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Craig Green
Né à Londres en 1986, Craig Green grandit dans un environnement où le geste manuel est valorisé. Très tôt, il s’oriente vers une approche créative du vêtement. Après des études à Central Saint Martins, il lance en 2012 sa propre marque. Son langage se distingue rapidement : silhouettes architecturales, uniformes déconstruits, volumes imposants et poésie silencieuse. Dès ses premières collections, il impose une vision à la fois introspective et universelle de la mode masculine.
Publié le 25 juin 2025. Modifié le 24 juillet 2025.

Reconnaissance et prix prestigieux
Dès 2014, l’industrie commence à mesurer l’ampleur de son influence. En quelques années, les récompenses s’accumulent. Il remporte plusieurs British Fashion Awards, dont celui du Designer masculin de l’année en 2016, 2017 et 2018. Ces prix consacrent un style audacieux, mais aussi une pensée de la mode ancrée dans son époque. Loin de se limiter à une tendance, son travail traduit une vision du monde. Il façonne une silhouette contemporaine, forte, identifiable au premier regard.
En 2022, l’Empire britannique lui remet la distinction de Member of the Order of the British Empire (MBE). Cette décoration dépasse le cercle de la mode. Elle reconnaît l’impact culturel, social et artistique d’un créateur qui a redéfini les contours du vêtement masculin. Ses pièces sont désormais exposées dans des institutions majeures comme le Victoria and Albert Museum à Londres, ou le Metropolitan Museum of Art à New York. Ces collections permanentes légitiment la mode comme forme d’art, et célèbrent une œuvre à la fois conceptuelle et accessible.
Collaborations multiples et grammaire visuelle

Parallèlement à son parcours personnel, il multiplie les collaborations. Avec des artistes, des marques, des musiciens, il tisse un dialogue entre les disciplines. Il travaille notamment avec des géants du streetwear, des musées ou encore des cinéastes. Chaque collaboration respecte sa grammaire visuelle : des coupes nettes, des silhouettes affirmées, des contrastes forts. Ainsi, il réussit à imposer sa patte tout en se réinventant. Il explore les matières, les imprimés, les récits, sans jamais perdre le fil de son identité.
Cette esthétique ne relève pas du hasard. Elle traduit un langage cohérent, codifié, mais évolutif. Noir profond, tailoring déstructuré, influences rave ou romantiques : tout s’assemble pour composer un discours singulier. Son style ne copie pas, il propose. En somme, il s’agit d’une vision qui dépasse les vêtements. Car pour lui, créer, c’est prendre position.
Des collaborations multiples et une grammaire visuelle singulière

Au fil des années, Craig Green élargit son champ d’action avec des collaborations audacieuses. Il travaille avec Moncler, adidas, Valentino ou encore Björn Borg, tout en conservant son intégrité artistique et conceptuelle.
Par ailleurs, il conçoit des costumes pour des ballets contemporains et des films de science-fiction, affirmant une esthétique hybride entre mode, art, artisanat et narration. Chaque projet devient ainsi un terrain d’exploration plastique : il y questionne le mouvement, la mémoire du corps, la fonction du vêtement et son pouvoir symbolique.
Plus qu’un créateur de formes, Craig Green se pense comme un sculpteur de silhouettes émotionnelles et narratives. Son travail, rigoureux et sensible, explore la tension entre protection et vulnérabilité, identité et transformation silencieuse. Finalement, il redéfinit les contours d’un vêtement qui raconte, qui suggère, qui traverse le temps et les imaginaires collectifs.
2025 : le retour d’un geste intime

Une collection marquée par le deuil et la tendresse
Après une pause médiatique notable, le directeur artistique signe en 2025 un retour à la fois discret et bouleversant. Sa collection printemps-été, dévoilée dans l’intimité feutrée de son studio londonien, adopte une posture de recueillement. Ce défilé, loin des grandes mises en scène habituelles, rend hommage à son père, disparu en 2023. Cette absence irrigue l’ensemble de la collection, dont la poésie silencieuse touche au cœur. Les silhouettes épurées, plus calmes qu’à l’accoutumée, n’en demeurent pas moins puissantes. Les drapés flottants, les attaches apparentes, les couches de tissus superposéesrappellent que, chez Craig Green, la force se cache souvent dans le détail.
Cependant, cette saison marque une rupture. Moins spectaculaire que les précédentes, cette collection s’ancre davantage dans une recherche de sincérité, de pureté, voire de réconciliation intérieure. Chaque pièce semble contenir une histoire personnelle, presque un aveu. La gravité du propos n’empêche pourtant pas une certaine douceur dans les lignes, une légèreté tactile dans les étoffes. Ce travail subtil, à la fois pudique et sensoriel, confirme la maturité d’un créateur qui ne sacrifie jamais l’émotion à l’effet.
Bien au contraire, Craig Green affine ici son langage avec une retenue nouvelle, creusant les silences du tissu comme autant de zones de résonance intime. Il ne cherche plus à surprendre, mais à émouvoir. Et c’est peut-être là que réside sa plus grande audace.
Une transmission active
Parallèlement à sa carrière de designer, l’artiste enseigne à l’Université des arts appliqués de Vienne, où il dirige un atelier très suivi. Là, il encourage une pédagogie expérimentale, fondée sur l’introspection et le rapport charnel au vêtement. Ses étudiants ne cherchent pas à séduire, mais à comprendre. À déconstruire les formes. À bâtir des langages à partir de leurs failles, de leurs intuitions, de leurs angoisses. Ainsi, le créateur devient un mentor exigeant, mais profondément respecté, pour une génération en quête de vocabulaire sensible et de forme réparatrice.