Le jour où Madonna est arrivée à New York avec 35$ en poche
“I Love New York” chantait Madonna sur son sixième album studio “Confessions on a Dance Floor” (2005). Le weekend dernier, la chanteuse américaine a partagé sur sa page Instagram un cliché datant de son arrivée dans la grosse pomme, en 1978. Si la reine de la pop porte un amour tout particulier à cette ville, c’est qu’alors âgée de seulement 19 ans, la jeune Madonna Louise Ciccone débarque pour la première fois à New York avec 35$ en poche et de l’ambition à revendre. Elle puisera dans son expérience de l’underground new-yorkais pour façonner certains des tubes les plus marquants de sa carrière, à l’image de “Vogue” ou “La Isla Bonita”. Retour sur le jour qui a changé le cours de sa vie.
Par Allan Lemarchand.
“Emmenez-moi où ça bouge.” À peine débarquée de son Michigan natal, Madonna arpente les rues de New York et hèle son premier taxi, lui demandant de la déposer “là où ça bouge”. Tout juste âgée de 19 ans, la jeune fille se retrouve seule en plein Times Square, au milieu d’écrans géants, de façades lumineuses et du ramdam new-yorkais. Avec seulement 35$ en poche à son arrivée, Madonna enchaine les petits boulots. Elle travaille notamment comme serveuse dans un café situé en plein cœur de Manhattan, avant d’être licenciée pour avoir lancé de la gelée au visage d’un client. Elle trouve par la suite des positions en tant que danseuse et réalise des clichés érotiques pour subvenir à ses besoins. Lorsqu’elle ne travaille pas, Madonna suit des cours à l’immense école de danse moderne Alvin Ailey sous la tutelle de Martha Graham. La nuit, elle fréquente la scène underground de New York, et fait la fête au Studio 54 où elle rencontre Keith Haring, Jean-Michel Basquiat et Andy Warhol. Mais quand les portes des discothèques ferment, Madonna retrouve son appartement situé dans le Lower East Side, un quartier qui, dans les années 80, est empreint de criminalité, où les prostituées font les trottoirs et les cinémas projettent des films pornographiques 24h/24.
“En 1979, New York était un endroit effrayant. Lors de la première année, on m’a menacée avec une arme à feu et violée sur le toit d’un immeuble tout en me tenant un couteau sous la gorge”, se rappelle la chanteuse. “Mon appartement a été cambriolé tellement de fois que je ne prenais même plus la peine de fermer la porte.” Dans les années 80, alors que la culture ball room new-yorkaise est en pleine effervescence, les premiers cas de VIH font des ravages dans la communauté LGBT. Le grand public qualifie alors cette maladie de “cancer des gays”, perçue comme une punition divine. “[Dans les années 80] assumer son homosexualité était dangereux. Être associé à la communauté gay l’était également”, explique Madonna. “J’ai perdu énormément d’amis à cause des violences, de la drogue et du sida.” Parmi les amis mentionnés par la chanteuse américaine, on retrouve son acolyte du Studio 54, Keith Haring. Décédé en 1990 à l’âge de 31 ans, l’artiste américain a largement abordé la problématique du safe sex dans ses œuvres, à une époque où la documentation sur le sujet était très mince. À son tour en 1989, Madonna s’engage pour la cause en incluant une brochure d’informations sur le sida à l’intérieur de son album Like A Virgin (1984).
En vivant à New York, Madonna se retrouve plongée dans un réel melting pot culturel et musical. Elle fréquente les clubs underground new-yorkais et se retrouve exposée à différentes cultures qui l’inspireront grandement : “Lors de mes années new-yorkaises, j’écoutais en continu de la salsa et de la merengue. Ces genres de musique étaient diffusés partout, à la radio, dans les rues et dans les clubs.” Ces années passées au sein de la grosse pomme ont été déterminantes pour Madonna, aussi bien dans la création de son personnage que dans celle de son identité musicale. On retrouve son attitude punk et irrévérencieuse sur des titres tels que Like a Prayer ou Like a Virgin, son lien avec la communauté underground avec son ode à la culture ball room intitulé Vogue, et ses influences latines sur La Isla Bonita. Au fond, la musique des premières heures de Madonna résonne comme une lettre d’amour à la ville où elle a fait ses armes, réitérée en 2005 avec son titre I Love New York, issu de son sixième album studio, Confessions on a Dance Floor : “Je n’aime pas les villes, mais j’aime New York/Tous les autres endroits me font sentir comme une idiote/Los Angeles est faite pour les gens qui dorment/Aucune autre ville ne m’a jamais rendue heureuse, nulle autre que New York.”