1 avr 2020

The hell of ultra-Orthodox communities: rape and forced marriage

Esprits étriqués, valeurs archaïques, droits des femmes bafoués… ”Unorthodox”, la nouvelle série produite par Netflix et disponible dès demain revient sur les pratiques sectaires des communautés ultra orthodoxes. 

Toutes les grandes séries débutent par un bouleversement. Dans le premier épisode de Breaking Bad, Walter apprend qu’il a un cancer et décide illico de cuisiner de la méthadone pour gagner de l’argent. Dans un autre registre, Friends s’ouvre sur un mariage raté, celui de Rachel, qui décide alors d’emménager dans la colocation devenue la plus célèbre du monde. Du côté des Soprano, le pilote (diffusé sur HBO il y a plus de vingt ans) commence sur un plan du personnage principal, le mafieux Tony, décidé à remédier à ses crises d’angoisses en s’asseyant face à une psychiatre. Nous n’oublierons jamais, non plus, le crash d’avion de Lost, la chute de Bran Starck dans Game of Thrones, ni même la mort du patriarche de la famille Fisher dès le premier épisode de Six Feet Under… Comme tous ces shows entrés au panthéon du petit écran, Unorthodox débute par une rupture : un personnage qui prend la fuite. 

 

Produite par Netflix, cette nouvelle série s’annonce bouleversante. Elle s’ouvre par un plan rapproché sur une femme aux allures d'enfant, Etsy (Shira Haas), 19 ans, foulard sur la tête et alliance fixée sur l’annulaire gauche. La gamine aux grands yeux et aux traits fins rassemble à la hâte quelques affaires – passeport, sac à dos, perruque – et fuit les regards de ses voisines, vêtues de longues jupes, et ceux de leurs maris, coiffés de schtreimels (chapeaux de fourrure traditionnels des juifs orthodoxes) et papillotes. Elle grimpe dans un taxi la conduisant directement de son Brooklyn natal à l’aéroport JFK. Unorthodox a débuté depuis quelques minutes et l’on comprend tout de suite son enjeu : le jour de shabbat, Etsy s’envole pour Berlin et se délivre enfin de la communauté ultra orthodoxe qui l’oppresse.

 

 

© Netflix

Inspirée de l’autobiographie de l’Américaine Deborah Feldman Unorthodox: The Scandalous Rejection of My Hasidic Roots (“Non ortodoxe : la rupture scandaleuse avec mes racines hassidiques”), d’abord écrite sur un blog puis publiée en 2012 –, la série réalisée par l’actrice et metteuse en scène allemande Maria Schrader (Stefan Zweig, Adieu l’Europe) se veut subversive et ce, dès les premières scènes : elle dénonce les dessous d'une communauté hassidique, connue de tous pour ses grandes coiffes et ses longues barbes. Ce mouvement de renouveau religieux né au XVIIIe siècle en Europe de l'Est prône un refus du changement, de la modernité et la communion joyeuse avec Dieu, pratiquée sans réserve par le chant et la danse. Cette communauté très fermée, voire sectaire, possède un mode de vie traditionnaliste centré sur l'étude et sur la famille, régis par des règles très strictes.  Unorthodox en dénonce certaines dérives : mariages forcés, viols, rêves avortés, comportements extrémistes…

 

Ce show qui avait tout pour captiver ne tient cependant pas ses promesses. D’abord, à cause de son format : ce n’est qu’une mini-série, composée d’une saison de quatre épisodes, précipitant exagérément l’intrigue. La fuite d’Etsy, sa prise en chasse par son mari Moishe (Amit Rahav) s'enchaînent brutalement au détriment de la crédibilité. Ensuite, à cause de son écriture, trop édulcorée, voire niaise : n’ayant connu que New York et son quartier juif, la jeune femme s’envole vers Berlin, la ville européenne où la fête est reine et où, en plus d’être permis, tous les excès sont presque encouragés. On pourrait attendre de la jeune mariée qu'elle s’oublie dans les arrières salles du Berghain, embrasse filles et garçons, rentre chez elle au petit matin et change radicalement de vie. Mais il n’en est rien. Etsy poursuit son rêve avorté de carrière : devenir pianiste. Elle se rapproche alors d’une bande de musiciens de la Philharmonie et auditionne tout aussi vite pour rejoindre leur classe.

 

 

https://youtu.be/-zVhRId0BTw

Bien que dénonciateur de pratiques archaïques et dégradantes, Unorthodox ne convainc pas, restant convenu et manichéen, et n'allant jamais au bout de la violence qu'il évoque, malgré quelques scènes fortes comme celle du mariage où Etsy – mariée alors qu’elle n’est pas encore majeure et son mari non plus –  est contrainte, selon la coutume, de porter un linge blanc totalement opaque sur le visage, tandis qu'hommes et femmes célèbrent cette union chacun de leur côté, dans deux salles séparées, sans oublier des scènes de discussions lunaires où seul le yiddish est autorisé et l’anglais banni. Malgré cela, la première saison d’Unorthodox fait pourtant l’effet d’un pétard mouillé. Si Anna Winger et Alexa Karolinski, les créatrices du show, sont rappelées pour un second chapitre, elles auraient tout intérêt à s'inspirer de Yolande Zaumerman et de son film M – César du meilleur documentaire cette année –, portrait juste et brutal de l’enfer des communautés ultra orthodoxes.

 

Unorthodox (2020), une série créé par Anna Winger et Alexa Karolinski, disponible demain sur Netflix.