Comment l’artiste Carla Chan a capturé la lumière magique des Alpes pour La Prairie
La célèbre maison suisse La Prairie s’est associée à l’artiste Carla Chan pour célébrer la “Golden Hour”, cette heure dorée, radieuse et régénératrice, qui lui a inspiré la nouvelle collection Pure Gold. L’installation immersive de l’artiste, présentée pour la première fois à Art Basel Hong Kong, offre une plongée sensible au cœur de ce moment de lumière magique dans les Alpes. L’artiste nous en dévoile tous les secrets.
Par Thibaut Wychowanok.
Les Alpes suisses ont toujours suscité l’émerveillement. Mais lorsque le soleil initie sa lente descente dans le ciel, la beauté du paysage se voit sublimée d’un éclat sans pareil. C’est à cette Heure Dorée que La Prairie rend un hommage éclatant cette saison avec sa nouvelle collection Pure Gold, une ligne de trois produits innovants s’inspirant de ce resplendissement unique pour le transposer à la peau. L’événement est l’occasion pour la prestigieuse maison de soins suisse de perpétuer sa tradition remarquée de collaborations artistiques. L’artiste originaire de Hong Kong Carla Chan offre ainsi une réinterprétation envoûtante de l’Heure Dorée des Alpes suisses à travers une œuvre vidéo la métamorphosant en espaces immersifs propices à la rêverie.
Intitulée Space Between the Light Glows, l’œuvre de Carla Chan forme l’aboutissement d’une collaboration initiée lorsque l’artiste s’est rendue pour une résidence artistique à la Monte Rosa Hut, nichée au cœur des Alpes suisses. Elle y a capturé les variations du paysage au rythme de la nature et de la lumière, rendant palpables ces changements et la palette d’émotions qu’ils suscitent. Une impermanence du monde qui intéresse depuis toujours l’artiste pour qui la réalité, l’illusion, mais aussi la fascinante ambiguïté de la nature forment autant de matériaux précieux. À la limite de l’abstraction, ses réalisations entonnent un hymne éblouissant à la puissance de la nature. Les espaces et les formes semblent s’y fondre les uns dans les autres, s’hybrider comme par alchimie en un habile mélange d’ombre et de lumière.
Numéro : Comment décririez-vous l’installation que vous avez créée pour La Prairie ?
Carla Chan : Il s’agit avant tout d’une expérience immersive : une déambulation à travers une installation d’écrans formant comme autant de sources lumineuses. Vous ressentez alors véritablement que vous voyagez à travers la lumière. Et vous pouvez faire l’expérience de cette lumière si particulière de l’Heure Dorée, et de son évolution au cours du temps.
Que représente l’Heure Dorée à vos yeux ?
C’est un moment très particulier qui vous fait prendre conscience qu’un changement est en train de s’opérer. Vous prenez conscience du temps. La lumière se transforme, se fane jusqu’à disparaître petit à petit. Cela correspond pour moi à un moment fort de réflexion, de retour sur soi. Lorsque j’étais au sein de la résidence La Prairie au cœur des Alpes, je me sentais totalement impuissante face à cette nature et, en même temps, j’étais submergée par la beauté des lieux. Une beauté qui, bientôt, pourrait très bien ne plus exister, à l’instar de ce fabuleux glacier que je pouvais admirer. La lumière passant sur la glace créait des reflets et des ombres fascinantes. La glace elle-même semblait alors prendre une forme de légèreté. Je voulais que toutes ces impressions investissent mon travail et soient rendues sensibles au sein de l’installation : le paysage qui nous subjugue disparaît dans la lumière, de la même qu’il disparaît avec le temps. Mon travail touche au moment spécifique où la lumière change. Pour moi, il s’agit là d’un moment non dimensionnel très intéressant car le temps laisse alors beaucoup de place à l’imagination. Par ailleurs, la lumière étend alors son ombre, elle crée cette dimension différente d’une illusion d’échelle, à l’intérieur même de l’espace.
Quel est votre rapport à la nature et comment influence-t-il votre travail d’artiste ?
Lorsque j’étais plus jeune et que je vivais à Hong Kong, j’étais littéralement pétrifiée par la nature. Je n’allais jamais à la plage ou en forêt. Vous pouvez imaginer mon sentiment d’insécurité et d’impuissance face à un glacier ! Mais ce sentiment même a attisé ma curiosité. Je voulais découvrir d’où provenait cette peur. Et j’ai commencé à développer un travail, à l’aide de nouvelles technologies numériques, qui m’a permis de générer et de mettre en forme la nature telle que je me l’imaginais : une nature née de mon esprit et rendue visible par des procédés digitaux. C’est pour cela que la vidéo m’intéresse plus que la photographie – ou la peinture – qui arrête le temps à un moment donné. Avec la vidéo, je peux développer une animation sur une période, et susciter ainsi chez le spectateur différentes émotions. L’expérience ne se réduit pas à un moment, mais à l’évolution d’un moment. Je suis particulièrement satisfaite de ce travail pour La Prairie, car, pour la première fois, j’explorais la question de la lumière et de son rapport à la nature. Là encore, lorsque l’on parle de lumière, il est question de temps… elle est en constante évolution.
Pourquoi les nouvelles technologies ont-elles pris une place si importante dans votre travail ?
J’ai rapidement abandonné la peinture traditionnelle pour chercher, à travers de nouveaux médiums, un moyen de refléter non seulement notre époque, de penser le futur mais également pouvoir travailler sur le temps et étendre les possibilités de ressentir des émotions. Travailler avec une intelligence artificielle ou des systèmes de tracking m’aident à démultiplier les possibilités d’expérience. La nature n’est jamais capturée dans mes œuvres, mais elle est présentée en mouvement, en animation. Les nouvelles technologies permettent par exemple de créer des textures inédites qui repoussent les limites entre la réalité et l’illusion. Surtout, la technologie introduit comme un nouveau cerveau dans le processus créatif. Il ne s’agit pas seulement de donner vie à une nature issue de mon esprit, mais d’utiliser la technologie pour dépasser les limites de mon esprit. La part d’imprévisible et d’aléatoire est bien plus importante. Je peux ainsi créer des choses auxquelles j’aurais été incapable de penser.
En tant qu’artiste, comment définiriez-vous votre rapport au temps ?
Je m’intéresse beaucoup à la littérature scientifique portant sur ce sujet. Je pense par exemple à l’ouvrage L’Ordre du temps de Carlo Rovelli. Mais, en tant qu’artiste, je dirais que le temps m’intéresse parce qu’il permet de déployer différentes émotions sur différentes périodes. C’est pour cela que mon travail est toujours fondé sur une expérience temporelle. Les émotions peuvent changer. Je peux même les orchestrer.