début : tout y est.

Mais très vite, le groupe dépasse la frontière de la musique indépendante, assurant notamment les premières parties des Foo Fighters et de Liam Gallagher (Oasis) en 2018 et d’Harry Styles en 2022. Avant ça, l’album My Love Is Cool (2015) pose les bases. Visions of a Life (2017) creuse le sillon. Et Blue Weekend (2021) ose mêler romantisme et brutalité. Leur nouveau disque, The Clearing, paraîtra le 22 août 2025. Il a été écrit à Seven Sisters, sous le ciel gris du nord de Londres, puis enregistré à Los Angeles avec Greg Kurstin, un producteur formé au jazz et collaborateur d’Adele, de Miley Cyrus, de Beyoncé…

Il faut aussi dire que la musique de Wolf Alice ne fait pas seulement danser. Elle propose un remède contre l’angoisse sourde et l’anxiété rampante. On l’écouterait volontiers vers 18h 00, lors d’une virée en voiture, alors que la lumière filtre péniblement à travers les arbres. Mais comment les membres du groupe imaginent-ils leur propre musique ? “Une immense coupe à Martini dressée dans le Turbine Hall de la Tate Modern. Un verre de 25 mètres de hauteur. Mais c’est un soleil qui remplace l’olive.”

The Clearing, le nouvel album de Wolf Alice

Le premier extrait de The Clearing, intitulé Bloom Baby Bloom, marque un virage assumé. Ellie Rowsell y délaisse sa guitare pour se concentrer sur sa voix. Un instrument rock, entre énergie brute et contrôle mélodique. Le résultat, à la fois sensuel et nerveux, évoque un Axl Rose (Guns N’ Roses) spectral dans un paysage pop alternatif.

The Sofa, deuxième single sorti le 11 juillet 2025, explore un registre plus introspectif. Ellie Roswell a posé sa guitare sur certains titres. Ce geste symbolique permet à sa voix de s’élever. Elle apparaît alors nue, grave, presque incantatoire. On pense parfois à Beth Gibbons, à Siouxsie Sioux, à Stevie Nicks, à une Kate Bush survoltée. “On voulait que ces morceaux donnent l’impression d’être joués en direct, dans une pièce. Avant, on composait en passant des bandes-annonces de Skins en fond sonore…”

L’identité visuelle de l’album est superbe. “La photographe Rachel Fleminger Hudson a longuement écouté l’album. Elle a réalisé d’immenses planches d’inspiration à partir des images et sensations qu’il lui évoquait, explique le groupe. “Elle a ressenti que l’album parlait de performance, de nature, de foyer. L’idée du projecteur comme une clairière sur scène nous a touchés. Elle a vraiment construit son propre monde visuel à partir du nôtre.”

L’art de la simplicité flamboyante de Wolf Alice

Pour Wolf Alice, la simplicité est une affaire d’âge. Plus on progresse, plus il devient difficile de rester simple. On peut vite se perdre dans les possibilités techniques. Choisir la simplicité demande donc du courage. Et souvent, les œuvres les plus fortes sont aussi les plus épurées. Ce nouvel album apparaît donc comme une œuvre plus spontanée, plus intentionnelle.

Comment le groupe Wolf Alice analyse-t-il sa propre évolution musicale ? Numéro leur a justement posé la question : “Les titres White Leather (2015) et Planet Hunter (2017) sont tous deux très centrés sur la guitare, bien que de manière différente. On sent une progression dans l’usage des pédales, une envie d’explorer davantage. Les paroles évoluent aussi — on reste sur des thèmes similaires, mais avec davantage d’intensité. En arrivant à How Can I Make It OK? (2021), on perçoit une volonté d’être moins flou, plus direct, et aussi plus audacieux dans l’ajout de synthétiseurs.”

Plus tard, ils évoquent certains titres de ce nouvel album ainsi : “Peut-être que là, on devient moins mélancoliques. Quand on était plus jeunes, écrire une chanson joyeuse nous semblait presque impossible — trop risqué, trop kitsch. Maintenant, on se dit : peu importe. Si c’est amusant à jouer, on le fait. C’est peut-être un retour en arrière pour aller plus loin — on enlève des choses. Piano, basse, batterie, une touche de guitare. Ce dépouillement, c’est l’un des exercices les plus exigeants.”

The Clearing de Wolf Alice, disponible le 22 août 2025. En concert le 14 novembre au Transbordeur de Lyon, le 15 novembre au Bikini de Toulouse et le 25 novembre au Zénith de Paris.